Par Rémi Brosseau-Fortier
Du 28 juillet au 3 août derniers, une délégation de personnes étudiantes de l’Université de Sherbrooke (UdeS) a participé à la 26e édition de la Simulation du Parlement européen Canada-Québec-Europe (SPECQUE). Se déroulant sur le campus de l’Université Laval, c’est plus de 150 personnes provenant de partout dans la francophonie qui ont pris part à la plus grande simulation francophone du Parlement européen. Voici un tour d’horizon de cette simulation peu connue au Canada.
Créée en 1998 à l’Université Laval, la SPECQUE a pour objectif de promouvoir les échanges culturels entre les divers peuples de la francophonie. La simulation est sous le haut patronage du Parlement européen (le vrai, cette fois-ci) et détient le soutien du ministère des Relations internationales et de la francophonie du Québec, d’Élections Québec et de la délégation générale Wallonie-Bruxelles au Québec pour ne nommer que quelques partenaires.
Une expérience enrichissante
Des délégations françaises, belges, canadiennes et même allemandes ont été en mesure de tisser des liens forts. Elles ont pu en apprendre davantage sur le contexte sociopolitique du Canada et des autres pays membres de l’Union européenne (UE). La délégation de l’UdeS a été en mesure de côtoyer celles de grandes universités de la francophonie : Sciences Po Lille, la Sorbonne, l’Université Catholique de Louvain, l’Université Libre de Bruxelles, le Collège d’Europe, l’Université de Münster et de nombreuses autres. L’ensemble des personnes participantes ont été en mesure d’approfondir leur compréhension des institutions fondamentales de l’UE.
Traitant de trois textes législatifs européens, les personnes participantes ont été en mesure d’incarner divers rôles : eurodéputé, chef de groupe politique, ministre, journaliste ou encore représentant d’intérêt. La Croix-Rouge, Amnesty International, Green Peace, Climate Action Network Europe et l’Observatoire de la Violence éducative ordinaire ont été les groupes d’intérêt présents pendant la simulation. Leur objectif était simple : influencer les eurodéputés ainsi que les ministres afin d’altérer les amendements proposés pour les textes législatifs et de s’allier avec des partis pour ajouter leurs propres amendements.
Trois projets de loi furent débattus : une proposition de règlement relatif à la protection des réfugiés dans l’Union européenne, une directive sur le transport ferroviaire et une communication portant sur les violences éducatives ordinaires (VEO). Ces textes furent rédigés par des Commissaires de l’UE : ce sont les représentants de la Commission européenne, l’organe exécutif notamment chargé de proposer la nouvelle législation (c’est le droit d’initiative). Néanmoins, pendant la semaine, deux institutions législatives ont été simulées : le Parlement européen et le Conseil de l’Union européenne. Ces deux institutions travaillent ensemble pour légiférer sur les propositions de textes de la Commission dans une procédure appelée la procédure législative ordinaire (ou codécision). La SPECQUE simule aussi le trilogue, la rencontre entre les diverses personnes représentantes pour négocier une version finale du texte à partir des travaux et des amendements spécifiques au Parlement et au Conseil. C’est le triangle institutionnel que forment la Commission, le Parlement européen et le Conseil de l’Union européenne.
Le Parlement européen : le cœur démocratique de l’UE
Constituant l’institution démocratique par excellence de l’UE depuis la première élection au suffrage universel en 1979, le Parlement européen est le cœur de la SPECQUE. Ce dernier a comme responsabilité de représenter les peuples des 27 États membres. Dans le cadre de la simulation, les eurodéputés sont répartis selon sept (7) groupes politiques allant de l’extrême droite à l’extrême gauche : Identité et Démocratie (ID), Conservateurs et Réformistes européens (CRE), Parti Populaire Européen (PPE), Renew Europe (RENEW), Les Verts/ALE, les Sociaux-Démocrates (S&D) et de la Gauche (The LEFT).
Les eurodéputés ont été divisés en trois commissions pour travailler sur chaque texte individuellement : la Commission des libertés civiles, de la justice et des affaires intérieures (LIBE), la Commission des transports et du tourisme (TRAN) et la Commission de la culture et de l’éducation (CULT). Chaque commission était dirigée par une présidence et avait son rapporteur ou sa rapporteuse, une personne eurodéputée chargée de produire un rapport qui présente des modifications possibles pour chaque texte en amont des négociations. Le Parlement européen fut un véritable champ de bataille où groupes politiques, personnes représentantes d’intérêts et journalistes ont eu l’occasion de débattre, de questionner et de déployer toute l’étendue de leurs habiletés oratoires pour convaincre l’autre camp !
Le Conseil de l’Union européenne : le jeu de l’intérêt national
Dans un autre esprit, les travaux du Conseil de l’Union européenne se déroulent d’une tout autre façon : le Conseil est divisé en différentes formations, la formation Justice et affaires intérieures (JAI) et la formation Transports, télécommunications et énergie (TTE). Les ministres pertinents de chaque État de l’UE siègent sur le comité correspondant et débattent dans une plus grande collégialité et une forme moins théâtrale. Le Conseil est un lieu de diplomatie où les intérêts des États et l’idéologie de chaque gouvernement sont mis de l’avant, même si ces derniers dépendent en bonne partie de leurs poids démographique et économique.
Oui oui, mais est-ce que c’est amusant la SPECQUE ?
Jusqu’à maintenant, les dimensions techniques ont été mises de l’avant. Le droit européen est une œuvre unique et très vaste. Toutefois, la SPECQUE, c’est plus que de la technique. Ce sont des gens incroyables, des sorties en groupe dans la ville hôte (le vieux Québec cette année), des galas, des festivités ou encore des débats hors simulation autour d’une thématique d’actualités telles que la place de l’UE dans l’OTAN, l’impact des médias sociaux sur les jeunes ou les lacunes de la représentation démocratique dans l’UE.
Les « specquois » et les « specquoises », comme il est coutume d’appeler les personnes participantes, ont un dicton pour décrire la SPECQUE : « On y vient pour l’expérience, on y revient pour les gens ! ». Après avoir participé à cet événement hors du commun, la délégation de l’UdeS peut confirmer que c’est bel et bien le cas. Des amitiés fortes sont forgées à travers les longues heures de négociations, la politique de corridor, le travail d’équipe sur des amendements et le travail pouvant s’étirer tard en soirée. Une chose est certaine : si vous souhaitez vivre une expérience de diplomatie internationale, multiculturelle et rencontrer des personnes inoubliables, la SPECQUE est pour vous ! Prochaine étape pour l’édition 2025 ? La capitale belge de Bruxelles, l’épicentre de l’UE.
Source: SPECQUE