Un petit voyage en Acadie, ça vous dit ? 

Par Elizabeth Gagné 

Mémorial Acadien à Moncton au N.B. commémorant le Grand dérangement de 1755.

Depuis que je suis née, ma famille et moi-même allons visiter mes grands-parents et ma famille au Nouveau-Brunswick. J’en garde de précieux souvenirs qui me rappelle la chance que j’ai d’avoir respiré l’air marin aussi souvent. Si vous n’avez pas encore décidé d’une destination vacances cet été, sachez que le mois d’août est le parfait moment pour visiter le Nouveau-Brunswick, mais plus particulièrement l’Acadie.  

L’Acadie est une nation qui regroupe des milliers de gens qui parlent français qu’on appelle les Acadiens. On les retrouve majoritairement au Nouveau-Brunswick, en Nouvelle-Écosse, sur l’Île-du-Prince-Édouard et au Québec, mais également dans le Maine et en Louisiane aux États-Unis.  

Un peu d’histoire  

Historiquement parlant, l’Acadie est une ancienne province de la Nouvelle-France fondée en 1604 sur le territoire des Micmacs. Au cours de la colonisation française, plusieurs mariages ont lieu entre les descendants des premiers colons et les Micmacs. Résultat, une importante partie de la population acadienne est métisse.  

Les Acadiens étaient reconnus pour leur talent d’agriculteurs et ont développé une technique unique en Amérique du Nord qui constituait à assécher des marais par des levées munies d’aboiteaux. Il est possible de voir des vestiges d’aboiteau encore aujourd’hui. L’histoire de l’Acadie s’est complexifiée par des guerres européennes où le territoire passe des mains des Français aux Anglais à maintes reprises.  

Un aboiteau à Beaumont Memramcook au N.B., 1984.  

Avec le Traité d’Utrecht, l’Acadie tombe pour la dernière fois aux mains des Britanniques. Sur le site de l’Encyclopédie canadienne, on peut y lire que la cohabitation est difficile entre 1713 et 1763. Au début, les Acadiens, attachés à leur terre, ne s’empressent pas de partir. Ces derniers produisent des ressources agricoles vitales à la garnison britannique. Leur présence est donc tolérée.  

La population acadienne augmente rapidement durant ces années ainsi que les tensions entre les Britanniques et les Français. Les Britanniques craignent le ralliement des Acadiens, plus nombreux que jamais, à celui des Français. Ils s’empressent donc de coloniser les terres et tordent la main aux Acadiens pour qu’ils promettent allégeance au Roi. Ces derniers, ayant toujours été neutres, se retrouvent dans une position impossible. Ils acceptent finalement à contrecœur la promesse d’allégeance, mais les autorités britanniques, insatisfaites, enclenchent leur déportation en 1755.  

Selon l’Encyclopédie canadienne, les trois quarts de la population ont été déportés par bateaux dans des conditions précaires. Les autres ont fui dans les bois aux périls de leur vie. Impossible d’estimer le nombre d’Acadiens qui ont perdu leur vie durant cette tragédie. Malgré cet évènement sombre, la culture acadienne subsiste toujours.  

La fête des Acadiens ! 

La fête nationale de l’Acadie, qui a lieu le 15 août, est l’occasion de souligner la culture et la vitalité des Acadiens partout en Amérique du Nord. Aux quatre coins du Nouveau-Brunswick, les couleurs du drapeau acadien, bleu, blanc, rouge et de l’étoile jaune, symbole de dévotion à la vierge Marie, envahiront les municipalités. Plusieurs festivités auront lieu durant cette période, notamment le Festival Acadien de Caraquet qui a lieu du 4 au 15 août et le Festival Acadie Rock qui se déroulera du 13 au 18 août à Moncton. Si vous êtes dans le coin durant ces dates, vous aurez peut-être la chance d’assister à une tradition typiquement acadienne appelée le Grand Tintamarre. Il s’agit d’une cérémonie où l’on marche à travers sa communauté en faisant le plus de bruit possible à l’aide d’objets bruyants afin de rappeler aux autres la présence des Acadiens. Dans certains villages, le Tintamarre se fait à 17 h 55 en mémoire du grand dérangement.  

Un peu de Culture  

Bien sûr, vous ne pouvez pas aller aux Nouveau-Brunswick sans déguster les fruits de mer. Pour les plus téméraires d’entre vous, n’hésitez pas à trouver une cantine qui sert de la poutine râpée, un plat typiquement acadien qui n’a absolument rien à voir avec de la poutine. Il s’agit d’une boule de patate bouillie de couleur grisâtre, à la texture gélatineuse, farcie de viande salée. Ce n’est pas pour tout le monde, mais je me rappelle de voir mon grand-père manger ce mets en y ajoutant de la cassonade ou de la mélasse. D’autres mets typiquement acadiens, qui sont peut-être plus alléchants tels que le Fricot ou encore la Micho, valent la peine d’être essayés.  

Lorsque je dis que ma famille vient du Nouveau-Brunswick, on me demande souvent si les gens parlent vraiment avec l’accent. À cela, je réponds que ça dépend des régions, mais que selon la légende, l’accent trouverait son origine dans la résistance acadienne. On raconte que, forcés de promettre allégeance au roi britannique, les Acadiens auraient enlevé les « r » de leur vocabulaire en guise de protestation. La sociolinguiste Annette Boudreau réfère quant à elle au mouvement des vagues qui guide la prononciation des mots. La situation linguistique au Nouveau-Brunswick vaut la peine de s’y intéresser, car elle est très complexe et très riche à la fois.  

Le Nouveau-Brunswick est reconnu comme étant une province bilingue, mais la protection du français est un enjeu complexe. Pour mieux en apprendre sur cette situation, je vous invite à écouter le documentaire L’Acadie, l’Acadie?!?.  Il y a également, le « chiac », un joual franglais et de structure archaïque qui remonte, selon Annette Boudreau à Aujourd’hui l’histoire, au 19e siècle. La question du « chiac » est très ambivalente chez les Acadiens en raison de la volonté de parler français. On a également des expressions acadiennes qui viennent pigmenter davantage cette complexité linguistique telles que : tignasse (chevelure), sus (chez), machequouère (chat sauvage), haler (tirer), fayot (fève, haricot), amanché (arrangé), etc. Plusieurs documentaires qui valent la peine d’être écoutés font état de la langue et de l’histoire acadienne sur le site de l’ONF.  

J’espère vous avoir fait voyager dans mon coin de pays, l’Acadie, qui, j’en suis sûre, vous charmera un jour.  


Source: Wikimedia Commons

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