Par Ariane Lacerte
Le bouleversement des habitudes de vie affecte grandement la santé mentale des étudiants. Que ce soit dû à l’isolement ou au stress de la nouvelle routine, plusieurs jeunes sentent qu’ils sont de plus en plus fragiles mentalement. Dans un but de comprendre comment les étudiants se sentent, la Direction de la santé publique de l’Estrie a mandaté trois étudiants du programme de doctorat en médecine de l’Université de Sherbrooke pour procéder à une vaste enquête sur la santé psychologique des étudiants. Afin d’en savoir plus sur les résultats, le journal Le Collectif s’est entretenu avec la docteure et professeure agrégée à la Faculté de médecine et des sciences de la santé, Mélissa Généreux, qui a supervisé l’enquête.
C’est dans le cadre de leur stage en santé communautaire que Jean-Simon Dallaire, Kate Haichin et Nouha Leflej ont travaillé avec la professeure Mélissa Généreux dans le but de recueillir des données sur la santé mentale des étudiants. Cette étude, réalisée à la suite d’une demande d’une directrice d’école secondaire qui souhaitait savoir comment se portaient ses élèves, montre des résultats assez inquiétants concernant la santé mentale des étudiants.
Les faits saillants de l’enquête
L’enquête répondue par 16 500 jeunes âgés de 12 à 25 ans révèle que la pandémie a un impact majeur sur la santé mentale des étudiants. Trois fois plus de jeunes du secondaire rapportent actuellement une santé mentale passable ou mauvaise, comparativement à ce qui a été observé en janvier 2020 (30 % contre 11 %). Les cégépiens et les universitaires sont encore plus touchés, avec une proportion d’anxiété ou de dépression probable aussi élevée que 58 %. Rappelons que cette proportion était estimée à 46 % chez les jeunes Québécois âgés de 18 à 24 ans dans le cadre d’une étude menée par l’Université de Sherbrooke du 6 au 18 novembre 2020.
« Dire qu’un jeune sur deux cumule plusieurs symptômes de dépression ou d’anxiété au cours des deux dernières semaines, ça me touche même si je m’y attendais. » – Professeure Mélissa Généreux
Encore plus difficile d’être étudiant en temps de pandémie
Il faut toutefois comprendre que le recrutement des jeunes de 18 à 24 ans en novembre et celui du mois de janvier n’est pas le même. Lors de l’enquête de janvier, les jeunes étaient directement recrutés dans leur milieu scolaire, tandis qu’en novembre, le panel était une représentation globale de la population. En constatant que le panel qui cumule le plus de symptômes de dépression ou d’anxiété est celui des étudiants collégiaux et universitaires, nous pouvons donc déduire que les études supérieures affectent grandement la santé mentale des jeunes.
Les résultats ne surprennent pas la Pre Généreux et ses étudiants. La vie étudiante est depuis longtemps connue comme étant stressante. Avec l’anxiété de performance, le désir de voyager, le désir de travailler pour avoir de l’argent, le désir d’avoir du temps pour étudier afin d’avoir de bonnes notes, les symptômes de dépression et d’anxiété sont depuis déjà quelques années très fréquents chez les étudiants. À tout ça s’ajoutent la pandémie et le confinement, qui empêchent les jeunes de socialiser et de faire les activités qui leur permettaient d’évacuer le stress.
Facteurs d’anxiété rapportés par les jeunes
En plus du stress associé à la pression des études, les jeunes sont affectés par de nombreux autres facteurs. Parmi les principaux facteurs rapportés par les jeunes nuisant de manière importante à leur santé psychologique, nous retrouvons :
- La réduction des activités sociales, sportives et culturelles (41 % au secondaire et 61 % au cégep/université).
- L’augmentation du temps d’écran (39 % au secondaire et 49 % au cégep/université).
- Les cours en ligne (28 % au secondaire et 49 % au cégep/université).
Pistes de solution encourageantes
Bien que ces statistiques soient inquiétantes, les résultats de l’enquête donnent aussi des pistes de solution qui pourraient aider au moral des jeunes. Normaliser les différentes réactions psychologiques possibles chez les jeunes en temps de pandémie les aiderait grandement à relativiser leurs émotions.
Le retour en classe graduel devrait aussi aider à briser l’isolement des jeunes. Le rapport de l’enquête démontre que 53 % des étudiants universitaires affirment que le maintien des cours en présentiel serait une solution qui les aiderait à aller mieux. Avec le retour en classe graduel dès cette semaine, les étudiants de l’Université de Sherbrooke auront la possibilité de se changer d’air et de côtoyer leurs collègues selon les règles de la santé publique.
Pistes de la docteure Généreux pour diminuer son temps d’écran :
- écouter un podcast au lieu d’un film ;
- faire un appel téléphonique au lieu d’une vidéoconférence ;
- imprimer ses lectures scolaires ;
- faire ses entrainements dehors plutôt que sur YouTube.
En ces temps plutôt difficiles, il est important de prendre soin de soi. Si vous éprouvez des symptômes de dépression ou d’anxiété, n’oubliez pas que le Service de psychologie de l’Université offre des consultations ponctuelles.
Crédit photo @ Béatrice Palin