Par Sarah Gendreau Simoneau

Vivre jusqu’à 100 ans. En santé, esprit sain en prime. Avec une panoplie d’anecdotes encore vivantes et claires à raconter. Et des générations qui remercient la fougue et les portes défoncées. Un rêve ? Un but ? Pour Janette Bertrand, c’est la réalité.
Si vous ne connaissez pas Janette Bertrand, qui a soufflé ses 100 bougies le 25 mars dernier, j’aurais tendance à vous dire que vous vivez sous une roche ou sur une autre planète. Mais si jamais, je tente, dans ce texte, de décrire le mieux possible qui est cette grande dame, inspirante, combattante, engagée.
Parce que Janette est une des figures féminines les plus importantes du 20e et du 21e siècle et, pour toutes personnes s’intéressant moindrement à l’égalité, à la cause des femmes, à la lutte des différents groupes marginalisés de la société, Jeannette Bertrand est un modèle, une pionnière et une figure d’ouverture d’esprit sans bornes.
Un parcours bien rempli
Femme de cœur, de lettres et d’idées, personnalité québécoise parmi les plus admirées de tous les temps, Janette Bertrand a reçu de nombreux honneurs pour sa remarquable carrière, tant dans le domaine littéraire que radiophonique, télévisuel ou théâtral, qui a commencé au début des années 1950.
Comme journaliste, écrivaine, animatrice ou scénariste, elle a manifesté de façon juste des messages engagés sur l’émancipation et l’épanouissement des femmes et d’autres groupes de la population, notamment les personnes âgées et les personnes vulnérables. Comptant une vingtaine de livres à son actif, dont la plupart concernent les relations de couple et les réalités des femmes, elle a marqué l’histoire du Québec en dépassant les préjugés.
Janette Bertrand a eu le courage d’ouvrir le dialogue et de faire tomber des tabous à une époque où c’était difficile. Elle a encouragé publiquement les femmes à sortir du carcan qui les confinait depuis des siècles. Elle est dotée d’une empathie profonde et d’une volonté sincère de mieux comprendre les réalités humaines et c’est pour toutes ces raisons qu’elle est une femme exceptionnelle.
Qu’elle ait 100 ans et qu’elle puisse constater, encore aujourd’hui, l’impact qu’elle a dans la société québécoise est une chance, pour elle, mais surtout pour nous.
Janette a reçu plusieurs honneurs durant sa longue vie, dont le titre de Chevalière de l’Ordre national du Québec, le Prix du Gouverneur général pour les arts du spectacle, le titre d’Officière de l’Ordre du Canada en plus de celui de Chevalière de l’Ordre de la Pléiade (Organisation internationale de la francophonie), entre autres.
Grande féministe
Janette Bertrand est une pionnière de l’avancement des femmes et un modèle d’émancipation. Elle a poursuivi des études universitaires à une époque où très peu de femmes accédaient à l’enseignement supérieur. Dans les années 1950, elle signait un courrier du cœur où elle incitait les femmes à affronter leurs problèmes, abordant des sujets comme la violence conjugale et la contraception. « Ça a été la plus grosse affaire de ma vie. Maintenant, 90 % des femmes sont au travail. J’ai dû faire quelque chose de correct », exprime-t-elle à Radio-Canada.
Selon elle, c’est impensable que de jeunes femmes ne soient pas féministes ou, du moins, hésitent à se dire féministes aujourd’hui. « On est ce qu’on est. »
En parlant de la cause féministe, elle évoque en entrevue avec Le Devoir le droit de vote des femmes au Québec, en 1940, la Deuxième Guerre mondiale, qui s’est terminée en 1945, et ses débuts en télévision, dans les années 1950, lorsque son mari de l’époque, Jean Lajeunesse, devait cosigner les textes avec elle pour qu’ils soient acceptés. À aucun moment, sa mémoire ne lui fait défaut. « L’expérience, ça ne s’achète pas, souligne-t-elle. J’ai beaucoup beaucoup vécu de choses et ça me tente encore de le transmettre. »
Dans les années 1980, elle a écrit la série L’Amour avec un grand A qui aborde des sujets de société, comme l’enfance et les relations hommes-femmes, en plus de parler d’enjeux alors tabous, comme le divorce et l’homosexualité. Après chaque épisode, elle recevait des invités pour discuter de l’émission et des sujets. Son approche, axée sur le dialogue plutôt que la confrontation, a fait évoluer la société, selon elle.
Elle dit : « Un jour, dans la rue, un homme m’a dit : “Vous m’avez sauvé la vie. Je ne me suis pas suicidé parce que vous avez dit à ma mère que c’était correct [que je sois homosexuel]”. Ça, ça me fait du bien. C’est du tangible. »
Des célébrations par dizaines
Depuis quelques semaines, déjà, la province entière célèbre la vie de cette femme d’exception avec des entrevues, des émissions spéciales et des hommages.
Envie de vous plonger dans l’univers de Janette ou d’en connaître davantage sur ses réalisations ? La Place des Arts propose une installation vidéo documentaire d’une vingtaine de minutes, intitulée Le siècle de Janette, qui revient sur les bouleversements majeurs dont elle a été témoin, qu’elle a vus, vécus, peut-être même influencés. Imaginée par Martin Bundock et réalisée par Léa Clermont-Dion, l’installation est présentée gratuitement, à la Salle d’exposition de la Place des Arts, du 26 mars du 18 mai.
Sinon, Duceppe présente une création signée Rébecca Déraspe, en collaboration avec Janette Bertrand elle-même. Du 9 avril au 17 mai, Guylaine Tremblay incarnera Janette dans un dialogue senti avec diverses générations de personnages.
Janette Bertrand sera également l’invitée d’honneur du Salon international du livre de Québec, du 9 au 13 avril. L’édition, baptisée « Rassembler les générations », réunira plusieurs auteurs et autrices qui offriront un poème à Mme Bertrand dans le cadre d’un Cabaret du courrier du cœur.
Sinon, des émissions et entrevues spéciales sont disponibles sur les plateformes de diffusion des différentes chaînes télévisées. Je vous invite fortement à vous informer sur cette dame « qui a déniaisé le Québec ». Elle a grandement à nous apprendre sur l’ouverture, sur la place des femmes, sur l’égalité et sur l’empathie aux autres. J’aurais pu faire dix pages sur son histoire, sur son apport à la société, sur ses idées. Souhaitons-lui donc encore quelques années de réalisations afin qu’on s’éduque encore plus.
Crédits : Julien Faugere

Sarah Gendreau Simoneau
Passionnée par tout ce qui touche les médias, Sarah a effectué deux stages au sein du quotidien La Tribune comme journaliste durant son cursus scolaire, en plus d’y avoir œuvré en tant que pigiste durant plusieurs mois. Auparavant cheffe de pupitre pour la section Sports et bien-être du journal, et maintenant rédactrice en chef, elle est fière de mettre sa touche personnelle dans ce média de qualité de l’Université de Sherbrooke depuis mai 2021.
Elle s’efforce, avec sa curiosité légendaire, de dénicher les meilleurs sujets diversifiés pour vous!