Par Laurence Poulin
C’est dans un certain contexte de climato-sceptisme venant surtout du nouvel élu chez nos voisins du Sud que s’est déroulé le 29e Colloque de l’AMEUS, l’Association de la Maitrise en environnement de l’Université de Sherbrooke. Retour et perspectives sur cette impressionnante initiative étudiante.
Ce sont 216 personnes qui ont répondus à l’invitation de ce Colloque sur les innovations durables dans les villes, le 24 février dernier. Cette initiative 100% étudiante est remarquable tant par sa pérennité à travers les années, mais aussi de part la qualité de son organisation et des conférenciers et conférencières invités. Durant toute la journée, les participants en majorité issus de la communauté étudiante, mais aussi de professionnels et élus de différents milieux, ont eu droit à différentes réflexions sur des initiatives afin de subvenir autrement à nos besoins vitaux.
Denyse Rémillard, directrice du Centre universitaire de formation en environnement et développement durable, ainsi qu’Alain Webster, vice-recteur au Développement durable ont ouvert le colloque, suivie de l’invité d’honneur, Lisette Maillé, mairesse d’Austin. Cette municipalité fut effectivement récipiendaire du Prix des collectivités durables 2016 de la Fédération canadienne des municipalités pour ses nombreuses initiatives et son Plan d’action pour un aménagement durable du territoire de cette municipalité rurale des Cantons-de-l’Est.
Écoquartiers et ruelles vertes
Se sont ensuite suivi simultanément les conférences d’Aline Berthe et de Nicolas Montpetit. Ce dernier, directeur du Regroupement des écoquartiers est venu partager les initiatives et réalisations de ce regroupement. Il s’agit en fait de la responsabilisation citoyenne passant par l’amélioration du milieu de vie des résidents en faisant la promotion de l’éco civisme. Une des plus grandes réalisations de ce groupe consiste au principe des ruelles vertes. À Montréal, là où le mouvement a débuté, on peut retrouver 317 ruelles vertes dans 15 des 19 arrondissements. Il est démontré qu’elles renforcent la capacité des citoyens, leur attachement à leur milieu et leur sentiment d’appartenance et de confiance entre voisins de quartier. Des espaces sains, conviviaux et sécuritaires en ressortent. Selon M. Montpetit, une ville comme Sherbrooke pourrait aisément se doter d’éco-quartier et que ce n’est pas une appellation protégée.
Les innovations durables dans les villes
C’est ensuite enchainé un panel diversifié et fort pertinent sur le thème des innovations durables dans les villes. C’est un public très réceptif, au regard allumé qui a pu entendre les réflexions de Claude Belleau, directeur général d’Estrie-Aide, François Gourdeau, directeur général d’UrbanÉco construction et d’Émilie Nollet, cofondatrice d’Écosystème Alimentaire Urbain (ÉAU). Une réflexion intéressante a été entre autre celle de M. Belleau sur le principe de l’innovation. Celui qui dirige l’OBL oeuvrant pour la deuxième vie de meubles, vêtements, électroménagers, etc. disait que pour lui, l’innovation c’est aussi d’avoir un regard différent sur une situation. C’est aussi de partir d’une contrainte environnementale, économiquement viable et socialement responsable. Pour lui, le réemploi est le moyen économique le plus rentable et qu’il faut capter la matière issu de notre société de consommation. Comme il l’a dit, on ne peut pas arrêter complètement de consommer, mais que l’on se doit de consommer différemment pour allonger le cycle de vie. Un concept ressorti de cette discution fut le principe du fast. Nos sociétés sont prises dans un roulement infini de fast-fashion, de fast-food, de fast-housing, etc. On consomme trop et on produit trop. Le réemploi permet de réduire cette consommation tout en encouragement les mécanismes locaux pour le faire.
L’organisation durable dans les villes
Le panel d’après-midi, composé d’André Bellavance, maire de Victoriaville, Dominique Boisvert, membre fondateur du Réseau québécois pour la simplicité volontaire et auteur de L’ABC de la simplicité volontaire, Fabienne Mathieu, président-directrice générale d’ÉCOgestion-solutions et Guillaume Rousseau, professeur adjointe à la Faculté de droit de l’UdeS ont discuté notamment des paliers décisionnel de gouvernement et des compétences relatives à l’environnement.
Selon eux, il y a urgence d’agir et même parfois, si ça doit se faire à contre courant de nos sociétés actuelles. Madame Mathieu relevait un point majeur tel que celui des contraintes trop grandes concernant les toits verts. Il s’agit pour elle d’un non-sens et qu’on se doit d’encourager la mixité d’usage dans nos villes. M. Rousseau, lui, mentionnait qu’on se doit d’exiger de nos législateurs une plus grande flexibilité législative afin que lois et règlements ne soient pas des barrières aux initiatives durables. M. Boisvert avançait une idée très pertinente sur la gratification différée. En effet, de nombreux élus vont préférer repousser des initiatives afin d’être réélu dans l’instant présent. Selon lui, il serait plus durable de penser au long terme et non pas qu’au présent et que ça prend du courage, de la vision au delà de la réélection. Mme Mathieu, a elle, parlé davantage de la problématique des banlieues. Selon elle, elles ont un potentiel incroyable, mais que l’on doit utiliser l’espace intelligemment, créer des espaces communs et encourager la mixité. En somme, le tissu social et l’éducation sont au cœur des initiatives durables dans les villes.
En somme ce 29e colloque étudiant fut une grande réussite d’autant plus qu’aucun papier n’a été utilisé pour rejoindre et inviter ces 216 personnes présentes. Les réseaux sociaux et le bouche à oreille sur le campus ont suffit pour réunir ceux qui désiraient en apprendre davantage sur les initiatives durables dans les villes. L’équipe organisatrice, composée de 26 bénévoles s’était donnée pour défi d’avoir le moins de déchets et d’impact environnemental possible. Ce fut atteint avec un total de 60 grammes de déchets et 3,01 tonnes de CO2, en respect de la norme de gestion responsable d’évènements BNQ 9700-253. En attendant la 30e édition, nous pouvons tous collectivement et individuellement contribuer à la durabilité de notre société par diverses initiatives tels que les principes de zéro-déchets ou encore par le réemploi et la consommation intelligente.
Crédit photo © Raphaël Brunier