Congédiée à cause de ses prothèses d’ongles, qu’en est-il du droit ? 

Par Jeanne Gagné-Bourassa et Mia St-Sauveur du programme pro bono 

Congédiée à cause de la longueur de ses prothèses d’ongles, s’agit-il de discrimination ? 

Est-il légal de limiter la longueur des ongles dans un milieu de travail, ou s’agit-il de discrimination ? Cette question est abordée dans la décision Carneiro c. Lebel, 2024 QCCQ 1340. 

Jade Carneiro travaillait depuis novembre 2020 pour Le centre Vu Lebel & Des Roches inc., un centre d’optométrie, en tant que conseillère des ventes. Dès décembre 2020, le Code de l’employé fut modifié pour limiter la longueur des ongles à 5 millimètres. La défenderesse justifiait cette décision par des raisons d’hygiène et de propagation des virus. La demanderesse refusait de se conformer à cette exigence invoquant que le règlement était discriminatoire. Le 8 mai 2021, la demanderesse fut congédiée pour cause d’insubordination et non-respect du Code de l’employé. Une audience a eu lieu le 1er mars 2024 devant la Cour du Québec, division des petites créances, où la demanderesse réclamait à la défenderesse la somme de 5 900 $ en dommages pour son congédiement. Celle-ci prétendait que son congédiement était discriminatoire en vertu de la Charte des droits et libertés de la personne. Le Tribunal a rejeté la demande. Cette décision soulève l’importance de comprendre les limites des droits fondamentaux des employés dans leur milieu de travail. 

Les droits des employés 

Plusieurs lois québécoises, dont la Charte, abordent les droits des employés. La Charte s’applique à plusieurs sphères de la société québécoise, y compris les relations de travail et sert notamment, à interdire la discrimination lors du renvoi d’une personne. Les droits garantis par la Charte ne peuvent être ignorés par les employeurs ni par les employés puisqu’ils rendent invalides tous les règlements et les gestes allant à l’encontre de ces droits. Dans la décision précitée, la demanderesse alléguait que la limitation de la longueur des ongles violait le droit à la liberté d’expression et le droit à la vie privée, respectivement prévus aux articles 3 et 5 de la Charte. Est-ce le cas ? 

Les limites des droits fondamentaux 

Les droits fondamentaux, même s’ils sont très importants, ne sont pas absolus et peuvent être limités. Par exemple, un employeur peut instaurer un règlement violant les droits fondamentaux si cette atteinte est justifiée. En d’autres termes, si l’employeur a un but légitime et raisonnable pour imposer ce règlement et que la manière dont il le met en place est proportionnée aux bénéfices qu’il apporte, alors ce règlement sera considéré comme légitime malgré l’atteinte aux droits fondamentaux. En l’espèce, la défenderesse n’a pas eu besoin de justifier l’atteinte à un droit fondamental, car le Tribunal a déterminé que la limitation de la longueur des ongles ne constituait pas une atteinte à la liberté d’expression ni une atteinte au droit à la vie privée. La demanderesse ne s’est donc pas vu octroyer la somme qu’elle réclamait, mais a plutôt dû débourser la somme de 195 $ pour le timbre judiciaire. 


Source : Éducaloi

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