Par Nicolas Cornellier
Mardi dernier, je suis allé à la rencontre d’une photographe, aussi modèle nu à ses heures. L’une de mes plus belles rencontres.
Je dois avouer que ça m’a pris un certain temps avant d’écrire ce billet. De peur de ne pas trop savoir comment m’y prendre, peut-être. J’ai examiné attentivement les différents angles vers lesquels me tourner. J’avais en tête l’hypersexualisation et le besoin viscéral d’être désiré, entre autres. Je m’apprêtais à remettre en cause le mot « pudeur », à livrer mes présomptions en pâture au Collectif. À ce moment-là, j’étais à des kilomètres de la vérité.
Les yeux gourmands
J’ai rejoint Myriam Croteau à la Brûlerie Faro à 19 h 30. Sans questions à la main, sans préparation. Je n’ai pas vu la nécessité d’enregistrer ni de noter ce qu’il s’est dit. J’ai siroté mon mokaccino, puis elle a brisé la glace avec ses dessins. La femme de 31 ans m’a avoué qu’elle se sentait bien après chacune des séances. Tout se déroule dans le respect le plus absolu. Les participants aux yeux gourmands se font interdire l’accès assez rapidement. Qu’en est-il pour le modèle nu? N’en retire-t-il pas une certaine satisfaction à se faire reluquer les parties génitales? N’est-il pas quémandé par une soif insatiable? Peut-être. Toutefois, ce serait bien trop facile d’en tirer de telles conclusions. Bien sûr qu’il y a une certaine forme de plaisir qui en découle.
Se compromettre
« La beauté est dans les yeux de celui qui regarde. » Vrai. On ressent tous un jour ou l’autre le besoin irrépressible de se sentir désiré. Au-delà du désir, on ressent tous un jour ou l’autre l’envie profonde de se dévoiler, de se mettre à nu sans barrières ni jugements. On cherche tous d’une quelconque façon à s’abandonner dans le regard de l’autre avec confiance et respect. C’est de ça qu’il est question dans ces ateliers.
Myriam a insisté sur le fait qu’on devrait tous s’ouvrir sur ce type d’expérience, soit en tant que modèle ou dessinateur, au moins une fois dans sa vie. D’une part, c’est libérateur, et d’autre part, c’est thérapeutique. Une fois sa robe de chambre retirée, ça ne prend pas de temps avant que les compliments pleuvent. On salue à maintes reprises sa poitrine abondante, ses courbes, ses attraits physiques. Pour ma part, je salue le charme de son naturel qui est désarmant. Indéniable. Myriam n’inspire pas la femme-objet du désir. Myriam m’inspire un profond respect. Elle m’a fait comprendre en l’espace d’un mokaccino et quelques heures ce que signifiait réellement l’expression « se mettre à nu ». Même si j’ai gardé mes vêtements, je me suis mis à nu. Je me suis compromis. Faire de nouvelles rencontres, c’est aussi se compromettre. On ne sait jamais trop quelles parties de soi révéler. Elle m’a raconté certaines expériences du passé douloureuses et, moi, je lui ai parlé de mon homosexualité.
Il est vrai que l’on était loin des positions qu’elle préfère lorsqu’elle pose. Au lieu de ça, on s’est laissé emporter par nos histoires d’amour, notre passion pour le cinéma et la musique. Je me suis fait une amie. J’ai pris le temps de la regarder, de l’écouter et de la trouver magnifique. Je suis rentré chez moi et je me suis senti bien.
Fait intéressant
La bachelière en psychologie et ex-étudiante au certificat en arts visuels de l’Université de Sherbrooke m’a expliqué les ateliers qui se donnaient le samedi sur le campus étudiant. Elle a dessiné des corps nus pendant près de deux ans avant de se prêter au jeu. Comme elle m’a bien fait comprendre, « dessiner une pomme, tu fais le tour rapidement ». Rien ne vaut les formes et les ombres d’un corps humain. Vrai.