Par Rémi Brosseau-Fortier
Le bulletin trimestriel d’Hydro-Québec est sans appel : les bénéfices de la société d’État ont diminué de 861 millions de $ relativement à la même période en 2023. Publié le 19 novembre dernier, ce rapport brosse un portrait préoccupant de la production hydroélectrique de la province, affectée par les faibles précipitations des derniers mois.
Au courant des neuf premiers mois de l’année 2024, les profits d’Hydro-Québec se sont élevés à 2 189 M$ (millions de $). À pareille période, l’année précédente, le bénéfice net de la société s’élevait à une somme de 3 050 M$, soit un écart de 861 M$.
Cette diminution marquée s’explique par une réduction des exportations d’hydroélectricité, la deuxième source de revenus d’Hydro-Québec. Les ventes d’électricité hors Québec s’élèvent à un total de 1184 M$ entre janvier et septembre 2024 contre 1961 M$ en 2023. Ainsi, des pertes de 777 M$ sont associées aux ventes en dehors du Québec. Néanmoins, le prix moyen obtenu par kilowattheure (kWh) exporté hors Québec demeure intéressant : 9.6 ¢ par kWh contre 6.4 ¢ sur les marchés locaux.
Une faible hydraulicité en cause
La direction d’Hydro-Québec pointe du doigt les faibles précipitations estivales et automnales depuis 2023. Cela s’ajoute aux faibles quantités de neige de l’hiver dernier qui ont réduit, elles aussi, les volumes hydriques alimentant les barrages.
Selon Maxime Aucoin, vice-président exécutif — Stratégie et finances, cette situation n’est pas surprenante : « nos résultats sont conformes à ce que nous avions anticipé ». Dans un communiqué de presse, ce dernier explique que la « stratégie de gestion prudente des stocks énergétiques est la bonne dans un contexte de précipitations inférieures à la normale ».
Effectivement, depuis janvier 2024, Hydro-Québec limite délibérément ses exportations d’hydroélectricité. L’objectif : optimiser l’utilisation des ressources afin de pleinement répondre aux besoins énergétiques du Québec.
Une augmentation des charges d’exploitation
En plus de devoir composer avec les impacts des changements climatiques, la société d’État a été confrontée à une croissance des frais d’exploitation pendant le troisième trimestre de 2024 (juin, juillet et septembre) : 337 M$ de plus qu’au deuxième trimestre.
Cette augmentation est attribuable à l’expansion des activités (197 M$) de même qu’à la réévaluation des coûts de démantèlement et de déclassement des installations nucléaires de la centrale Gentilly-2 (140 M$).
Ces hausses de coûts sont aussi attribuables à la mise en œuvre du Plan d’action 2035 – vers un Québec décarboné et prospère. Lancé en novembre 2023 par le président-directeur général d’Hydro-Québec, Michael Sabia, le projet prévoit des investissements de 155 à 185 milliards de $ d’ici 2035 afin d’accroître sa production et améliorer son efficacité.
S’inscrivant dans une perspective de décarbonation de l’économie québécoise, la visée de cet ambitieux projet est de répondre à la demande énergétique devant doubler d’ici 2050. Selon les estimations d’Hydro-Québec, d’ici moins de 30 ans, le réseau devra être en mesure de fournir de 150 à 200 kWh supplémentaires uniquement pour répondre à la demande d’électricité du Québec.
Malgré ces initiatives, l’avenir des surplus d’Hydro-Québec exportés à des prix intéressants aux États-Unis demeure incertain : est-ce que la société d’État parviendra à conserver cet avantage commercial ayant rapporté plus de 3.2 milliards de $ en 2023 ? Une chose est certaine : le Québec devra innover afin d’atteindre sa cible de carboneutralité d’ici 2050.
Source: Hydro-Québec