Par Audrey-Ann Lepage
Le jeudi 10 novembre dernier, la compagnie Mutaré a lancé deux nouveaux vêtements dont les profits seront versés à Arrimage Estrie, un organisme communautaire favorisant le développement d’une image corporelle positive et accompagnant les personnes souffrant de troubles alimentaires. Sous la forme d’un 5@7, l’événement fut donné dans le cadre de la campagne de sensibilisation « Le poids? Sans commentaires ». L’objectif : éliminer les propos sur le poids et l’apparence physique qui, même s’ils semblent banals a priori, peuvent avoir des effets dommageables chez la personne qui les reçoit.
La propriétaire et designer de Mutaré, Marie-Soleil Lemay, a d’abord pris la parole. Elle explique que ses deux hauts, tant au niveau de la forme que de l’imprimé, sont inspirés de la dysmorphophobie, un trouble de perception de l’image corporelle et physique. Les vêtements, disponibles en ligne sur son site internet, s’adressent aux femmes de tous âges et de toutes tailles. Ils sont spécialement conçus pour que celles qui les portent se sentent bien. Pour la designer, c’est une priorité : « Il n’y a pas de type de vêtement pour des types de taille. L’important, c’est que la personne se sente bien. Et non que ça lui fasse bien. » C’est donc le vêtement qui s’adapterait à la personne, et non l’inverse. Quant aux hommes, elle précise que c’est seulement pour des raisons pratiques que les vêtements créés s’adressent uniquement aux femmes, et que les hommes sont tout aussi touchés par le sujet et par conséquent tout autant les bienvenus à devenir membre de l’organisme Arrimage Estrie.
Véronique Grenier, modèle pour le projet, s’est aussi exprimée pour l’occasion. Elle précise les grandes lignes de la campagne de sensibilisation en expliquant que même lorsque les commentaires sur l’apparence sont faits de bonne foi et se veulent positifs, il est préférable de les éviter. Par exemple, en disant à une personne très mince ou souffrant de troubles alimentaires qu’elle a pris du poids et qu’elle semble plus en santé, elle risque de se remettre au régime plutôt que de continuer à bien s’alimenter. Mieux vaut éviter de se parler de notre corps ou de notre apparence en général. « De toute façon, on est beaucoup plus que ce qu’on a l’air, et on a beaucoup plus à se dire que ce dont on a l’air », dit-elle.
Un tel message porte à réflexion. Bien qu’on ne se sente pas concerné par les troubles alimentaires ou par le fait qu’on ne porte pas nous-mêmes de commentaires sur l’apparence physique, la question nous touche nécessairement. En effet, trop souvent, on prêtera peu d’attention aux propos pouvant venir des autres. Un exemple récent : au gala de l’ADISQ, une blague de l’animateur, apparemment accidentelle, laissa entendre que le maire Denis Coderre pesait 388 livres. La foule s’esclaffe. Peu de gens semblent avoir éprouvé un profond malaise. En 2016, les blagues et les commentaires sur le corps et l’apparence physique, c’est non. Le corps est sacré à tous : politicien, inconnu, ami et membre de la famille.
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