Interdiction des véhicules à essence dès 2035… le gouvernement du Québec a-t-il le pied assez pesant ?

Par Véronik Lamoureux

C’est en 1950 que des analyses de relevés au sol permettaient pour la première fois de comprendre qu’il y avait un trou dans la couche d’ozone. Était-ce dû aux bombes de fixatif des femmes particulièrement coquettes ou alors à l’industrie automobile alors en plein essor ? Bien que parfois insuffisants et mal ciblés, les questionnements relatifs à l’effet de serre ne datent pas d’hier. Si l’être humain répare avec empressement un trou dans son froc, il semble avoir tendance à négliger celui qui s’égueule de plus en plus sur son distributeur d’oxygène. Promesses de gouvernements, magouilles des pétrolières, brevets pour l’électrique mystérieusement portés disparus… plein gaz sur le dossier des véhicules à essence !

Dans un article publié par le journaliste Tommy Chouinard de La Presse le 14 novembre dernier, la question de l’interdiction des véhicules à essence refaisait surface : « Le ministre [de l’Environnement, Benoit Charette] compte modifier la loi “zéro émission” pour y enchâsser l’interdiction de la vente de véhicules neufs à essence à compter de 2035. Il cible tous les véhicules “à usage personnel” : la petite compacte comme le véhicule utilitaire sport (VUS) et la camionnette. Les véhicules qui sont utilisés à des fins commerciales et industrielles sont exclus. »

Un projet de loi digne d’une scène de Ionesco

Imaginez-vous assis face à un médecin qui vous annonce que vous avez un cancer. Celui-ci vous avise, d’un air préoccupé, que vous avez une tumeur au foie qui continuera de grossir si vous ne la traitez pas immédiatement. Soudain, la porte du bureau s’ouvre sur le gouvernement : on vous soignera, mais uniquement dans 15 ans. Le médecin, affolé, explique au gouvernement qu’il sera trop tard dans 15 ans et que l’on doit dès maintenant procéder aux traitements pour vous rescaper.

Si l’image précédente est affolante, elle est pourtant une analogie lourde de sens (ou de non-sens) qui illustre bien à la fois l’urgence environnementale et l’absurdité du délai de réaction de nos gouvernements.

Pays variés, dates variées

Sur quelles bases sont donc appuyés les calculs des gouvernements en ce qui a trait à l’émission de gaz carbonique ? Plusieurs scientifiques ayant déjà établi que nous étions présentement à un point de non-retour en matière de réchauffement planétaire, il peut devenir difficile pour la population de comprendre pourquoi la décision d’interdire les véhicules à essence vise l’an 2035.

Parallèlement, les différents pays ne semblent pas s’accorder sur l’année d’interdiction des véhicules fonctionnant au gaz : « À Ottawa, le gouvernement Trudeau a déjà dit espérer mettre fin à la vente de véhicules neufs à essence d’ici 2040. […] Aux États-Unis, la Californie vient de décider de l’interdire à compter de 2035, une annonce majeure venant de l’État le plus peuplé du pays. […] En Europe, la France et l’Angleterre ont fixé l’interdiction pour 2040 ; ce sera dès 2025 en Norvège. », a résumé le journaliste dans l’article paru dans La Presse la semaine dernière.

Les passagers du Titanic l’ont expérimenté : il est difficile de faire prendre un virage (vert) serré à un immense cargo tel que la population mondiale. Si le gouvernement assure que le délai est une question de compassion envers la population qui doit avoir le temps de modifier ses habitudes de vie, rien n’est moins sûr. Il est désormais évident que la vraie question concerne davantage l’économie mondiale, le pétrole et l’argent.

Si l’on pense interdire les véhicules à essence d’ici 15 ans, pourquoi les stations-service continuent-elles néanmoins de se construire aux quatre coins de la ville ? Voilà une conclusion qui, sans aucun doute, inspirera quelques réflexions.

Website | + posts

Laisser un commentaire

Votre adresse courriel ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Scroll to Top