Un génocide. Ah oui? Les Arméniens. Qui ça? Quand ça? Où ça? Et puis, surtout, par quel diable? Voilà des questions auxquelles vous trouverez réponse dans ce texte. Remarquez, Wikipédia aurait tout autant pu vous l’apprendre.
Par Rodrigue Turgeon
Histoire d’épouvante
1882. On estimait à 2,6 millions le nombre d’âmes arméniennes peuplant l’actuelle Turquie. Sans nation propre, leur occupation des lieux remonte quand même à 500 ans av. J.-C. Au fil des siècles, ils devinrent chrétiens, puis protestants, cohabitant avec les Ottomans de confession musulmane, majoritaires.
1914. Ce nombre baisse à 2,1 millions. Le tournant du XXe siècle, c’est « les premiers cas de massacres systématiques d’Arméniens de l’histoire ottomane moderne à être perpétrés en temps de paix et sans lien aucun avec une guerre extérieure » (Le tigre en flammes, P. Balakian). Les journaux américains titrent l’horreur, pourtant il n’y a aucune intervention des autorités internationales pour freiner la folie de Talaat Pacha.
1915 – 1922. Dans l’ombre de la Première Guerre mondiale, 1,5 million d’Arméniens « furent traqués comme de véritables bêtes sauvages, tués partout où ils se trouvaient. […] En vérité, l’objectif poursuivi était l’extermination pure et simple », consigne le vice-consul britannique H. S. Shipley, membre d’une commission d’enquête qui n’a pas su convaincre l’Occident à intervenir. Les rescapés fuirent leur terre ancestrale par tous les moyens.
1923. Sans attendre que la terre ait le temps d’éponger le sang qui l’inonde, le traité de Lausanne redessine les frontières de la Turquie. Plus aucune trace de ce que l’on considérait autrefois comme l’Arménie indépendante.
Tenez-vous bien pour la suite, car ressasser l’histoire n’était nullement le but de cet article. Un article? Que dis-je! Un cri du cœur! Cette fois-ci, je prends la plume parce que j’ai quelque chose à régler avec toi, société lobotomoccidentalisée, avec toi, humanité authentipocrite.
Que quelqu’un m’explique pourquoi pratiquement tout le monde ignore ce génocide! Tous se plaignent de vivre dans un monde antipathique, mais personne ne veille à éveiller notre compassion.
L’homme est un dieu pour l’homme
Alors quoi? S’en remettre à la bonté intrinsèque de l’homme pour s’assurer que l’histoire ne se répète pas? Mais de quelle bonté naturelle parle-t-on au juste… Ah bon, il y aurait un sauveur, un messie. Qu’attend-il, l’élu? Je vous ris au visage et lui tordrais le cou, ne serait-ce que pour vivre dans un monde égalitaire. Emmenez-le-moi, cet homme de vertu si laxiste devant tous les massacres de l’univers!
L’homme est un loup pour l’homme
Alors quoi? L’homme est mauvais? Et c’est reparti, encore la même rengaine. Le jour OU la nuit. Rien entre les deux. Pas de crépuscule. Pas d’aurore. Je vous l’assure, cette satanée dualité ne mènera qu’à la confrontation. On en vient à croire qu’il n’y a que des gagnants ou des perdants, que des victimes et des coupables.
Vous en doutez? En 1999 (nous étions tous nés, en passant), le ministre d’État Ramazan Mirzaoglu inaugure un mémorial à la mémoire des victimes du génocide DES TURCS PAR LES ARMÉNIENS. Rendu aussi bas, qualifier cette insulte irrévérencieuse de mécanisme politique de renversement de l’histoire est un euphémisme.
Et aujourd’hui, nous avons une Turquie qui continue de nier les souillures coagulées qui ornent sa cravate.
L’homme est humain
L’humain est nuance! Il est émotion, passion, joie, peine, crépuscule, mais surtout aurore! “On est gagnant que dans l’ignorance de nos faiblesses” (en italique dans le texte). On est gagnant que dans l’aveuglement volontaire du passé. N’attendons plus que des Roméo Dallaire contreviennent à leurs fonctions pour nous informer des pires atrocités dont notre espèce est capable. Informons-nous sur ces crimes pour transformer notre honte d’être humain en compassion humaniste. Nous avons été capables de barbarie, l’Arménie en est la preuve. “MAIS NOUS LE SOMMES ET NOUS LE SERONS TOUJOURS” (en italique dans le texte).
Il y a 100 ans, le gouvernement turc a commis contre son peuple un génocide en toute impunité et libre de toute sanction des puissances mondiales. Maintenant, expliquez-moi la différence avec la folie du régime syrien.