Depuis quelques semaines, la grève se fait sentir alors qu’elle touche déjà plusieurs universités québécoises. Mais à ce chapitre, je n’apprends rien à personne. Il aurait fallu avoir la tête enfouie dans le sol pour ne pas remarquer le tumulte engendré par la mobilisation des étudiants afin de contrer l’austérité.
Par Vanessa Racine
Il y a trois ans déjà…
Une vague rouge de colère déferlait sur la province. Et le mouvement étudiant déployait des prouesses d’inventivité pour porter ses revendications et rallier sa masse partisane. Alors qu’en septembre 2011 on pouvait encore douter du déclenchement d’une grève tournante à travers les universités du Québec, le boycottage des cours a atteint une ampleur historique au printemps 2012 et la combativité étudiante, une fougue intarissable.
Si l’automne laissait présager que les étudiants absorberaient les 1 625 $ supplémentaires qu’on voulait greffer à leur facture scolaire sans trop d’éclats, le vent a tourné. En mars, le printemps était érable et la rue, aux étudiants. Au-delà de l’opposition à la hausse des frais de scolarité, une mouvance sociale s’enracinait. Un parfum de mai 68 imprégnait l’air du temps.
Mais malgré toute cette verve revendicatrice, le gouvernement a fait la sourde oreille, ou presque. Quelques vagues signes d’ouverture, sans jamais ouvrir la possibilité de négocier. « Mais allez-y, manifestez! Vous êtes mignons. »
Mars 2015 – La situation provinciale
On assiste depuis les derniers mois à un démantèlement en règle de l’ensemble des services publics. Derrière le discours comptable justifiant les mesures d’austérité du gouvernement libéral se cache un projet idéologique de transformation des structures sociales. Que ce soit en éducation, en santé, en culture ou dans la petite enfance, la logique est la même : désinvestir les fonds publics, augmenter la tarification, attaquer les conditions de travail des employés et donc mener à une privatisation progressive des services publics.
Les étudiants québécois se mobilisent. Ils promettent un printemps chaud au gouvernement du Québec pour démontrer leur opposition à ses politiques d’austérité. En date du 19 mars, plus de 40 000 étudiants seront en grève à partir du 23 mars afin de protester contre les compressions en éducation. En effet, 46 associations étudiantes, sur sept campus, ont un mandat de grève reconductible pour un total de 43 346 étudiants. De plus, 26 associations étudiantes ont un mandat de grève ponctuel, pour un total de 16 997 étudiants. Finalement, 60 associations étudiantes prévoient tenir un vote de grève, regroupant 140 839 étudiants.
Parmi ce nombre, l’Association des étudiants de la Faculté d’éducation de l’UQAM, qui compte plus de 5 000 membres, s’est jointe au mouvement de grève de deux semaines. C’est ce qu’on peut lire sur le site www.Printemps2015.org qui recense les mandats de grève dans les rangs des étudiants. Me croyez-vous toujours quand je vous dis qu’une grève se prépare ?
C’est au tour de Sherbrooke
À l’UdeS, l’Association générale des étudiantes et étudiants en médecine (AGEEMUS) a voté à l’unanimité pour une grève ponctuelle le 30 mars prochain, ce qui touche 700 étudiants.
De plus, l’Association générale des étudiants en lettres et sciences humaines (AGEFLESH) a un référendum de grève à venir le 24 mars prochain, tout comme l’Association générale des étudiantes et étudiants de la faculté d’éducation (AGEEFEUS) qui votera le 25 mars. C’est donc important pour tous les étudiants de faire entendre leur voix, qu’ils soient pour ou contre ce mouvement. Il ne faut pas oublier qu’une grève à l’AGEFLESH et à l’AGEEFEUS réunis toucherait plus de 4 000 étudiants.
Porter la voix d’une génération
Le mouvement étudiant n’est pas issu d’un sentiment de révolte primaire. Certes, il n’est pas non plus parfait. Il présente parfois certaines lacunes argumentatives, il arrondit parfois les coins à son avantage. Mais il a cette volonté qui le rend fort.
Le mouvement étudiant a également autre chose d’enviable, depuis le printemps érable de 2012. Au fond de cet épineux débat sur la hausse des droits de scolarité, il a su diversifier ses tactiques pour interpeller un plus grand nombre de gens et pour encourager l’implication multidisciplinaire. D’un groupe majoritairement réticent, il a su former une masse unie, militante et axée sur la réflexion.
Voter ?
Vous, chers étudiants de l’UdeS qui irez voter, je vous dis ceci avant de terminer. Il ne s’agit pas simplement de prendre position pour ou contre l’austérité. Il s’agit de porter la voix d’une génération qui refuse la tangente qu’emprunte actuellement la société québécoise.
En refusant de négocier avec les étudiants sous prétexte que leur voix ne pèse pas lourd dans la balance du Québec, le gouvernement traite ses citoyens exactement comme il le fait avec l’éducation et le savoir : comme une marchandise.