Protéger l’environnement, c’est le devoir de tous 

Par Marie-Jeanne Eid et Jacob Fontaine 

La manifestation Pour la suite du monde a eu lieu le vendredi 27 septembre. Ce texte est inspiré des témoignages recueillis auprès des personnes militantes présentes à Sherbrooke.  

«Protéger l’environnement, c’est le devoir de tous»  

Protéger l’environnement, c’est le devoir de tous. Que ce soit un simple slogan ou une pensée prémonitoire, c’était certainement l’énergie qui régnait le 27 septembre dernier lors de la énième marche pour le salut de mère Nature. Une foule de tous âges et de toutes provenances s’amassait dans l’agora extérieure de l’Université de Sherbrooke sous les paroles d’un chansonnier qui réchauffait l’air. Oui, bien sûr, les motivations étaient diverses. Pourtant, toutes et tous s’assemblaient dans un récit commun : une unité militante qui emplit l’imaginaire, qui berce d’espoir et surtout, qui se construit lentement jusqu’à devenir une force collective prête à refonder notre monde.  

« J’apprécie ce que j’ai aujourd’hui »

Des élèves de l’école primaire de l’Écollectif participent à la manifestation.

Ce récit commence par l’éveil d’une conscience. L’appréciation de ce qu’on a aujourd’hui, mais aussi le rappel que c’est en danger. Une naïveté enfantine qui nous donne des ailes et nous prépare au combat contre les pétrolières, les multinationales et le grand capital. Tous ces adversaires qui mettent en danger cette nature qui nous est chère et qui constitue notre foyer. Cet éveil se transforme tranquillement en inquiétudes : que restera-t-il pour la prochaine génération ? C’est ainsi qu’une bande d’enfants prennent la rue en ce 27 septembre avec un motto collectif : « Je suis ici pour que les autres enfants puissent vivre comme moi ». Des jeunes qui militent avec une conscience plus développée que celles de bien des adultes, des jeunes qui comprennent que la préservation de notre seule planète est bien plus importante qu’une liasse de billets.  

«La colère est notre énergie renouvelable»  

Une personne scande des slogans engagés dans un mégaphone.
Des dizaines de pancartes, aussi créatives les unes que les autres, sont brandies au-dessus de la foule.

Malheureusement, la réalité s’impose : les gens veulent du changement, mais il tarde à arriver. Les marches, la désobéissance, l’activisme politique semblent vains devant les 5.3 millions d’hectares de forêt canadienne qui brulent encore cette année. La frénésie militante peine à atteindre nos institutions politiques. Les prières aux dieux capitalistes continuent, le sablier de l’Accord de Paris s’épuise : une augmentation de la température globale de 1.48 °C est enregistrée en 2023. Devant l’immobilisme rance, « la colère est notre énergie renouvelable ». Une colère qui devient la source d’un militantisme émotif et identitaire. Pour les malchanceux, elle se transforme en un cynisme étouffant.  

«Si ce combat est perdu, les autres n’ont aucun sens»  

Un groupe de personnes manifeste.
Yolande et Sylvain sont présents à la manifestation afin de recueillir des signatures à une pétition réclamant un BAPE pour le projet de voie de contournement de Lac-Mégantic.

Pour d’autres, la colère militante prend un sens. Dans le sud global, les changements climatiques font déjà des ravages. L’activisme écologique devient secondaire lorsque la sécheresse frappe : ce qui prime c’est la survie. Militer est un privilège. Militer pour l’Autre qui souffre à cause de mon mode de vie. Militer pour celui qui souhaite un monde sain pour ses enfants, alors que je ne prévois pas devenir parent. Militer pour celles qui vivent déjà les effets des changements climatiques, alors qu’ils ne sont qu’une lointaine malédiction pour moi. Militer prend son sens dans une solidarité qui traverse frontières et appartenances.  

Certains trouvent le sens au sein même de leur foyer. Lorsque notre demeure est menacée, le combat n’est plus un choix. Il se transforme en devoir. Rappelons-nous les manifestants innus à Schefferville, qui voient leurs territoires ancestraux pillés par l’industrie minière. Rappelons-nous les gens de Lac-Mégantic, qui voient l’industrie ferroviaire exproprier, contaminer et surtout, détraumatiser leur communauté encore endeuillée. 

« Mère au front»  

Depuis plusieurs décennies, une femme participe aux manifestations pour le climat. Elle marche aujourd’hui pour l’avenir de ses petits-enfants.
Des représentantes du mouvement Mères au front participent au sit-in sur le Pont Jacques-Cartier.

Pour d’autres, c’est dans la chaleur familiale que le sens de la lutte prend racine. Un cri du cœur, un cri d’espoir retentit : « Nous sommes Mères et Grand-Mères, par le sang et autrement. Nous nous levons pour protéger nos enfants. » C’est ainsi que des femmes s’assemblent pour faire barrage, faire barrage à un capitalisme patriarcal à tendance écocidaire. Une colère maternelle qui devient colère créatrice : ce combat, elles le mènent pour la suite du monde, pour celles qui suivront. Pour que la vie gagne.   

« Mère au front », une association de femmes, mais aussi une idée partagée par plusieurs : « J’ai des enfants, des petits-enfants. C’est depuis 1970 qu’on ne fait rien. On était en retard hier, et on ne fait rien aujourd’hui ». Une sororité intergénérationnelle qui freine la montée d’un désespoir enveloppant. Quand les gens que nous aimons sont aux portes de la souffrance, le cynisme est un luxe qu’on ne peut se permettre. 

« La planète brûle, l’Estrie s’indigne »  

Des centaines de personnes écoutent les discours d’ouverture dans l’agora de l’Université de Sherbrooke.
Le cortège estrien participe aux manifestations panquébécoises Pour la suite du monde.

La fin de ce récit appartient à l’avenir. Personne ne peut prédire la tournure que prendra l’histoire militante. Un virage vers une résilience collective où une descente vers un monde atomisé ou la survie individuelle règne ? C’est face à ce futur incertain que l’Estrie s’indignait le 27 septembre. Ensemble, nous avons marché, crié, rêvé et bloqué un pont. L’individualité s’est dématérialisée pour composer un hymne qui s’accorde avec un souffle mondial réclamant du changement. Le souhait qui est laissé sur place, alors que chacun rentre chez soi, est que cet esprit communautaire reste vivant : que le vivre ensemble, le dialogue et l’entraide deviennent un réflexe naturel.   

Ce qui nous reste d’une manifestation en ce 27 septembre, c’est une demande claire à nos décideurs : la transition doit se passer maintenant, collectivement, et elle doit être radicale. Pour la suite du monde.  


Crédits: Marie-Jeanne Eid

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