Le sexe au cinéma : des perles sous la vulgarité et l’inutilité?

Par Alexandre Blanchard

Dans le cadre de cette édition spéciale du Collectif, il m’a été proposé de dresser un portrait cinématographique d’œuvres qui possèdent le sexe comme trame de fond commune. Un examen rapide dans ma collection personnelle ainsi que dans ma mémoire (et un peu sur Internet, oui, je l’avoue) m’a permis de constater un fait important : il n’y a pas beaucoup de films qui traitent du sujet. Si plusieurs y font allusion ou contiennent des scènes à caractère explicite (ou implicite) pour le simple plaisir de la chose, très peu plongent dans le sujet pour en faire leur thème central et en extirper les problèmes potentiels. Pourtant, le cinéma s’avère un média puissant et accessible à tous et, parfois, il peut même faire office d’outil fantastique pour montrer une problématique et ses enjeux. Cela dit, il faut bien le faire et ne pas construire des scènes de sexe pour la simple vulgarité de la chose.

Voici donc une liste de cinq œuvres qui, selon moi, abordent la thématique avec une sensibilité particulière. Ce ne sont pas nécessairement les meilleures et gardez toujours en tête que je n’ai pas tout vu (malheureusement). J’ai toutefois l’impression, sans prétention bien sûr, d’avoir choisi des films dont le thème central est le sexe, évidemment, mais avec des variantes différentes qui explorent chacun un ou plusieurs aspects particuliers.

Shame» – Steve McQueen (2011) : Shame est une histoire d’obsession. Cette œuvre en dit si peu, mais s’avère à la fois très évocatrice et lourde de sens. Brandon (Michael Fassbender) a une dépendance au sexe. Tellement que les modèles d’un site de webcam l’appellent par son prénom. C’est lorsque sa sœur (Carey Mulligan) aménage chez lui qu’est dévoilée l’ampleur du trouble qui le ronge : sa dépendance ravage tout, affectant au passage pratiquement tous les aspects de sa vie. Shame se pose comme une œuvre qui vient dénoncer un problème ou, du moins, qui vient le révéler au grand jour. Je dois admettre que le long-métrage m’a laissé assez troublé.

Nymphomaniac Vol. 1 – Lars Von Trier (2013) : Contrairement à ce que son titre laisse présager (ou pas, finalement), Nymphomaniac n’aborde pas exclusivement le sujet de la dépendance au sexe. Enfin, oui, mais pas exactement de la manière dont on pourrait le concevoir. L’œuvre de Von Trier traite d’abord d’obsession, de compulsions, de désirs, d’impulsions, etc. Le film est basé sur un système de retour en arrière où le personnage principal, Joe (Charlotte Gainsbourg) raconte sa vie amoureuse, mais surtout sexuelle. Légèrement dérangeant et assez explicite, Nymphomaniac nous promet une visite au cœur de l’univers d’un personnage particulier, chez qui le sexe constitue le pivot central de sa vie, de ses aspirations, de ses désirs… Sans l’avoir visionné, j’ose ajouter le volume 2 à cette liste.

La vie d’Adèle d’Abdellatif Kechiche (2013) : Pas vingt minutes après avoir entamé le film je me passais le commentaire suivant : mais quelle mise en scène! Déjà, je commençais à m’attacher au personnage principal, Adèle (Adèle Exarchopoulos), qui pleure tranquillement dans son lit, car elle réalise qu’elle fantasme à propos d’une femme. Parfois triste et toujours empreint d’une sensualité et d’une sensibilité exquises, le film de Kechiche nous emporte dans une thématique assez taboue qu’est l’homosexualité chez la femme tout en prenant soin de parsemer le parcours d’une forte symbolique. Le visionnage de cette oeuvre est une activité que je vous recommande vivement.

Eyes Wide Shut – Stanley Kubrick (1999) : Le dernier film de Kubrick raconte l’histoire d’un couple qui bat de l’aile. Tout bascule lorsqu’Alice (Nicole Kidman) raconte à son mari Bill Harford (Tom Cruise) ses fantasmes à propos d’un autre homme. Harford devient obsédé par cette révélation et se retrouve soudainement confronté à plusieurs occasions où il pourrait tricher. En plus d’être visuellement très explicite (beaucoup de scènes de nudité), Eyes Wide Shut nous propose une visite au cœur de la fidélité, du mensonge, et même du rêve et de la réalité, en passant par les enjeux et les conséquences possibles d’une telle aventure. Une œuvre beaucoup plus profonde qu’il n’y parait de prime abord et qui réfléchit sur la nature de l’homme et sur sa sexualité parfois troublée.

Lolita – Stanley Kubrick (1962) : De son côté, Lolita, dont je traiterai dans une fiche de réalisateur en devenir (donc, restez branché comme on dit), s’attaque au sujet particulier de l’adultère, et surtout, de l’amour entre protagonistes ayant un écart d’âge considérable. Historiquement, le film a fait beaucoup réagir. Pour preuve, on n’a qu’à jeter un coup d’œil du côté de la polémique créée autour du roman de Nabokov, dont le long-métrage en est adapté. À bien y penser, ce n’est pas très étonnant : même ici, au Québec, et en 2015 qui plus est, ce type de relation demeure taboue. Beaucoup moins explicite que les autres films de cette liste, le film est toutefois pleinement suggestif et nous questionne inlassablement sur la dimension morale d’une telle relation.

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