Par Émilie Pinard-Fontaine
Vendredi le 3 juillet dernier s’est tenue la première rencontre du mouvement La communauté culturelle se mobilise en Estrie. L’initiatrice, Ariane Dion Deslauriers, a lancé un cri du cœur devant un groupe d’une soixantaine de personnes rassemblées au Carré-Strathcona au centre-ville de Sherbrooke, en compagnie de Juliàn Gutiérrez et avec le soutien du Conseil de la culture de l’Estrie. Leur but ? Mobiliser le milieu culturel afin de revendiquer de meilleures conditions de travail pour les artistes.
Un lancement inespéré
C’est avec une voix oscillant entre fierté et colère qu’Ariane Dion Deslauriers, que l’on connait mieux sous les surnoms la Fabricoleuse ou Ariane DesLions, a abordé l’événement de vendredi. C’est tout un changement de ton pour celle qu’on entend habituellement rire et chanter. Mais depuis le début de la pandémie de Covid-19, elle n’a plus le cœur à rire, tout comme de nombreux artistes. Doit-on rappeler que le milieu culturel est le premier qui a dû fermer ses portes et qu’il est toujours en attente de dates et de consignes pour une possible réouverture ? Pour celle qui a perdu 80 000 $ de contrats en deux mois à cause de la situation, la Prestation canadienne d’urgence (PCU) est non seulement insuffisante, mais sa date d’échéance arrive à grands pas. Pourtant, le milieu culturel ne peut toujours pas reprendre ses activités, lui qui a l’habitude de planifier l’ensemble de ses événements une à deux années d’avance. C’est la raison pour laquelle elle a lancé ce mouvement, pour discuter de la situation et organiser un plan d’action afin de faire entendre les revendications du domaine artistique. C’est une belle réussite pour la Fabricoleuse, qui s’enthousiasme de la présence de gens de tous les milieux, notamment des conseillers municipaux et des représentants des partis politiques.
La mobilisation se met en branle
Après le lancement vient le plan d’action et c’est là-dessus que se pencheront Ariane Dion Deslauriers et la quarantaine de personnes ayant donné leur nom pour contribuer à la mobilisation. Il faut dire que cette initiative estrienne est la première au Québec. Il y a eu bien des sorties dans les médias d’artistes ou d’organismes tels que le Conseil québécois du théâtre, mais un regroupement de tous les milieux culturels réunis, c’est inédit ! Le mouvement se donne l’été, une période plus tranquille en politique, pour élaborer un plan d’action détaillé. La forme n’est pas encore tout à fait décidée : est-ce qu’il y aura publication d’un manifeste ou organisation d’une grande marche culturelle ? Cela reste à voir, mais une chose est sûre : ce n’est qu’un début ! Car si la pandémie a été si difficile pour les artistes, il ne faut pas oublier à quel point leur travail fut nécessaire à bien des citoyens afin de passer au travers de ces mois confinés. « Les artistes sont plus que jamais utiles au bien commun de la population, alors pourquoi sont-ils si souvent oubliés ? », s’offusque l’initiatrice du mouvement. D’autant plus que leurs conditions de travail les poussent souvent à travailler en solitaire et qu’aucun regroupement ou syndicat ne les collectivise. C’est pourquoi il est important de saisir l’opportunité afin de revoir les modes de fonctionnement et assurer une sécurité sociale aux artistes.
Des lois d’un autre siècle
Quelles sont les revendications et les demandes de ce nouveau mouvement ? Il souhaite que les gouvernements balisent les relations de travail entre les artistes, les producteurs et les diffuseurs, qu’ils leur permettent d’accéder à des aides de l’État telles que l’assurance emploi et qu’ils mettent en place de nouvelles mesures qui leur permettraient, entre autres, de cumuler leurs heures de travail. Il faut dire que les présentes lois qui encadrent le statut d’artiste et de travailleur autonome datent de la fin du 20e siècle, bien avant l’arrivée d’Internet, qui est venu tout changer. Selon Ariane Dion Deslauriers, il est grand temps de dépoussiérer le tout. Elle espère voir la mise en place non seulement d’une mesure de soutien temporaire aux artistes pour la durée totale de la présente pandémie, mais en plus qu’une refonte des lois entourant le statut de l’artiste soit effectuée. C’est une démarche qui avait été entamée par Québec en décembre 2019, mais qui a été reportée à l’automne 2020.
Espoir à l’horizon
Il existe de nombreuses possibilités pour améliorer le sort des travailleurs culturels. Que ce soit un soutien plus grand de la part de l’État, la mise en place d’une assurance annulation ou encore la création d’un fonds auquel les artistes pourraient cotiser et qui les soutiendrait afin de leur assurer un filet social. Le regroupement est d’ailleurs en train de monter un dossier des initiatives qui existent dans d’autres pays afin de présenter aux gouvernements les différents modèles possibles qui ont fait leurs preuves ailleurs dans le monde. Des solutions et de l’espoir il y en a, il ne reste qu’à s’atteler à la tâche !
Vous souhaitez vous impliquer ou obtenir davantage d’informations ? Vous pouvez communiquer directement avec Ariane Dion Deslauriers au arianedeslions@gmail.com.
Crédit Photo @ Ariane des Lions