Je ne deviendrai jamais comptable

Par Marc-André Lafrance

Cotisations étudiantes, prêts étudiants, CELI, REEE et autres PAPSC (patentes administratives pas super claires), où va notre argent ? Être étudiant, c’est un peu comme être une entreprise semi bien gérée : on a des actifs (argent, meuble, nintendo 64 et quelques points metro), du passif (prêt étudiant, dette à « papa-maman ») et une expérience pas très pertinente en gestion de fonds.

Au secondaire, c’était facile. Nos dépenses consistaient pas mal en collations et en billets de cinéma. Mais à l’université, tu commences à prendre des habitudes, il y a un rythme de sorties imposé que tu dois suivre si tu veux avoir une vie sociale pour les trois prochaines années. Y’a jamais eu une bonne histoire qui a commencé par : « Il était une fois, je pouvais pas sortir parce que je devais économiser pour une prise à MacBook ». On développe un rythme de vie dans lequel les loisirs grugent une grosse part de notre budget.

Et tout ça transparait dans notre vie quotidienne. On commence à juger nos dépenses en fonction de la bière qu’on pourrait acheter : « ouin, les Twizzlers sont en spécial à 4,95$ pour le format familial, mais avec cet argent-là, je peux me payer deux bières au 4@7 » ou encore « soit je prends une caisse de Coors Light et un paquet de pizza pochette ou je prends une caisse de Stella Artois ». Tu commences à compter ton budget en bières comme avant tu comptais ton argent en billets de cinéma. Des dilemmes classiques entre deux faux besoins. En fait, quand t’es étudiant, tes goûts sont principalement définis par ta capacité à faire des compromis. T’aimes pas tant les raviolis, mais ce sera toujours moins cher que la terrine fancy que tu mettais sur tes toasts quand t’habitais chez tes parents.

Des fois, j’aimerais bien pouvoir gérer mes avoirs comme si je participais à l’émission Le Banquier : au bout de deux épisodes où j’ai réussi à ouvrir la valise de l’appartement décent et celle du char avec une prise pour brancher mon iPod, j’ai finalement une offre du Banquier. Il m’offre un prêt étudiant remboursable après mes études ainsi qu’une carte de crédit avec remise chez Bureau en Gros. Julie et moi, on hésite. L’offre est attirante, mais en même temps, peut-être que ma valise contient la fameuse job de busboy au resto Mia Pasta ou encore la bourse d’engagement étudiant pour la fois où j’ai planté un arbre au cégep.

Je refuse l’offre. Je vis dangereusement. Julie ca-pote. Le jeu continue et je joue de malchance : j’ai ouvert la job au Mia Pasta et il ne reste plus que deux valises, dont la mienne. Soit j’ouvre la bourse étudiante, soit j’ouvre la job comme moniteur de camp de jour. Le banquier va me laver.

« Il t’offre un prêt étudiant moindre sans carte de crédit », me dit l’animatrice. C’était sûr. Je vais le prendre, c’est pas mal ma meilleure option. Prendre des décisions financières à notre âge, c’est faire des choix parmi plusieurs choses qui se ressemblent, et une fois la décision prise, les autres disparaissent. Tu veux un beau char, mais tu ne pourras plus meubler ton appart avec un bureau…

Alors qu’il m’amène mon chèque géant (comme il devrait toujours faire au Banquier), le décor se transforme et je suis rendu sur le plateau de « qui veut sa part de mon chèque », un jeu pas mal moins divertissant, en tout cas pas pour moi.

Le concept est simple : je me retrouve au milieu de plusieurs participants qui veulent tous une partie de mon chèque. Parmi les participants, on retrouve : mon recteur qui veut mes frais de scolarité, mon représentant d’asso qui veut mes cotisations, mon proprio qui veut mon loyer, mon ami de pool à qui je dois 20$, ma blonde, mon coloc, mon caissier chez IGA, mon équipe de hockey… Il me reste probablement autour de 5$, mais je suis chanceux, les Twizzlers sont en spécial.

 

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