Sam. Juil 27th, 2024

Par Judith Doré Morin

Mettre à profit les connaissances acquises au cours de sa formation dans un contexte de coopération internationale, c’est l’expérience qui attend le trio d’ingénieurs de la Faculté de génie. Réunis par la mission d’Ingénieurs sans frontières Québec, ils s’envoleront pour le Sénégal au début du mois de juin. Pendant trois mois, ils poursuivront le travail entamé en sol québécois afin d’accroître l’accessibilité d’une source d’énergie renouvelable au sein du village de Ndiaganio.

Le village du centre-ouest du Sénégal, où vivent près de 3000 individus, dispose de biodigesteurs mis en place par le gouvernement. Ces dispositifs permettent de produire du biogaz, une source d’énergie renouvelable, par la valorisation de déchets issus de l’agriculture. Les familles de Ndiaganio n’ont toutefois pas reçu une formation adéquate visant à opérer les biodigesteurs de façon optimale.

Malgré la présence de 130 biodigesteurs, le charbon demeure la principale source d’énergie domestique. En fait, seulement 15 % de ces réacteurs chimiques sont en fonction. Ainsi, les coupes forestières requises pour la production de charbon se poursuivent, ce qui contribue fortement à la dégradation des sols ainsi qu’à la désertification du milieu.

Miser sur une source d’énergie durable

Dans un biodigesteur à voie liquide, des microorganismes anaérobies décomposent les déchets organiques mélangés à de l’eau. Ce processus entraîne la production d’un biogaz, composé essentiellement de méthane, qui constitue une source d’énergie renouvelable disponible pour les familles. Ce biogaz voyage dans des tuyaux jusque dans les cuisines des maisons, où il peut être utilisé pour produire la chaleur nécessaire à la cuisson des aliments et même de l’électricité. La combustion du méthane évite que ce gaz soit libéré dans l’atmosphère, où sa contribution à l’effet de serre est nettement supérieure à celle du dioxyde de carbone. De plus, le produit issu de la décomposition de la matière organique, le digestat, forme un amendement pour le sol.

Au cours de l’été, les cinq jeunes humanitaires impliqués dans le projet Kabin Jipit (« s’entraider » en langue sérère) apporteront un soutien technique à la communauté de Ndiaganio. Leur objectif est de permettre aux familles d’opérer les biodigesteurs de façon autonome. Une fois sur le terrain, leur principale tâche consistera donc à former des membres de la communauté qui pourront ensuite actionner convenablement les dispositifs et transmettre leurs connaissances d’incubation. Ceci permettra aux membres de l’équipe de promouvoir et de renforcer les compétences des femmes de la communauté, lesquelles tendent à rester dans l’ombre.

Se former au-delà des frontières

Depuis 1994, l’organisme Ingénieurs sans frontières Québec offre à la jeunesse québécoise l’opportunité de développer ses compétences en ingénierie durable par une expérience de coopération internationale. L’organisation propose des projets répondant à des besoins identifiés par les communautés locales et leur permettant de renforcer leurs capacités techniques. En plus de contribuer à la lutte aux changements climatiques et d’adhérer aux principes du développement durable, les coopérantes et les coopérants participent à la promotion de l’égalité et de l’équité des genres dans ces communautés.

Le projet résulte d’un partenariat entre l’organisme canadien SUCO (Service universitaire canadien outremer) et le Réseau MUUD (Regroupement des familles de Ndiaganiao). Le projet s’inscrit dans la volonté du MUUD de favoriser des pratiques agricoles respectueuses de l’environnement, l’autonomie énergétique des familles ainsi que l’implication des femmes au sein de la communauté.

Bien que les trois ingénieurs de la Faculté de génie aient déjà voyagé dans leurs vies, il s’agit pour eux d’une première expérience de coopération internationale. Gabriel Fillion-Dionne, qui complètera un baccalauréat en génie chimique avec ce projet, souligne le caractère unique de ce stage. Ce sera pour lui une occasion d’employer ses compétences en ingénierie pour le bien d’une communauté plutôt que pour celui d’une entreprise, tout en réalisant un échange culturel enrichissant. Marianne Leroux voit également cette coopération comme une opportunité de mettre ses connaissances à l’épreuve dans un contexte tout autre que celui qu’elle retrouve habituellement en entreprise, et ce, avant de rejoindre le marché du travail. En effet, l’étudiante complètera prochainement une maîtrise en génie mécanique.

Se préparer adéquatement

Le trio d’ingénieurs prépare activement son séjour sur le continent africain. Depuis longtemps, il consacre régulièrement de son temps à ce projet d’envergure. Le groupe doit notamment recueillir des dons et des commandites qui financeront la réfection des biodigesteurs ainsi que la formation d’incubation de la population africaine. Pour ce faire, le trio d’ingénieurs a organisé diverses activités de levée de fonds et de sensibilisation, telles qu’un tournoi d’ultimate frisbee et une soirée ludique dans un pub. Avec la collaboration du restaurant montréalais La Khaïma, le groupe propose trois activités à saveur africaine pour les prochaines semaines, dont un souper à la sénégalaise le 23 février prochain.

Le groupe d’humanitaires de l’université travaille actuellement à développer des moyens de réparer et d’optimiser les biodigesteurs de la petite communauté sénégalaise. Il souhaite également pouvoir arriver sur le terrain avec des outils de formation adaptés à la réalité des Sénégalais avec lesquels il coopérera.

Les trois membres de l’université sont conscients que, malgré leur préparation, plusieurs défis les attendent. Anthony Duquette-Michon, étudiant au baccalauréat en génie mécanique, mentionne qu’ils devront notamment apprendre à réagir de façon respectueuse face à certaines différences culturelles. L’étudiant de deuxième année aborde également l’importance de conserver une attitude positive face aux imprévus, qu’ils soient liés au projet ou à leur santé personnelle.

Coopérer ailleurs, et ici

Ingénieurs sans frontières Québec encadre les jeunes ingénieurs dans la planification et la réalisation de leur mission sur le terrain. Les volontaires sont notamment invités à participer à trois séminaires avant leur départ. Ces formations leur permettent de développer leur esprit d’équipe de même que d’aborder des sujets tels que le choc culturel, le développement durable et la culture de leur pays d’accueil.

L’équipe bénéficie également des conseils d’une mentore, Annick Gosselin, une ingénieure séniore détenant une grande expérience en gestion de projet et en coopération internationale. Celle-ci s’est d’ailleurs rendue sur le terrain, en juillet dernier. Elle est de ce fait en mesure de guider les membres de l’équipe dans leurs apprentissages.

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3 thoughts on “Des membres de l’Université de Sherbrooke en coopération humanitaire au Sénégal”
  1. Pas sûr qu’il ne s’agisse que d’une affaire d’ingénieurs ! D’ailleurs, Robert Plushnik était un psychologue. Et ne cofondons pas amour et émotions, le premier étant plus complexe et plus rare que les secondes.

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