Par Pascale Léa Nadeau

Le 7 janvier dernier, Donald Trump, ancien président des États-Unis, qui entamera un second mandat historique le 20 janvier prochain, a de nouveau secoué la scène internationale en brandissant la menace d’annexer le Canada ou d’imposer des sanctions économiques massives. Ces déclarations, partagées par les médias, ont déclenché un débat sur les conséquences possibles de telles actions. Qu’adviendra-t-il pour la population étudiante?
Donald Trump a affirmé que le Canada ne respectait pas les intérêts commerciaux américains, qualifiant la politique canadienne d’« hostile » à l’économie des États-Unis. Selon lui, les échanges d’import-export seraient inégaux. Il a menacé d’augmenter drastiquement les tarifs douaniers en imposant 25% sur les importations du Canada.
Le futur président américain dit même vouloir user de sa « force économique » pour contraindre le Canada à plier. Plus inquiétant encore, il avance l’idée d’annexer le Canada comme 51e État américain. M. Trump a lancé cette idée d’annexion pour la première fois lors d’un souper avec notre premier ministre Justin Trudeau en novembre dernier.
Justin Trudeau a affirmé à plusieurs reprises que le Canada reste un pays souverain et qu’aucune forme d’annexion ne serait envisagée. Non seulement elle serait rejetée, mais elle constituerait une violation des principes fondamentaux de l’indépendance nationale.
Le gouvernement provincial, dirigé par François Legault, n’a pas directement abordé la question de l’annexion par les États-Unis. Cependant, il continue d’affirmer l’importance de la souveraineté du Québec, notamment lors de ses discours sur la défense des intérêts provinciaux, telle que la protection de la langue française, face aux pressions fédérales.
Le Québec a toujours été profondément attaché à son identité culturelle. L’annexion pourrait menacer la protection de la langue française, essentielle à sa distinction au sein du Canada. Ses protections pourraient être affaiblies, mettant en péril l’usage du français dans les écoles, dans la vie professionnelle et quotidienne.
Aux États-Unis, l’anglais est la langue dominante, et ni le bilinguisme ni la protection des langues minoritaires ne sont privilégiés. Contrairement au Canada, la structure juridique américaine, n’impose aucune obligation pour la préservation d’une langue régionale. Un tel changement viendrait défaire des décennies d’efforts menés pour préserver le français.
Mais dans le cas d’une annexion américaine, quels seraient les impacts sur le Québec?
Les impacts sur la communauté étudiante
Pour les personnes étudiantes, ces menaces pourraient se traduire par des impacts directs et tangibles. Si les sanctions économiques devaient être mises en place, l’augmentation des prix sur de nombreux produits importés serait inévitable. La hausse des coûts de la vie viendrait toucher une grande partie de la population étudiante déjà affectée par l’inflation. De plus, en cas d’annexion, la structure même du système éducatif pourrait être profondément modifiée.
Les frais de scolarité, actuellement plus faibles au Canada qu’aux États-Unis, pourraient augmenter drastiquement pour s’aligner avec ceux des universités américaines. Les frais de scolarité au Canada sont actuellement de 6 000 $ à 30 000 $ par an, en comparaison avec les États-Unis, où les frais universitaires grimpent de 20 000 $ à 60 000 $ par an ! Les programmes d’aide financière seraient remis en question. Des centaines d’étudiants risqueraient de ne plus être en mesure de poursuivre leurs études ou devraient s’endetter pour y arriver.
Une intégration forcée du système américain pourrait amener des questionnements sur la reconnaissance des diplômes.
Si le Canada devenait un état américain, cela modifierait la politique d’immigration et les opportunités pour les étudiants internationaux. En plus d’augmenter grandement les coûts de scolarité pour les étudiants non-résidents, ces derniers devraient demander des visas américains pour étudier.
Bien que le gouvernement canadien ait fermement rejeté l’idée d’une annexion, affirmant que « jamais, au grand jamais, le Canada ne fera partie des États-Unis », plusieurs incertitudes persistent. Pour les étudiants, les enjeux soulevés vont bien au-delà de l’économie ou de la politique. Ils touchent directement l’identité et l’avenir de ceux-ci.
De nouvelles opportunités
Mais d’un autre côté, l’annexion au système économique américain pourrait être bénéfique pour le Québec, notamment grâce à un accès direct à l’un des plus grands marchés du monde. Cela permettrait aux entreprises d’obtenir de meilleures opportunités de croissance et d’investissement. Cette collaboration éliminerait les tarifs d’importation-exportation et permettrait un échange plus efficace des ressources naturelles, comme l’eau et le bois. L’ouverture des frontières pourrait inciter des entreprises américaines à s’implanter au Québec, stimulant alors l’économie locale et créant de nouveaux emplois.
Pour les personnes étudiantes québécoises, s’intégrer aux États-Unis pourrait faciliter leur admission dans des universités prestigieuses américaines, telles que Harvard, MIT et Yale, et réduire les coûts pour les étudiants étrangers. Les institutions francophones comme l’Université de Sherbrooke pourraient être intéressantes pour les étudiants américains.
Dans un contexte d’élargissement d’un pays, la communauté étudiante pourrait bénéficier d’un plus grand bassin d’opportunités d’emploi dans des industries florissantes, comme la technologie, les finances ou la santé. Cette opportunité pourrait affecter le secteur des technologies vertes et les initiatives environnementales grâce aux ressources combinées.
L’annexion, vraiment possible?
L’histoire du Canada montre une résistance aux tentatives d’annexion américaine. L’idée que le Canada puisse être annexé par les États-Unis semble ainsi totalement irréaliste, et ce, pour plusieurs raisons.
D’abord, il y a les lois internationales. Selon les règles de l’ONU, on ne peut pas simplement « voler » un pays. L’annexion par la force est interdite et chaque nation a droit à son indépendance.
Les provinces canadiennes devraient donner leur consentement et il est difficile d’imaginer qu’elles seraient toutes d’accord. Il en est d’autant plus vrai pour le Québec et son attachement profond à sa culture et à sa langue. La Constitution canadienne, qui protège la souveraineté du pays, ne permet pas une telle transition.
Bien que les menaces formulées par le président américain concernant l’annexion du Canada paraissent préoccupantes, elles semblent hautement irréalistes d’un point de vue juridique, politique et historique. Les positions des gouvernements canadien et québécois, combinées aux lois internationales, rendent une annexion peu probable.
« C’est un impulsif, un compulsif imprévisible. Moi, je pense qu’il ne faut pas accorder tant que ça de sérieux à tout ce qu’il dit », explique le fondateur de la Chaire Raoul-Dandurand.
Crédits: WhiteHouse-Flickr