À la recherche de l’Histoire… 

Texte d’opinion par Félix Boulanger-Martin 

Le capitole de Californie à Sacramento. 

Il y a de ces gens qui planifient leurs vacances et leurs voyages en fonction de lieux historiques dignes d’intérêt. Je suis de ce nombre. Depuis mon plus jeune âge, je rêve de visiter villes et monuments qui ont fait l’Histoire avec un grand H et de comprendre ce que ça fait, au quotidien, de vivre et de côtoyer des endroits célèbres.  

Ayant grandi à Sherbrooke, où ne s’est pratiquement jamais passé aucun événement important, même à l’échelle québécoise ou canadienne, c’est ailleurs que j’ai trouvé l’Histoire.  

D’abord en Europe, précisément à Berlin, ville au passé si mouvementé. J’y ai mis les pieds pour la première fois en 2009. Ça faisait vingt ans que le mur était tombé. Il y avait toujours des pans conservés çà et là, mais la fameuse cicatrice, rappelée par une lignée de briques au sol, ne semblait guère visible. Comme si elle n’avait jamais existé.  

Maintenant, on passe de Tiergarten à l’ouest à Unter den Linden à l’est, en marchant sous la porte de Brandebourg, sans jamais réaliser que, durant près de trente ans, un no man’s land séparait ces deux lieux parmi les plus connus de la capitale allemande. Idem sur la Bebelplatz. Que reste-t-il des autodafés organisés par les nazis après leur accession au pouvoir dans les années 1930 ? Rien.  

Même en y allant de soir, on ne peut ressentir la terreur qui devait régner chez les témoins de la scène qui voulaient s’y opposer, mais ne le pouvaient pas. Le temps passe, les lieux célèbres, pour de bonnes ou de mauvaises raisons, finissent plus ou moins par disparaître des mémoires. 

Cet été, je me suis entre autres rendu en Australie. Excepté les personnes qui y étaient nées, guère de gens de ma génération connaissait le dismissal du premier ministre Gough Whitlam le 11 novembre 1975 à Canberra, où la condamnation à tort d’une mère pour le meurtre de son bébé au camping d’Ayers Rock, aujourd’hui Uluru, dans les années 1980. Pour les plus vieux, ces deux faits d’actualité n’étaient plus que de vagues souvenirs relégués aux oubliettes.  

Une journée comme les autres 

Lors de ma visite au capitole de Californie, à Sacramento, quelques semaines plus tard, j’ai demandé à une guide si des gens lui parlaient parfois du 2 mai 1967, journée à laquelle des membres des Blacks Panthers étaient entrés dans l’édifice pour protester contre l’arrivée d’une nouvelle loi. La dame m’a confié que c’était un événement comme un autre qui faisait partie du quotidien de son lieu de travail. En d’autres mots, que l’histoire s’écrit au jour le jour sans s’arrêter à des dates particulières, même si la société dans son ensemble en sélectionne certaines au détriment de d’autres.  

Dans les prochains mois ou les prochaines années, je souhaite me rendre dans le sud des États-Unis, en particulier en Alabama, ainsi qu’à Chypre, deux lieux également riches en histoire au XXe siècle. Je suis maintenant suffisamment vieux et j’ai suffisamment voyagé pour comprendre qu’il n’est pas vraiment possible d’aller à la rencontre de l’Histoire, même en mêlant nos pas à ceux des actrices et des acteurs qui l’ont faite. Néanmoins, mon intérêt pour le passé collectif des sociétés humaines demeurera toujours aussi vif. 


Crédits: Félix Boulanger-Martin

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