Par Sarah Gendreau Simoneau
Avez-vous entendu parler de l’underconsumption core ou, en français, de la sous-consommation ? C’est une tendance populaire actuellement sur les médias sociaux auprès des influenceurs et des jeunes, notamment.
Il s’agit d’un phénomène où les adeptes cherchent à utiliser leurs biens le plus longtemps possible et à réduire au minimum l’acquisition de nouveaux produits. C’est comme le contraire des fameux haul ou unboxing popularisés par les influenceurs ces dernières années. C’est une tendance qui se rapproche de la simplicité volontaire ou du minimalisme, donc il s’agit davantage de reformater un concept déjà existant plutôt que d’inventer quelque chose de nouveau, on s’entend.
On retrouve de plus en plus ce genre de vidéos qui cumulent des millions de vues sur TikTok, sur Instagram ou encore sur YouTube, où les influenceurs incitent les gens à ne pas acheter de nouveaux biens et à consommer ce qu’ils ont déjà jusqu’à l’usure. Par exemple, on voit ces influenceurs porter la même bonne vieille paire de chaussures toute l’année plutôt que d’en acheter une nouvelle paire toutes les saisons ou encore à boire dans la même gourde d’eau plutôt que de succomber à la sortie de la bouteille d’eau tendance du mois.
L’idée n’est pas de ne plus rien acheter, mais plutôt de réfléchir à nos habitudes de consommation afin de faire des choix plus judicieux lors de nos achats. Des experts en finances et en marketing expliquent que « ce n’est pas étranger au fait que le coût de la vie est très élevé, que la situation économique est difficilement actuellement et que l’inflation fait monter le prix des biens et services », selon Radio-Canada.
Cette tendance touche surtout les jeunes de 18 à 24 ans, un groupe qui n’a déjà pas le plus grand pouvoir d’achat et qui cherche des solutions pour ne pas trop dépenser. Avec raison, puisqu’au Canada, le taux de chômage a atteint 6.4 % en juillet dernier après avoir augmenté depuis 2023. Chez les 15 à 24 ans, le taux augmente à 14.2 %. Il est normal qu’il soit plus élevé chez les jeunes que dans la population générale, mais Statistique Canada nous fait remarquer qu’il s’agit du niveau le plus élevé depuis septembre 2012. Les jeunes sont aussi sensibles aux questions environnementales et climatiques.
Le consumérisme de masse a créé d’importants problèmes environnementaux, notamment la production de grandes quantités de déchets. Dans le désert d’Atacama, au Chili, par exemple, de 11 000 à 59 000 tonnes de vêtements usagés seraient stockées dans des centres d’enfouissement. Ce n’est qu’un exemple parmi tant d’autres de la façon dont la surconsommation pollue la planète.
Un rapport de ThredUp, une plateforme de revente de vêtements rétro en ligne, a révélé que 65 % des personnes de la génération Z interrogées souhaitaient faire des achats plus durables. Cependant, un tiers d’entre elles se disent « accros à la fast fashion » et 72 % déclarent en avoir acheté en 2022. De même, des chercheurs de l’université de Sheffield Hallam ont constaté que 90 % des étudiants avaient acheté des articles de mode éphémère en 2022.
Nuances
Cependant, comme mentionné plus tôt, ce n’est pas la première fois qu’on voit ce genre de mouvement devenir populaire. Malgré tout, chaque année, on jette plus de 90 millions de tonnes de déchets sur la planète, en conséquence surtout à la fast fashion.
Dans ces vidéos, il est tout de même question de produits, ce qui peut créer des besoins aux gens qui regardent et donner envie de consommer, même si le message est le contraire.
La Dre Maryse Côté-Hamel n’est pas convaincue que le fait de montrer son peu de maquillage ou sa seule bouteille d’eau réutilisable avait toujours l’effet escompté. « Toutes les plateformes de médias sociaux de même que YouTube sont devenus, d’une certaine façon, une sorte de commerce au détail, ou une façon que les consommateurs peuvent être informés de nouveaux produits. Donc même quand on y va dans une optique de sous-consommation, il y a quand même une possibilité pour les consommateurs de voir des produits qui vont les intéresser. » Elle ajoute que les tendances au minimalisme ou à la décroissance apparaissent souvent dans les périodes économiques plus difficiles, mais qu’elles ne sont pas toujours durables. Il faudrait plus qu’un simple désir d’économiser pour faire de la sous-consommation un mode de vie.
« Sur ou sous-consommer, c’est très subjectif. Donc quelqu’un qui va habiter dans un pays en voie de développement, par exemple, ce que nous on peut considérer comme étant la sous-consommation, pour eux, ça peut être considéré comme de la surconsommation », explique Mme Côté-Hamel.
Normaliser la sous-consommation
Il s’agirait donc davantage de normaliser la sous-consommation plutôt que d’en faire l’éloge. Plusieurs créateurs de contenu, comme la pharmacienne Jennifer Wang, parlent d’achats responsables depuis des années et s’efforcent d’éduquer leurs abonnés sur la façon de déterminer la qualité des vêtements. La description du profil TikTok de Wang, « achetez moins, mais achetez bien », le démontre.
Et pour elle, la tendance à la sous-consommation devrait simplement être considérée comme le mode de consommation normal.
« La surconsommation que nous constatons provient généralement d’influenceurs qui font la promotion de produits », a-t-elle soulevé. Mais la personne moyenne ne consomme pas dans cette ampleur, a-t-elle ajouté.
Selon Jennifer Wang, de plus en plus de gens se rendent compte qu’ils n’ont pas besoin de dépenser de l’argent pour des articles qui ne seront pas utilisés au fil du temps.
Mais il peut être difficile de repousser une envie d’achat. Mme Wang dit qu’elle s’arrête souvent et se pose quelques questions de sélection lorsqu’elle envisage d’acheter un article : « Est-ce que j’ai déjà quelque chose de similaire ? Est-ce que je vais en faire bon usage ? »
Elle ajoute qu’éviter les achats en ligne l’aide à prendre de meilleures décisions concernant ses achats.
Source: Yoostart
Sarah Gendreau Simoneau
Passionnée par tout ce qui touche les médias, Sarah a effectué deux stages au sein du quotidien La Tribune comme journaliste durant son cursus scolaire, en plus d’y avoir œuvré en tant que pigiste durant plusieurs mois. Auparavant cheffe de pupitre pour la section Sports et bien-être du journal, et maintenant rédactrice en chef, elle est fière de mettre sa touche personnelle dans ce média de qualité de l’Université de Sherbrooke depuis mai 2021.
Elle s’efforce, avec sa curiosité légendaire, de dénicher les meilleurs sujets diversifiés pour vous!