Par Eliott Bureau, Raphaëlle Clément, Thomas Morin, Félix Parent et Alice Tétreault

L’université, lieu de savoir riche en expériences et possibilités, cache une réalité inquiétante pour une bonne partie de sa communauté. Le 26 janvier 1987, Le Collectif rapporte un cas d’agression sexuelle vécue ici même, dans la buanderie des résidences de l’Université de Sherbrooke (UdeS). Loin d’être isolé, cet événement fait partie d’un ensemble de cas vécus que la presse étudiante a mis en lumière afin de sensibiliser la communauté universitaire aux agressions sexuelles entre 1978 et 1993.
Au tournant des années 1980, les mouvements féministes s’articulent de plus en plus autour d’un militantisme local et luttent pour « la réappropriation par les femmes de leur propre corps, de leur santé et de leur sexualité. […] Avortement, harcèlement sexuel, viol et pornographie font partie des principaux champs de bataille féministes ». Parallèlement, les femmes sont de plus en plus nombreuses dans les universités et représentent près de 55 % des effectifs à la fin de la décennie 1980.
Le rôle du Collectif dans la lutte féministe
C’est dans ce contexte que les journaux étudiants documentent et dénoncent un climat d’insécurité vécu par la communauté féminine de l’UdeS. Revenons sur l’article du 26 janvier 1987 écrit par Linda Garceau. Il illustre à merveille le sentiment d’insécurité ambiant, les moyens d’action des étudiantes et les visées de la presse universitaire.
L’article s’ouvre sur un constat bien terne : personne n’est à l’abri des violences à caractères sexuels à l’université. Garceau donne la parole à Anne-Marie Nadeau, une personne active au sein du Comité-Femmes, anciennement chargée de la sécurité à l’Université. Elle énumère plusieurs lieux dangereux pour les femmes seules : tunnels, aires de stationnement, buanderie des résidences, etc. De ce fait, l’article dépeint un sentiment d’insécurité omniprésent pour l’ensemble des femmes présentes sur le campus.
Des critiques à l’égard de l’Université
Le texte de Garceau permet aussi de connaitre deux moyens d’action des étudiantes pour faire face à ce climat d’insécurité. Premièrement, le Comité-Femmes s’implique directement pour la sécurité des femmes en dénonçant la direction. Par exemple, les coupes budgétaires concernant l’éclairage nocturne ont, selon le Comité-Femmes, favorisé un climat dangereux. De fait, six viols ont eu lieu depuis la coupe budgétaire entre 1985 et 1987. En outre, le comité dénonce le silence de l’Université qui désire préserver sa réputation. Deuxièmement, il revendique des améliorations pour protéger les femmes, comme l’installation de caméras de surveillance ou encore un meilleur partage d’informations sur le service de sécurité.
L’utilisation de la presse étudiante vise deux buts complémentaires. D’un côté, le journal possède un rôle d’information et de sensibilisation. Linda Garceau utilise ainsi sa plume afin d’informer les femmes sur le fonctionnement du service de sécurité, mais aussi pour les sensibiliser aux endroits plus dangereux du campus. D’un autre côté, la sensibilisation, couplée à l’activisme du Comité-Femmes dans les journaux, vise globalement à offrir de meilleures conditions pour les femmes de l’UdeS. Malgré tout, l’article se conclut comme il a commencé : « La meilleure prévention est encore la prudence. » Presque 40 ans plus tard, le constat est-il le même ?
Source : Archives
