Par Félix Morin
Bill Reading était un professeur de littérature comparée à l’Université de Montréal. Il est décédé le 31 octobre 1994 d’un accident d’avion à l’âge de 34 ans. Si ce tragique accident n’était pas arrivé, il serait encore des nôtres. Dans les ruines de l’université, ouvrage posthume publié pour la première fois un an après sa mort, Bill Reading dresse un portrait du rôle de l’université qui, et surtout après la grève étudiante de 2012, est d’une cruelle actualité.
Le titre du premier chapitre, même s’il a été écrit il y a environ 20 ans, nous semble être une musique quotidienne, voire banale : « L’idée d’excellence ». En fait, lorsqu’il dit « l’excellence est en train de devenir le mot d’ordre de l’université », nous comprenons rapidement que pour les 300 prochaines pages nous visiterons des ruines qui nous semblent bien familières.
Page après page, phrase après phrase et mot après mot, on dresse un constat de l’excellence universitaire. Citations à l’appui, Reading démolit minutieusement les critères qui font l’excellence universitaire dans les palmarès mondiaux et canadiens. Ce qui est fou, c’est qu’on retrouve presque la même critique sur le site de l’IRIS…en 2012! 18 ans de décalage et rien n’a vraiment changé. En fait, on retourne aux sources du problème et aux racines historiques des idées néo- libérales dans les universités québécoises.
Liant l’évolution de l’idée d’excellence avec le déclin de l’État-nation, il explique de manière méthodique comment, dans les murs de l’université, il voit naître un http://essayscaptain.com « marché de production, d’échange et de consommation comme un autre. »
Loin de nous laisser sans solution sur comment habiter les ruines de l’université contemporaine, ce livre nous oblige à penser ce lieu nous-mêmes parce que, malheureusement, Bill Reading voyait juste.
Crédit photo © chapitre.com