Ven. Mar 29th, 2024

Par Jasmine Godbout

Le Collectif s’est penché sur la question du sport chez les élèves en mobilité réduite et ayant une déficience intellectuelle. Sonia Bourque, professeure d’éducation physique spécialisée à l’école du Touret à Sherbrooke, est la personne toute désignée pour parler d’enjeux, d’objectifs, et surtout, de l’importance de bouger. Étudiant en deuxième année du baccalauréat en enseignement en éducation physique (BEEPS) de l’Université de Sherbrooke, Zachary Pilon-Robinson, qui a récemment visité l’école en question, témoigne aussi de son expérience.

Hors de l’ordinaire

Tous les jours, Sonia enseigne l’éducation physique à chacun de ses groupes, alors que souvent, dans les écoles régulières, les élèves n’ont qu’environ deux cours par semaine; « le quotidien d’un professeur au Touret n’est jamais le même », soulève Mme Bourque. Bien que la routine soit importante pour les élèves ayant une déficience intellectuelle, les activités varient et les progrès aboutissent. En fait, l’enchaînement du cours est pareil chaque fois : salutations, échauffement, activité et retour au calme.

De plus, elle explique que « le cadre est nécessaire. Il faut savoir décortiquer la tâche, travailler le façonnement (faire le mouvement avec eux), et ce, dans le but de leur apporter de moins en moins de soutien. Pour certains, c’est d’arriver à marcher à quatre pattes et pour d’autres, c’est de pratiquer des sports collectifs, souvent adaptés à leur condition physique. »

Planification spécifique, résultats concrets

La plupart du temps, Sonia planifie ses cours sous forme d’enseignement individualisé. Chaque jeune a des objectifs spécifiques à atteindre selon ses besoins.

Elle constate des progrès régulièrement. D’ailleurs, ce qui l’a le plus marquée, c’est « d’accueillir un jeune en fauteuil roulant, puis après quelques années, de le voir marcher. Ça prend beaucoup de répétitions et de pratique pour y arriver. » Réussir des choses simples compte vraiment, comme arriver à prendre des verres d’eau et tout ce qui touche à la motricité de base (sauter, courir, marcher, ramper, lancer, attraper). Ils deviennent ainsi plus autonomes dans leur vie de tous les jours, autant pour leurs déplacements que pour le maintien et le développement d’un tonus musculaire et d’une endurance cardio-vasculaire.

Qualité et valorisation

L’enseignante diplômée du BEEPS de l’UdeS souligne : « Bien que cet emploi ne soit pas toujours facile, il me permet de travailler avec cette jeune clientèle, de l’assister dans son évolution et de vivre sa spontanéité; c’est ce que je préfère. »

Dans son parcours scolaire, elle n’a pas vraiment eu de formation en adaptation scolaire; son expérience, elle l’a acquise sur le terrain. Sonia mentionne aussi que ce qui l’a convaincue d’aller enseigner à ces élèves, c’est le dernier stage de sa formation effectué au Touret. De plus, très jeune, elle a côtoyé sa cousine ayant une déficience intellectuelle, ce qui l’a amené à apprécier ces personnes.

Satisfaite de son emploi à ce jour, l’enseignante a beaucoup appris sur elle et sur ses élèves : « J’ai développé ma patience au fil des ans, car l’évolution peut être longue. On apprend à travailler en équipe, puisque nous devons collaborer avec différents corps d’emploi (techniciens en éducation spécialisée, préposés, professionnels de la santé, etc.) L’apport de tout un chacun est important pour le cheminement des élèves.

Bénéfices véritables

Pour en venir à la question-thème, Sonia souligne que l’importance de l’activité physique chez ses élèves ne s’arrête pas aux bienfaits physiques, puisque l’aspect social à travers le sport pèse aussi dans la balance.

L’enseignante soulève que « les ressources financières et humaines sont limitées pour atteindre nos objectifs. Ainsi, ce n’est pas toujours évident de relever les défis et de contrer les difficultés. »  Heureusement, la Fondation de l’école du Touret contribue à répondre à quelques-uns de leurs besoins.

Grâce à la Fondation en partie, ils ont pu mettre à terme, en septembre dernier, le projet Je parcours ma cour, initié par des finissants de l’Université. Il consiste à permettre aux jeunes de bouger davantage dans leur cour d’école avec l’installation de nouveaux modules : « ça va permettre aux élèves de développer le grimper, le marcher, l’équilibre, tout ce qu’on pratique dans la vie de tous les jours, on va le pratiquer en modules », mentionne Mme Bourque, l’une des instigatrices du projet lors d’une entrevue à ICI Estrie.

Réflexion d’étudiant

Par ailleurs, Zachary Pilon-Robinson a rencontré l’enseignante lors d’une sortie scolaire  au Touret dans le cadre d’un cours universitaire de son programme. Au départ, « j’avais de légères craintes par rapport aux réactions imprévues que les élèves pourraient avoir simplement par le fait que je sois présent avec eux. Donc, je ne savais pas exactement comment bien me préparer », confie-t-il. Finalement, l’étudiant au BEEPS a été agréablement surpris : « Les élèves étaient tous beaucoup plus calmes que je l’avais imaginé. Ils étaient attachants et respectaient l’ensemble des consignes des enseignants presque en tout temps. »

En lien avec ces propos, Sonia Bourque conseille à ceux qui voudraient se lancer dans le métier « d’oser essayer, de ne pas avoir peur, et de voir si l’on aime ça ou pas. En observant les étudiants en visite, on voit tout de suite qui est à l’aise et qui l’est moins. Après leur visite, la plupart d’entre eux peuvent savoir si un milieu semblable les attire et s’ils ont la flamme pour devenir un professeur en éducation physique adaptée. »

Le Touret en quelques lignes

Cet établissement d’éducation spécialisée, situé sur le boulevard de l’Université, est peu connu du public : « Il faut montrer qu’on existe, souligne Mme Bourque. Âgés de 4 à 21 ans, certains élèves suivent des programmes prescrits par le ministère de l’Éducation, soit des notions de base en français et en mathématiques. C’est dans le but d’entrer sur le marché du travail ou de participer à des activités communautaires. Pour d’autres, l’apprentissage se résume à communiquer efficacement et à développer des habiletés utiles au quotidien. » 

L’école accueille des élèves ayant une déficience intellectuelle moyenne à sévère ou une déficience intellectuelle profonde. Le Touret compte 29 enseignants et enseignantes (20 titulaires et 9 spécialistes) ainsi que plusieurs préposés et éducatrices spécialisées qui s’occupent d’environ 160 élèves.

Enfin, Sonia ajoute qu’« il est nécessaire d’être ouvert d’esprit, de traiter ces élèves comme les autres, et surtout, de ne pas montrer de la pitié au premier contact. Voir leur potentiel est aussi primordial. »

Pour en savoir plus

Articles de Sonia Bourque :

Sources :


Crédit Photo @ Vincent Lambert

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