Cocinar el cambio : cuisiner le changement

Par Judith Doré Morin

«Ce matin, j’ai vu pour la première fois ma mère et ma sœur utiliser le four solaire reçu l’année précédente. Après trois heures de cuisson, en y ajoutant une touche de cannelle et de sirop d’érable, le plat concocté goûte à la fois le printemps et l’automne. Elles rient de mon analogie. Pourtant, c’est le seul mot qui me vient à l’esprit pour décrire ces pommes attendries par la seule radiation solaire.»

Poulet, truite, œufs ou gâteaux mis dans le four solaire avant midi. En trois ou quatre heures, le tout est cuit. Aucun gaz n’est requis. Avec l’énergie solaire, tout est permis. Pourtant, malgré sa simplicité, l’utilisation de cette technologie n’est pas garantie. En effet, différents facteurs influencent son intégration au mode de vie. Avant toute chose, cela doit être compris.

Une technologie autonome, ou presque

Le four solaire consiste en une boîte en bois peinte en noir à l’extérieur et en blanc à l’intérieur. La face supérieure est occupée par une vitre autour de laquelle sont disposés des panneaux d’aluminium. Ceux-ci orientent la radiation solaire vers le centre de la boîte où cuisent les aliments déposés sur un balancier. Avant chaque utilisation, Il convient de placer le four face au soleil et de régler son angle selon le mois grâce au système d’élévation intégré à la structure de base de l’appareil.

Dans le cadre de mon stage, j’ai réalisé des entrevues et des observations afin d’évaluer la durabilité des technologies solaires développées antérieurement dans la communauté de San Melchor. Dans le cas des fours solaires, construits l’an dernier, la simplicité d’utilisation et l’état des matériaux utilisés constituent des facteurs favorisant, pour le moment, l’emploi de la technologie. Seuls deux des sept fours étudiés présentent des défauts. Les familles ignorent toutefois comment y remédier, et ce, malgré la courte formation et le manuel d’instruction reçus initialement.

Simple mais complexe

Changer un comportement, aussi simple que cela puisse paraître, constitue un processus complexe. Durant mon séjour à Ayacucho, j’ai remarqué que les fours solaires étaient très peu utilisés par les femmes de la communauté. Les entrevues ainsi que mes observations m’ont permis d’identifier plusieurs facteurs pouvant freiner l’adoption de cette technologie. Ainsi, il ne suffit donc pas de donner accès à une technologie pour assurer son utilisation à long terme.

Le principal frein à l’intégration du four solaire au mode de vie des membres de la communauté consiste en sa dépendance aux conditions météorologiques. Il est en effet impossible de cuire des aliments dans l’appareil lorsque le ciel est nuageux, ce qui est de plus en plus fréquent avec les changements climatiques, et lorsqu’il fait nuit, soit entre 18h et 6h.

Malgré les avantages qu’il présente pour l’environnement et pour la santé de ses bénéficiaires, le four solaire ne forme donc pas une alternative optimale à la cuisinière au gaz, ni au charbon, dans le contexte urbain d’Ayacucho. De ce fait, l’utilisation de biogaz, issu de la fermentation de la matière organique dans un milieu anoxique et dont la combustion s’inscrit dans le cycle naturel du carbone, forme une autre option durable à considérer pour cette communauté.


Crédit Photo @ Judith Doré Morin

Website | + posts

Laisser un commentaire

Votre adresse courriel ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Scroll to Top