Inde-Pakistan : vers un point de non-retour ? 

Par Meg-Anne Lachance 

Les relations indo-pakistanaises sont à leur plus bas, après qu’une attaque ait fait 26 morts au Cachemire.

Expulsion de diplomates, fin des visas et fermetures des frontières, le conflit indo-pakistanais semble se rapprocher d’un point de non-retour, quelques jours après les frappes meurtrières du 22 avril. Alors que le Pakistan nie toutes responsabilités dans ces attaques, le gouvernement Modi a donné le feu vert mercredi à une « riposte » militaire. 

« L’Inde mène une guerre de basse intensité contre nous et s’ils veulent faire monter les enchères, nous sommes prêts. Pour protéger notre terre, nous ne plierons devant aucune pression internationale », a répondu le ministre pakistanais de la Défense Khawaja Asif. 

Son homologue indien Rajnath Singh avait menacé des représailles contre « ceux qui ont organisé ça en cachette », le 23 avril dernier. Bien qu’il n’ait pas nommé explicitement le Pakistan, il était clair que le message s’adressait à ce pays. 

Mardi, le 22 avril dernier, trois hommes armés ont ouvert le feu sur un groupe de touristes dans la région du Cachemire, faisant l’attaque la plus meurtrière contre des civils depuis les 25 dernières années. 

« Les combattants […] sont sortis de la forêt près d’une petite prairie ouverte et ont commencé à tirer », témoigne un homme en entrevue avec un journaliste de l’AFP. « Ils épargnaient clairement les femmes et continuaient à tirer sur les hommes, parfois un seul coup et parfois plusieurs balles, c’était comme une tempête », continue l’homme. 

Le premier ministre indien, Narendra Modi, qui était en Arabie saoudite pour un voyage diplomatique, a écourté son séjour pour retourner en Inde où il a dénoncé un « acte odieux » et a promis que les auteurs seraient « traduits en justice ». 

« Leur dessein maléfique n’aboutira jamais. Notre détermination à lutter contre le terrorisme est inébranlable et elle ne fera que se renforcer », peut-on lire dans son communiqué. 

Quelques jours suivants les incidents, l’Inde a annoncé suspendre le traité sur le partage de l’eau datant de 1962, afin « qu’aucune goutte n’arrive au Pakistan ». Avec 25 % de son PIB provenant des activités liées aux fleuves touchés par ce traité, le Pakistan pourrait se retrouver en situation extrêmement précaire. 

Vives réactions 

« Les États-Unis sont aux côtés de l’Inde pour lutter contre le terrorisme. Nous prions pour les âmes de ceux qui ont perdu la vie et pour le rétablissement des blessés. Le premier ministre Modi et l’incroyable peuple indien ont tout notre soutien et nos plus sincères condoléances », a réagi le président Trump sur Truth Social quelques heures après l’incident. 

Lors d’un appel avec le premier ministre Modi, Trump a réitéré son « plein soutien ». La veille des attaques, le vice-président J.D. Vance était en visite à New Delhi. 

La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a vivement condamné un « ignoble attentat terroriste », tandis que le ministre israélien des Affaires étrangères, Gideon Saar, a fustigé un « odieux attentat visant des touristes ». 

De son côté, les Nations Unies ont demandé « une résolution pacifique » et Antonio Guterres a tenu à dénoncer les actes contre les civils, rappelant que cette action est « inacceptable dans n’importe quelles circonstances ». 

« Cette attaque va faire revenir les relations entre les deux pays à leurs heures les plus sombres », a prévenu Praveen Donthi, de l’International Crisis Group (ICG) en entrevue avec l’AFP. 

« Nous exhortons les deux gouvernements […] à la retenue maximale et à s’assurer que la situation ne se détériore pas », a déclaré le porte-parole des Nations unies, Stéphane Dujarric. 

Plusieurs experts craignent une riposte militaire de la part de l’Inde, une crainte qui s’est accentuée avec les propos du premier ministre Modi, qui aurait confirmé à ses chefs d’état-major des forces armées qu’ils « avaient la liberté de décider des cibles, du moment et du mode de la riposte ». 

Le gouvernement pakistanais a également confirmé détenir de l’information allant dans ce sens. « Le Pakistan dispose de renseignements crédibles selon lesquels l’Inde a l’intention de lancer une frappe militaire dans les prochaines 24 à 36 heures, en utilisant l’incident de Pahalgam comme prétexte », a informé le ministre pakistanais de l’Information, Attaullah Tarar, mercredi dernier. 

« Toute agression entraînera une riposte décisive. L’Inde sera pleinement responsable de toute conséquence grave dans la région », a continué le ministre. 

Une région controversée 

Partagée à l’indépendance en 1947, la région du Cachemire est depuis une importante source de conflit entre l’Inde et le Pakistan. Les pays réclament tous deux la souveraineté du territoire. 

Des séparatistes luttent depuis 1989 pour l’indépendance du Cachemire ou sa fusion avec le Pakistan. Des dizaines de milliers de personnes ont déjà été victimes par les combats entre ces groupes et les troupes indiennes. 

Un bref conflit militaire avait inquiété la communauté internationale en 2019, mais la révocation de l’autonomie limitée de la région avait calmé le jeu. Depuis, environ 500 000 soldats sont déployés en permanence dans le Cachemire indien. 

Malgré les tensions, la région est de plus en plus prisée par les touristes indiens, avec environ 3,5 millions de visites en 2024. 

En 2023, l’Inde a organisé à Srinagar une réunion du G20 consacrée au tourisme, dans le but de symboliser le retour à la stabilité dans cette région longtemps marquée par une répression sévère après la suppression de son autonomie partielle. 

Parallèlement, de nombreux projets de complexes touristiques sont en développement, y compris dans des zones proches de la ligne de démarcation fortement militarisée qui sépare le Cachemire entre l’Inde et le Pakistan. 

Au moment d’écrire ces lignes, aucun conflit militaire n’a été déclaré, bien que les deux pays se préparent à y faire face. 


Crédit : Meg-Anne Lachance

Meg-Anne Lachance
Cheffe de pupitre SOCIÉTÉ at Journal Le Collectif  societe.lecollectif@usherbrooke.ca   More Posts

Étudiante en politique, Meg-Anne a toujours été intéressée par les enjeux internationaux, sociaux et environnementaux. Après avoir occupé le rôle de journaliste aux Jeux de la science politique, elle a eu la piqûre des communications. Guidées par un sentiment d’équité, elle s’efforce de donner une visibilité aux actualités oubliées. Féministe dans l’âme, vous pourrez certainement retrouver cette valeur dans certains de ses textes!

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