Tribune libre : P(L)Q : quatre trente sous pour une piastre

Par Gianluca Campofredano

Ça y est, nous revoilà en campagne électorale après 18 mois de gouvernement minoritaire. Le 7 avril prochain, les citoyens québécois auront l’occasion de choisir les individus qui les représenteront pour administrer les affaires publiques.

Or, bien que la Belle province connaisse une longue tradition démocratique (les premières élections eurent lieu en 1792), encore faut-il qu’il y ait une offre intéressante pour que les électeurs participent massivement à cet exercice. Présentement, il y a quatre partis à l’Assemblée nationale (PQ, PLQ, CAQ et QS) et un cinquième (ON) qui est plus ou moins présent dans le paysage politique.

En cette fin de législature, quel bilan pouvons-nous tirer du gouvernement péquiste tout comme de l’opposition parlementaire?

D’abord, du côté gouvernemental, il était difficile de faire pire que son prédécesseur (conflits étudiants, démissions de ministres, scandale des garderies, fédéralisme impotent, inaction identitaire, culture de corruption, etc.). Par conséquent, le déclassement de Gentilly-2, une politique sur la souveraineté alimentaire, l’élargissement de l’aide juridique, l’annonce de l’électrification obligatoire des véhicules de l’État, la mise en œuvre d’une loi autorisant l’euthanasie et le renforcement de l’enseignement de l’histoire sont des réalisations importantes du Parti québécois pour le futur du Québec.

Cela étant dit, une quantité impressionnante d’incohérences et de manœuvres électoralistes discréditent le PQ et viennent le reléguer au même rang du PLQ, champion incontesté du cynisme politique ambiant.

Quelle est la crédibilité des péquistes quand ils s’époumonaient contre Emmanuel Dubourg qui empochait son indemnité de départ, alors que plusieurs d’entre eux en eurent déjà bénéficié dont Pauline Marois et Nicole Léger? Où est passé leur engagement à limiter le nombre de mandats du premier ministre et des maires (nécessaire pour éloigner les affairistes)? Le « deal » de Blanchet (mari de Pauline Marois) sera-t-il étudié en commission parlementaire après les élections? L’intransigeance du gouvernement dans le dossier de la charte des valeurs a-t-elle alimenté la polarisation des points de vue et la conversion électoraliste de ce projet? Quel est l’intérêt de voter une loi sur les élections à date fixe alors que le gouvernement dissout la chambre sans même l’excuse d’avoir été renversé par un vote? Les péquistes sont-ils à ce point aveuglés par la partisanerie pour pardonner tous les pêchés du monde et donner un chèque en blanc au nouveau Berlusconi du Québec?

Concernant les libéraux, il suffit de dire que leur chef signa en 2008 un décret diminuant les frais de permis des cliniques privées et que quelques jours après sa démission comme ministre de la santé, il était embauché chez Persistence Capital Partners, fonds d’investissement destiné à l’acquisition d’entreprises privées en santé. Que dire de plus? Couillard veut signer la constitution juste à temps pour célébrer le 150e anniversaire de la confédération, il expulse sa députée la plus compétente en ce qui concerne la charte des valeurs et veut la remplacer par le docteur Barrette (ce dernier critiqua avec véhémence la gestion libérale en santé sous l’ère Charest). Quant à son slogan, il ne mérite même pas de s’y attarder.

La CAQ est tout simplement un nouveau vieux parti composé de transfuges et d’opportunistes de haut niveau. Niant l’existence de la question nationale tel un ministre conservateur face à la théorie de l’évolution, il ne reste plus que 8 ans à Legault pour rendre les caribous plus riches que les castors…

Québec solidaire a des idées rafraichissantes qui pourraient être partagées par une grande majorité des citoyens, mais leur fermeture idéologique à gauche de la gauche fait qu’ils sont automatiquement répudiés par une majorité d’électeurs (QS fait la même chose envers toutes idées non progresso-écolo-féministes).

Enfin, Option nationale est devenue en quelque sorte une grosse association étudiante militant pour l’indépendance du Québec. Sans chef ni équipe expérimentée, elle risque de terminer derrière le Parti vert du Québec.

Les prochaines élections n’amèneront guère rien de nouveau. La majorité des indépendantistes voteront PQ et le PLQ récoltera encore au moins 35 % des sièges (votes du bloc non francophone). L’axe souveraineté-fédéralisme sera encore utilisé pour atteindre un bipartisme parfait, alors que ce débat est absent de l’actualité depuis 1995. Tristement, notre mode de scrutin préhistorique (qui ne changera pas) force les citoyens à choisir le moins pire (et non le meilleur) puis à jouer le jeu des vieux partis. L’unique façon d’espérer une participation plus active des citoyens est de rester critique à l’égard des politiciens qui nous gouvernent, qu’ils soient proches ou loins du parti pour lequel nous sympathisons.

PS Vous souvenez-vous de Geneviève L’Obstineuse? En 2012, cette internaute relatait sur le web les multiples aberrations du gouvernement libéral. Suite aux élections, le gouvernement péquiste l’engage à titre de conseillère politique au cabinet du ministre de l’Environnement. Comme quoi on s’obstine moins quand on se fait acheter.


Crédit photo © lapresse.ca

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