Par Alexandre Leclerc
Frank Dubosc, connu pour ses comédies populaires, tente un léger changement de registre avec Un ours dans le Jura, une comédie criminelle néo-noire. Si le film fait pâle figure en comparaison à l’œuvre des frères Coen, les maîtres incontestés du genre, il souffre de plus d’un manque d’équilibre entre ses tonalités disparates et d’un scénario parfois trop simpliste pour pleinement convaincre. Résultat : une expérience cinématographique sympathique, mais inégale.
Une histoire simple, peut-être trop
L’intrigue suit Michel (Dubosc) et Cathy (Laure Calamy), un couple d’agriculteurs spécialisés dans la production de sapins. Lorsque Michel frappe un criminel avec sa voiture en essayant d’éviter un ours, puis provoque la mort d’un second criminel, cette fois, par empalement, il récupère l’argent de l’échange de drogue prévu par les brigands qui contient 2 millions d’euros. L’histoire alors racontée à sa femme, amatrice de récits policiers, elle décide qu’il faut garder l’argent et cacher les corps qui pourraient incriminer Michel.
Parallèlement, le gendarme Roland Bodin (Benoît Poelvoorde) est chargé de l’enquête. Il se surprend des nombreux témoignages confirmant la présence d’un ours dans ce petit village du Jura qui semble étrangement lié à cette histoire de meurtre. S’ensuit donc une série de péripéties qui le mènera éventuellement vers le couple.
Un mélange de tons parfois maladroit
Si cette prémisse est séduisante, quoique convenue, le développement du scénario reste trop prévisible. Les obstacles que rencontre le couple sont trop peu nombreux, ce qui ne nous amène pas à nous investir pleinement dans l’enquête, ni, d’ailleurs, dans la situation de Michel et Cathy. Bien que le ton soit sympathique, à mi-chemin entre l’absurde et l’humour noir, les blagues ne parviennent jamais à nous soutirer plus qu’un sourire. Même l’ajout d’un club d’échangiste comme alibi ne suffit pas à insuffler la dose comique nécessaire à un récit qui aurait pu être prometteur. C’est comme si, au moment de franchir la ligne entre le réel et l’absurde, on se rétractait, par peur de quitter la zone de confort de la comédie grand public.
Il serait injuste de jeter la faute sur les interprètes qui, pour la plupart, font un travail honnête. Dubosc reprend somme toute le rôle familier du bonace dépassé par les événements, de même que Poelvoorde, en homme imposant, mais incapable. Calamy est toujours aussi charmante et investie, ce qui joue pour beaucoup dans l’acceptation des situations plus grandes que nature. Ensemble, ils parviennent à élever un scénario sans saveur en une farce acceptable.
Sortie trop tardive sur les écrans québécois?
Un ours dans le Jura se déroule du 21 au 26 décembre, ce qui le fait entrer (maladroitement) dans la catégorie des films de Noël. Pourquoi alors ne prend-il l’affiche que le 10 janvier au Québec (malgré une sortie en novembre en festival à Montréal)? Espère-t-on raviver la flamme du temps des Fêtes alors que le public s’est remis à la routine quotidienne? Car après tout, bien que le résultat final reste en demi-teinte, le film aurait pu charmer par sa photographie et ses interprétations enthousiastes. Il est toutefois freiné par un manque de profondeur narrative et une tonalité mal maîtrisée. Ceux qui recherchent une œuvre légère et visuellement belle pourront peut-être y trouver leur compte, mais les amateurs de récits plus aboutis risquent de rester sur leur faim.