Développer des projets technologiques en respectant les ressources planétaires grâce à la démarche low-tech 

Par Dr. Olivia Bory Devisme, 3IT Energies, Université de Sherbrooke, Pr. Philippe Terrier et Lucie Richard-Duclos, Laboratoire d’ingénierie pour le développement durable, ÉTS Montréal 

Quoi de neuf pour le climat ? Cette semaine, on vous présente une méthode innovante permettant de réaliser efficacement vos projets, sans stress, tout en respectant les limites planétaires : voici la démarche low-tech. 

Non, on vous l’assure, ce n’est pas une blague. Il est tout à fait possible de réaliser de beaux projets et d’obtenir des résultats tout en protégeant notre belle planète. On vous explique tout cela en détails. 

L’impact environnemental des activités humaines 

Avant de commencer, petit coup de projecteur sur l’état des lieux du climat. Le dépassement de 6 sur 9 limites planétaires annoncé en 2023 par le Stockholm Resilience Center se fait déjà ressentir concrètement tous les ans : incendies à répétition, augmentation du nombre de réfugiés climatiques, disparition d’espèces protégées, fonte des glaciers… Face à ces éléments, les conclusions du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) sont formelles : il est primordial de réduire l’impact environnemental des activités humaines (industrie, agriculture, bâtiments, transports) pour assurer un avenir durable.  

Le dépassement de 6 sur 9 limites planétaires annoncé en 2023 par le Stockholm Resilience Center se fait déjà ressentir concrètement tous les ans. 

Cependant, comment allier sobriété et confort dans notre monde qui file à 100 à l’heure, où les technologies se développent à vitesse grand V et où la productivité prime sur l’impact environnemental et social ? 

Heureusement, tout est encore possible si nous apportons plus de conscience dans nos projets, qu’ils soient personnels, d’ordre publique, industriels ou académiques. En effet, n’est-ce pas François Rabelais qui disait déjà au 15e siècle « une science sans conscience n’est que ruine de l’âme » ?  

La démarche low-tech 

Pour répondre à cet enjeu, la démarche low-tech se distingue de l’ingénierie classique en choisissant la solution la plus adaptée à une problématique locale, en considérant l’impact économique, l’impact environnemental et l’impact social d’un projet sur un même pied d’égalité. 

Cette démarche, qui priorise ainsi l’utilité, l’accessibilité et la durabilité, permet de trouver des solutions innovantes, à la fois dans la sociosphère, en questionnant le besoin et en étudiant le comportement des usagers, dans la biosphère en ayant recours au biomimétisme, et enfin dans la technosphère. Ceci permet de ne pas se focaliser uniquement dans la technosphère pour résoudre une problématique et de limiter au maximum les effets rebonds. 

En résumé, cette approche ne consiste pas à développer uniquement des technologies low-tech et devenir anti high-tech ! Et à raison, car il serait difficile d’imaginer un hôpital sans appareils high-tech pour sauver des centaines de vies dans l’urgence. À contrario, une bouilloire connectée en Bluetooth est-elle vraiment nécessaire, compte tenu de l’épuisement des ressources planétaires ? 

Historiquement, l’approche low-tech est apparue dans les années 1970 et a depuis largement été popularisée par différents ouvrages, expérimentations et initiatives. Pour en apprendre plus, vous pouvez trouver en fin d’article une liste non exhaustive de plusieurs ressources utiles. 

Comment appliquer la démarche low-tech dans un projet ? 

Selon la méthodologie proposée par Pierre-Alain Lévêque, co-fondateur du Low-Tech Lab et auteur de la formation Base Low-Tech, cette démarche peut être résumée en trois piliers, comme présentés dans la figure ci-dessous. 

La démarche low-tech peut être résumée en trois piliers. 

Pilier 1 : Utiliser les 3 principes socles permet aux porteurs de projet d’expérimenter par eux-mêmes la solution proposée et de répondre à un besoin local. Ce pilier augmente la pertinence du projet. 

Pilier 2 : Comparer deux ou plusieurs solutions selon les 7 critères pour choisir permet de faire le meilleur choix pour favoriser l’utilité, l’accessibilité et la durabilité. 

Pilier 3 : Suivre la méthodologie du bon sens permet en particulier de vérifier l’atteinte des objectifs (économiques, environnementaux et sociaux) en réalisant un état des lieux avant et après la réalisation du projet. 

Pour vous donner un bon indicateur, une approche low-tech réussie permet de trouver le juste compromis entre niveau de confort (qui peut demander quelques concessions, en particulier si vous utilisez des énergies renouvelables intermittentes) et quantité de ressources (économiques et environnementales). 

À titre d’exemples concrets, voici quelques initiatives réalisées avec une approche low-tech :  

  • La boulangerie solaire NeoLoco de Arnaud Crétot, basée en Seine-Maritime, en France, cuit la moitié de sa production de pain grâce à un four solaire : le propriétaire adapte sa production en fonction de l’énergie solaire disponible. Cela lui permet de réduire sa consommation de bois tandis que la population locale accède à du pain de qualité ; 
  • Spirusud Antenna, la première ferme à spiruline de Madagascar qui produit à faibles coûts des protéines végétales riches en minéraux pour pallier la malnutrition locale ; 
  • L’outil RegenBox, développé par la société de Cédric Carles en France, qui permet de recharger des piles alcalines initialement à usage unique ; 
  • Le laboratoire LIDD (Laboratoire d’ingénierie pour le développement durable) à Montréal qui encadre présentement un projet de maîtrise visant à améliorer les conditions de vie des personnes itinérantes grâce à la conception de petits systèmes de chauffage (type rocket stoves). 

L’avantage majeur de cette démarche qui n’est pas assez mis en valeur est l’épanouissement obtenu. Celui-ci sera fortement lié aux liens sociaux qui auront été créés grâce à votre projet et l’autonomie apportée, qui fournira une montée en compétences aux utilisateurs. Le tout, dans la joie et la bonne humeur ! 

Sachant que les taux d’anxiété, de burn-out (ainsi que de bore-out !) et de dépression ne cessent d’augmenter chaque année, nous pouvons nous demander si la démarche low-tech ne serait pas un moyen optimal d’apporter un peu de paix à l’environnement mais aussi… à notre santé mentale ? 

Liste des ressources pour creuser le sujet : 

  • L’Âge des low-tech, de Philippe Bihouix ; 
  • Ma biosphère : Vivre autonome grâce aux low-tech, de Corentin de Chatelperron ; 
  • LOW-TECH, repenser nos technologies pour un monde durable, de Clément Chabot et Pierre-Alain Lévêque ; 
  • Le village des low-tech par VITO, Victor Locuratolo, Guillaume Guimbretière, Romane Quintin ; 
  • Le forum LowTRE créé par Sacha Hodencq pour intégrer la low-tech dans l’enseignement ; 
  • L’infographie Low-Tech : Assurer durablement l’essentiel pour tous, d’Arthur Keller et Émilien Bournigal. 

Source : Gouvernement République Française et Olivia Bory Devisme

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