Lun. Mar 25th, 2024

Par Andréanne Beaudry

La récente série Fugueuse, présentée sur les ondes de TVA depuis le 8 janvier dernier, met en lumière l’industrie du sexe, en mettant en vedette une jeune mineure en fugue. L’actrice québécoise Ludivine Reding, qui incarne le personnage de Fanny dans la série, illustre bien une réalité présente au Québec. Selon le Réseau Enfants-Retour, on compte 5 700 disparitions d’adolescents, dont 4 000 cas sont considérés comme des fugues. En 2014, 30 % des adolescentes fugueuses ont été exploitées sexuellement. À la suite de l’engouement et des nombreux commentaires concernant la série, Le Collectif s’est alors intéressé à l’exploitation sexuelle des jeunes mineures.

Une activité lucrative qui peut prendre plusieurs formes

Dans plusieurs cas d’exploitation sexuelle de mineures, les victimes sont des personnes en fugue. Souvent, elles prennent cette décision afin de respecter les désirs ou bien les décisions de leurs proxénètes. Il est alors plus facile pour eux d’imposer complètement leur pouvoir vis-à-vis celles-ci. En d’autres mots, l’exploitation sexuelle se caractérise par « une situation, un contexte ou une relation où un individu profite de l’état de vulnérabilité ou de dépendance d’une personne, ou de l’existence d’une inégalité des rapports de force, dans le but d’utiliser le corps de cette personne à des fins d’ordre sexuel, en vue d’en tirer un avantage ».

D’après le Secrétariat à la condition féminine du Québec, l’exploitation sexuelle est une problématique assez complexe. Elle peut être associée à différentes formes d’activités criminelles, dont le proxénétisme, la traite de personnes ou l’achat de services sexuels, entre autres. En ce qui concerne ces types de manifestations, les contextes sont variés : milieu prostitutionnel, salon de massage érotique ou bar de danseuses nues. Contrôlée par des réseaux criminels, l’industrie du sexe est bien implantée au Québec : « une estimation conservatrice des services sexuels offerts au Québec a établi à plus de 2 600 000 le nombre de transactions en lien avec la prostitution commerciale au cours d’une année ». Il est à noter qu’en raison de la clandestinité de l’industrie, les chiffres de cette étude peuvent se révéler plus élevés.

L’industrie du sexe en chiffres au Québec, In

Bien que l’achat de services sexuels soit criminel au Canada depuis le 6 décembre 2014, le marché du sexe demeure très lucratif, selon le Portrait provincial du proxénétisme et de la traite de personnes réalisé en 2013.

D’ailleurs, le Québec regorge d’endroits où l’on offre des services sexuels. D’après une étude de 2012, La prostitution : il est temps d’agir (pdf), on retrouvait « à Montréal pas moins de 200 salons de massages érotiques et 30 bars licenciés de danseuses nues, comparativement à deux seulement à Vancouver ». Puis, en 2013, la Concertation des luttes contre l’exploitation sexuelle a répertorié 420 lieux connus dans la région de Montréal qui sont liés à l’industrie du sexe. Parmi cette liste, 348 de ceux-ci se retrouvent sur l’île de Montréal. En décembre dernier, le gouvernement de Philippe Couillard a cependant annoncé qu’il « octroiera un million de dollars par année pendant quatre ans pour la mise en place de 19 projets destinés à lutter contre l’exploitation sexuelle » des jeunes.

Victimes : un cas de disparition pas comme les autres

Comme le mentionne le Portrait provincial du proxénétisme et de la traite de personnes, il n’existe pas réellement de profil type de victimes. Les jeunes femmes proviennent de tous les milieux socioéconomiques, même si les proxénètes ciblent davantage celle provenant d’un milieu plus défavorisé. Elles sont d’ailleurs considérées comme étant vulnérables et à risque de réaliser une fugue ou d’être placées en centre d’accueil. Selon une étude du Service du renseignement criminel du Québec (2013), « 39 % des victimes identifiées des proxénètes sont d’âge mineur ».

Certaines motivations ont été observées chez les personnes exploitées sexuellement. D’une part, parce que les jeunes filles qui sont attirées reçoivent, souvent pour la première fois, l’attention d’une autre personne. Certaines d’entre elles « développent donc un sentiment affectif envers leur exploiteur, lequel les manipule afin qu’elles croient qu’il leur vient en aide ». D’autre part, car les bénéfices monétaires les attirent, puisque les danses érotiques ou la prostitution sont deux activités lucratives importantes. Cependant, elles tombent tout de même sous le contrôle d’un proxénète; ce dernier garde alors tous les profits.

Proxénètes : l’art d’arriver à ses fins au profit des autres

On considère le proxénétisme comme le fait de persuader un individu à se prostituer. D’ailleurs, « la notion de persuasion est déterminante, puisque le proxénète ne recourt pas nécessairement à la coercition ». Plusieurs actions sont considérées comme du proxénétisme, selon le Code criminel. Parmi une liste, il est possible de retrouver : « solliciter autrui à avoir des rapports sexuels illicites avec une autre personne; entraîner une personne qui n’est pas prostituée vers une maison de débauche à des fins de prostitution ou bien induire ou tenter d’induire une personne à se prostituer » et plus encore. Les proxénètes parviennent d’ailleurs à recruter leurs victimes à l’aide de différents moyens. Le contact peut s’effectuer par l’intermédiaire d’une connaissance, des réseaux sociaux ou bien même par une petite annonce placée dans les journaux.

Une fois que le contact est établi, les proxénètes entrent en jeu avec diverses méthodes de manipulation et d’exploitation. Plusieurs d’entre eux vont utiliser la séduction pour manipuler leurs victimes de manière psychologique. D’autres useront également de la violence, autant physique que verbale, sur elles. De plus, « pour augmenter leur contrôle, les exploitants vont souvent séquestrer et isoler socialement les victimes ». Le but étant d’empêcher les victimes de tisser des liens avec d’autres personnes qui pourrait les encourager à vouloir obtenir de l’aide. Dans tous les cas, le proxénète profite de la vulnérabilité des jeunes femmes qui sont aveuglées par leur attachement envers lui.

Une question de vulnérabilité ou de manipulation?

Il n’existe pas de profil type de personnes pouvant être victimes d’exploitation sexuelle. Par contre, la plupart du temps, les proxénètes vont se concentrer sur celles qui sont les plus vulnérables. Comme il a été mentionné plus tôt, le proxénétisme est le fait de persuader un individu. Pour ce faire, la manipulation est alors chose à considérer.

Afin de contrer les exploitations sexuelles des jeunes mineures, plusieurs ressources sont disponibles au Québec, dont le Réseau Enfants-Retour. Une liste d’organismes est d’ailleurs proposée sur la page officielle de Fugueuse du site Web de TVA.

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