Par Sarah Gendreau Simoneau

Qui n’a pas déjà cherché ses symptômes sur le Web pour se rassurer ? Avec l’accessibilité à l’information, il est difficile de s’y retrouver entre ce qui est vrai ou faux, ce qui accentue l’inquiétude chez certaines personnes qui ont une tendance hypocondriaque. Bien que plusieurs ne comprennent pas ce qui en retourne, l’hypocondrie est une souffrance bien réelle.
L’hypocondrie, maintenant appelée trouble de l’anxiété lié à la maladie, est une affection rare dont les symptômes vont au-delà des inquiétudes moyennes liées à la santé.
Les personnes atteintes de ce trouble ne parviennent pas à dissiper leurs craintes malgré des examens physiques et des tests de laboratoire normaux. Certaines peuvent changer de médecin à plusieurs reprises. D’autres évitent les soins médicaux pour ne pas nourrir leur anxiété.
On définit souvent l’hypocondrie comme étant la peur d’être malade. Ce n’est pas tout à fait faux, mais l’hypocondrie, c’est un peu plus que ça.
En fait, c’est la crainte excessive d’être atteint d’une maladie grave. Bien souvent, la personne hypocondriaque interprète mal certains symptômes. Celle-ci mettra aussi en doute les bilans et examens médicaux.
S’inquiéter pour sa santé ou pour celle de ses proches est normal, jusqu’à un certain niveau. En effet, dans la définition de l’hypocondrie, on retrouve le terme « excessif ». Si les craintes ne sont pas hors norme, c’est normal. Si l’anxiété générée par ces craintes devient trop importante, c’est là qu’on parle d’hypocondrie.
Ce sont les personnes anxieuses et celles qui ont un imaginaire développé qui sont les plus prédisposées à souffrir d’hypocondrie. Les personnes hypersensibles ainsi que ceux ayant vécu une expérience traumatisante en lien avec une maladie ou la mort sont aussi à risque.
Préjugés
Les gens hypocondriaques ont souvent l’impression que les gens autour leur disent que tout est dans leur tête, même leur médecin. La Dre Judith Brouillette, médecin psychiatre à l’Institut de cardiologie de Montréal, explique que la distinction entre les maux du corps et ceux de l’esprit est non seulement stigmatisante, mais elle sous-entend aussi que la maladie mentale n’est pas un problème médical, ce qui est faux, selon elle.
« Ce n’est pas parce que l’on comprend moins les troubles psychologiques qu’ils ne sont pas valables ! Le cerveau est plus dur à étudier, mais avec l’observation des neurotransmetteurs, c’est plus facile d’accepter qu’il peut y avoir des déséquilibres chimiques comme c’est le cas pour d’autres organes. » Pour elle, tenir une personne responsable de sa maladie mentale est par conséquent aussi déraisonnable que blâmer un diabétique pour son pancréas qui ne sécrète pas assez d’insuline.
Malgré tout, le préjugé que « c’est dans ta tête, alors il n’y a pas de vrai problème » persiste. Ainsi, il s’écoule généralement plusieurs années entre le début des consultations médicales régulières d’un hypocondriaque et sa prise en charge psychologique − pour ceux qui acceptent de franchir cette étape.
Quoi faire pour les proches de gens aux prises avec un trouble de l’anxiété lié à la maladie ? La rassurer ? Bien que de rassurer l’autre vienne naturellement, la personne hypocondriaque ne se sent jamais pleinement rassurée. Cette approche peut également raviver les angoisses puisque la personne se sent obligée de faire davantage d’efforts pour convaincre son entourage du bien-fondé de ses craintes.
Lui dire simplement qu’elle ne souffre pas d’une maladie ? L’ignorer ? Cela enfonce davantage le malade dans sa solitude.
L’écouter ? C’est la meilleure façon d’aider une personne hypocondriaque. On peut l’inciter à s’exprimer davantage sur son ressenti et ses émotions profondes lors des moments de tension. L’objectif est de l’aider à comprendre que même si ses symptômes sont bien réels, c’est son interprétation qui est erronée.
Comment soigner l’hypocondrie ?
Le traitement de l’hypocondrie est généralement difficile, car la personne concernée tend souvent à réfuter toute origine psychologique à ses symptômes — et donc à être prise en charge de manière adaptée. Parmi les différentes solutions possibles, les psychothérapies auprès d’un psychiatre ou d’un psychologue occupent une place de choix. On peut envisager les thérapies brèves, les thérapies familiales, les thérapies corporelles, en fonction de la situation du patient.
En complément de ces techniques, il existe également des alternatives médicamenteuses, qui peuvent apporter une aide. Les traitements les plus utilisés dans cette situation sont les antidépresseurs et les anxiolytiques. D’autres alternatives plus atypiques peuvent également s’envisager, telles que l’hypnose, la relaxation, la méditation ou la sophrologie. Elles peuvent aider la personne hypocondriaque à diminuer son niveau général d’anxiété, ses inquiétudes par rapport à ses symptômes, voire à atténuer ces derniers.
Enfin, l’hygiène de vie n’est pas à négliger : une alimentation équilibrée, un sommeil de qualité suffisante, savoir éviter les excès… Cela permet d’éviter une recrudescence de symptômes à l’origine de nouvelles angoisses.
Un risque de décès plus élevé ?
Une vaste étude suédoise a mis au jour un paradoxe concernant les personnes chez qui on a diagnostiqué une peur excessive des maladies graves : elles ont tendance à mourir plus tôt que les personnes qui ne sont pas hypervigilantes en matière de santé.
Les chercheurs ont constaté que les personnes souffrant d’hypocondrie ont un risque accru de mourir de causes naturelles ou non, en particulier de se suicider. Le stress chronique et son impact sur l’organisme pourraient expliquer en partie cette différence, écrivent les auteurs.
L’étude comble une lacune évidente dans la littérature, a estimé David Mataix-Cols, de l’Institut Karolinska en Suède, qui a dirigé les recherches.
Dans l’étude, le risque de suicide était quatre fois plus élevé chez les personnes qui ont reçu ce diagnostic.
Les chercheurs ont examiné 4100 personnes qui ont reçu un diagnostic d’hypocondrie et les ont comparées à 41 000 personnes similaires en termes d’âge, de sexe et de comté de résidence. Ils ont utilisé une mesure appelée années-personnes, qui tient compte du nombre de personnes et de la durée de leur suivi.
Le taux de mortalité global était plus élevé chez les personnes souffrant d’hypocondrie, soit 8.5 contre 5.5 pour 1000 années-personnes. Les personnes atteintes d’hypocondrie sont mortes plus jeunes que les autres, à un âge moyen de 70 ans contre 75 ans. Leur risque de décès par maladies circulatoires et respiratoires était plus élevé. Le cancer constituait une exception : le risque de décès était à peu près le même.
Source: Résidences Pelletier

Sarah Gendreau Simoneau
Passionnée par tout ce qui touche les médias, Sarah a effectué deux stages au sein du quotidien La Tribune comme journaliste durant son cursus scolaire, en plus d’y avoir œuvré en tant que pigiste durant plusieurs mois. Auparavant cheffe de pupitre pour la section Sports et bien-être du journal, et maintenant rédactrice en chef, elle est fière de mettre sa touche personnelle dans ce média de qualité de l’Université de Sherbrooke depuis mai 2021.
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