Stéphane Fallu s’assume pleinement dans un spectacle intime et hilarant 

Par Frédérique Maysenhoelder 

Stéphane Fallu était de passage au Centre culturel de l’Université de Sherbrooke le 13 juin dernier afin de livrer un spectacle absurde et à la fois touchant.

Le vendredi 13 juin dernier, l’humoriste Stéphane Fallu a présenté son spectacle Assumé à la Petite Salle du Centre culturel de l’Université de Sherbrooke. Devant une salle comble, il a livré une performance personnelle et authentique, mêlant confidences, humour absurde et anecdotes de vie. À 55 ans, Fallu propose un stand-up lucide, sans filtre, où il explore les multiples facettes de son identité. 

Dès les premières minutes, il donne le ton avec une entrée freestyle façon rap, suscitant les rires de la foule. Cette approche décalée traverse tout le spectacle, où se succèdent des propos francs sur le vieillissement, la sexualité, la paternité, la consommation, ou encore la thérapie. « J’ai commencé à consulter… j’adore aller voir mon psychologue », lance-t-il en toute simplicité. 

L’humour comme vecteur d’authenticité 

Stéphane Fallu aborde avec autodérision sa propre fragilité : « J’assume que je suis soupe au lait », dit-il en riant, avant d’ajouter : « J’assume que j’ai déjà été cocu… je l’ai su 20 ans plus tard. » À travers des exemples de la vie quotidienne, il tourne en dérision les absurdités modernes. Dans un segment remarqué, il plaisante à propos de Ricardo, « tellement parfait qu’il doit être bon au lit ». Il évoque aussi une virée à l’épicerie au cours de laquelle il a dépensé « 146 $ pour sept livres de jambon ». 

Mais derrière les rires, le propos est souvent chargé d’émotion. Il revient sur son enfance marquée par la précarité : « Jusqu’à l’âge de quatre ans, j’ai vécu avec ma famille biologique, mais de la maternelle à la troisième année, j’ai fait cinq familles d’accueil. […] Je voulais juste être le plus normal possible. » Il raconte également avoir changé de nom à l’âge de sept ans et demi : « Avant, je m’appelais Stéphane Dagenais. » 

Un regard lucide sur le passé 

L’humoriste confie avoir longtemps ressenti de la honte par rapport à son milieu d’origine. « Avant, j’avais honte de mon passé. Puis, une entrevue avec Marie-Claude Barrette a été un moment charnière. Je pouvais enfin mettre des mots sur un mal que j’avais à l’intérieur de moi. » Cette prise de parole publique a eu un effet bouleversant : « J’ai reçu des messages d’artistes, de politiciens, de sportifs qui avaient eux aussi vécu la vie en famille d’accueil. J’ai vu l’impact que ça avait. » 

Depuis, Fallu s’investit activement auprès des jeunes en difficulté. Il a notamment fondé la Maison Stéphane Fallu à Chambly, qui accueille des jeunes adultes en transition après la DPJ. « À 18 ans, ces jeunes se retrouvent devant rien. Moi, j’étais entouré de parents aimants et j’ai trouvé ça rough. Imagine quand tu viens d’une famille dysfonctionnelle ou que tu es aux prises avec des problèmes de toxicomanie, de violence ou de santé mentale. » 

Une carrière à maturité 

Diplômé de l’École nationale de l’humour en 1994, après des études en soins infirmiers, Stéphane Fallu s’est taillé une place de choix dans le paysage humoristique québécois avec des spectacles comme Bon deuxième et Pus d’signal. Avec Assumé, il atteint un sommet de maturité artistique, livrant un contenu plus introspectif et personnel que jamais. 

Il aborde même des sujets tabous avec humour, comme les fantasmes dans le couple ou la fluidité de genre. « C’est important de continuer de fantasmer même quand t’es en couple », dit-il en parlant de son hygiéniste dentaire « plein de botox ». À un autre moment, il admet avoir fait de la microdose de mushrooms pour gravir une montagne avec sa conjointe. 

L’acceptation de soi comme fil conducteur 

Vers la fin du spectacle, Fallu partage un regard plus sombre sur sa santé mentale : « Dans ma tête, je vois constamment le bouton “autodestruction”. Je m’efforce de ne pas le nourrir, mais c’est beaucoup de travail. » Il insiste sur l’importance de chercher de l’aide et de se choisir : « Il ne faut pas avoir peur d’aller chercher de l’aide. […] Je vis mes émotions à fond. » 

Père de deux enfants, engagé dans sa communauté et actif à la radio (il coanime Les lève-tôt sur Rythme FM), Stéphane Fallu semble avoir trouvé un équilibre entre humour, vulnérabilité et engagement social. « Je suis un épicurien, j’aime bien manger », conclut-il avec simplicité, fidèle à l’image qu’il projette sur scène : celle d’un homme qui assume pleinement qui il est. 

En guise de mot de la fin, il confie ce qu’il dirait à l’enfant qu’il a été : « Je dirais au petit gars de 10 ans en famille d’accueil : “C’est pas de ta faute…” ». 


Source : Espace Théâtre

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