L’estuaire du Saint-Laurent est en pleine suffocation

Par Roxanne Bisson

Le taux d’oxygène dans les eaux profondes du Saint-Laurent poursuit sa chute drastique. Déjà à un niveau alarmant, cette nouvelle baisse menace la pérennité de plusieurs espèces habitant l’estuaire.

Selon les dernières recherches menées par le navire de recherche Corrolis 2 et rapportées par Le Devoir, les concentrations d’oxygène contenues dans l’estuaire du fleuve ont chuté de moitié depuis 2018. Désormais à moins de 10 %, le bas niveau d’oxygène met en danger la survie de l’écosystème.

De graves conséquences sur la vie marine

Les eaux profondes ont dépassé le niveau de l’hypoxie sévère, ce qui signifie que certaines espèces sont forcées de fuir par manque d’oxygène. Entre autres, ce serait le cas de la morue et du loup atlantique, rapporte la biologiste Marjolaine Blais à Radio-Canada.

Ce phénomène occasionne d’autres défis pour la survie de la faune marine. Celles-ci fuyant les eaux trop pauvres en oxygène, elles ont un espace de plus en plus restreint. Ces circonstances peuvent augmenter la compétitivité entre espèces, qui sont forcées de se côtoyer de près.

Ce contexte difficile pour les animaux marins entraîne une diminution de la biodiversité marine et une baisse du taux de croissance des poissons. Cela peut affecter le rendement des pêcheries.

À ce stade, les chercheurs craignent que l’on atteigne le niveau de l’anoxie : des eaux sans aucun oxygène. Alfonso Mucci de l’Université McGill a confié ses inquiétudes au journal Le Devoir. Une telle situation entraînerait la production de sulfure et de métaux lourds, des éléments toxiques. Cela pourrait signifier la disparition de la faune de l’estuaire maritime.

Changements climatiques et changements météorologiques

Un ensemble d’éléments expliquent la diminution du niveau d’oxygène dans les eaux. Selon Mme Blais, le phénomène est attribuable au réchauffement du fleuve Saint-Laurent. Ce dernier est causé en partie par l’eau chaude provenant du détroit de Cabot et du Plateau néo-écossais. Les changements climatiques ont aussi entraîné une baisse en apport du courant du Labrador. Ses eaux, froides et contenant une forte concentration d’oxygène, sont remplacées par des courants ayant un taux d’oxygène plus bas. Des situations similaires se produisent ailleurs sur la planète. Le golfe du Mexique, par exemple, est aussi touché par des chutes du niveau d’oxygène.

Les conditions météorologiques fluctuantes expliquent aussi l’hypoxie. Les tempêtes, la hausse des inondations et la diminution des glaces entraînent une présence accrue de matières organiques dans les eaux du fleuve. Des bactéries viennent alors dégrader ces matières. Comme ce sont des organismes vivants, elles consomment de l’oxygène.


Crédit photo @ Richard Sagredo

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