Démantèlement de l’USAID : début d’une crise humanitaire  

Par Rémi Brosseau-Fortier 

Créé en 1961, l’USAID offrait de l’aide humanitaire dans plus de 130 pays. 

L’administration Trump a annoncé la mise en congé des employés de l’agence américaine pour le développement international (U.S. Agency for International Development, USAID), le 4 février. Une majorité de professionnels et d’universitaires ont vivement dénoncé cette décision mettant en danger la vie de centaines de milliers de personnes dépendantes du soutien de l’agence américaine.   

Le 7 février, le président Trump a réclamé la suppression totale de l’USAID en invoquant des niveaux jamais vus de corruption.  

Mené par le Département de l’efficacité gouvernementale (le DOGE) d’Elon Musk, l’objectif final de cette décision est le démantèlement de l’un des piliers de l’aide humanitaire et du développement dans le monde. 

Le milliardaire Musk a déclaré que l’agence est « l’une des pires et plus coûteuses bourdes de politique étrangère de l’histoire américaine » et qu’il s’agit d’un « nid de vipères de marxistes […] qui détestent l’Amérique ». Ces critiques acerbes s’inscrivent dans l’objectif du DOGE de réduire les dépenses gouvernementales de 2 000 milliards de dollars, soit une baisse de 30 % par rapport à l’exercice budgétaire 2024.  

En réaction aux nombreux licenciements de membres du personnel et de hauts cadres, trois poursuites ont été intentées à l’encontre du gouvernement américain en raison des violations de nombreuses lois du Congrès américain qui protègent les postes des fonctionnaires.  

Pour calmer les critiques, le secrétaire d’État étasunien, Marco Rubio, a affirmé que l’agence sera « seulement » intégrée au département d’État, ce qui va annihiler l’autonomie de l’aide humanitaire par son alignement complet aux intérêts « réalistes » de la politique étrangère de l’Oncle Sam.   

Qu’est-ce que l’USAID ?  

L’agence américaine pour le développement international a été créée par le président John F. Kennedy grâce au Foreign Assistance Act of 1961 créant l’USAID. Fondée sur les principes du plan Marshall conçu pour la reconstruction de l’Europe après la Seconde Guerre mondiale, l’agence américaine a le mandat de soutenir la santé, la démocratie, l’éducation et le libre-échange dans une perspective libérale.  

Soutenant des organisations non gouvernementales, des gouvernements étrangers et des organisations internationales, ce sont 40 milliards de dollars qui ont été versés en 2023 par l’agence à environ 130 pays.  

Représentant uniquement 1 % du budget américain, les principaux pays bénéficiaires ont été l’Ukraine, l’Éthiopie, la Jordanie, la République démocratique du Congo et la Somalie. Comptant plus de 10 000 employés dont les deux tiers travaillent à l’étranger, cette aide humanitaire s’incarne notamment dans l’acheminement de nourriture au Soudan en situation de famine, la lutte contre le VIH/sida en Afrique et l’envoi de matériel scolaire aux enfants ukrainiens déplacés.  

Des conséquences désastreuses pour les civils  

La professeure en développement international Maïka Sondarjee affirme, dans les pages du Devoir, qu’« un monde sans l’aide internationale des États-Unis est un monde moins sécuritaire et en moins bonne santé ».  

En plus de nuire à sa crédibilité et de diminuer son soft power, l’action américaine fragilise le multilatéralisme de l’ordre international, ce qui laisse la porte grande ouverte aux influences russe et chinoise dans les pays du Sud global. La lutte contre le paludisme au Cambodge, la malnutrition au Népal, le VIH/sida en Haïti et l’accès à l’avortement dans le monde sont remis en question. Humainement, ce sont les populations vulnérables qui payeront le prix du retour en force de l’isolationnisme américain.    


Source : Flickr

frederique_kim@live.ca  Web   More Posts
Scroll to Top