Lun. Mar 25th, 2024

Par Laurence Poulin

À la suite des événements à caractère sexuel survenus aux résidences de l’Université Laval, j’ai eu différentes réflexions face à d’autres cas qui m’avaient été exposés dans les dernières semaines, derniers mois, mais aussi à leur présentation et leur traitement dans les médias. J’ai aussi discuté avec mon entourage, mes amis et ma famille. Plusieurs facteurs entrent en ligne de compte et influencent notre compréhension de ce phénomène. Je lisais les mots de Nancy B.-Pilon, directrice de l’ouvrage collectif Sous la ceinture : unis pour vaincre la culture du viol, que cette culture du viol « peut être vue et comprise de plusieurs manières et c’est dans l’ouverture et l’échange qu’on peut prendre un pas d’avance sur elle ». Ainsi, j’ai voulu m’entretenir avec Jocelyne Faucher, vice-rectrice à la vie étudiante de l’UdeS, afin de voir avec elle le positionnement de notre Université sur ce dossier précis.

Selon elle, on n’est pas à l’abri dans aucun campus, pas plus que dans un bloc appartement. « Ça nous a amenés à constater qu’il y a des mesures qui doivent être encore plus mises de l’avant. » En plus des blocs des résidences qui sont verrouillés, les responsables de secteur (des résidents qui sont là en tout temps) ont une formation de première ligne pour intervenir ainsi qu’une formation de pair aidant pour recueillir un témoignage ou déceler un changement de comportement chez quelqu’un. « Également, il y a des activités de formation pour tous les résidents sur la vie en communauté, sur les relations interpersonnelles et on veut en faire plus. En tout temps, les résidents savent qu’il y a une panoplie de services : Service de psychologie, Services médicaux, ainsi que les différentes modalités pour rejoindre les Services de sécurité (Intercom avec bouton rouge, téléphone fixe dans chaque chambre, l’application Sécurité UdeS). Les Services de sécurité sont en fonction 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, 365 jours par année, et ce, partout sur le Campus. De plus, des agents font des rondes la nuit, toutes les deux heures, aux résidences ».

La directrice des résidences, France Mainville, planifie rencontrer les responsables de secteur pour faire un suivi plus renforcé. « Déjà associée à la campagne Sans oui, c’est non, elle désire aller plus loin et donner une formation approfondie pour les responsables de secteur pour la nouvelle application Sécurité UdeS. Elle veut parler de toute la notion de respect, de consentement dans toutes les relations interpersonnelles, et pas qu’hommes-femmes. » Ça se fera en collaboration avec Caroline Audette, la conseillère en matière de prévention de harcèlement et de discrimination de l’Université de Sherbrooke.

Au dernier conseil de la vie étudiante, il y a environ deux semaines, on a confirmé que l’on continue la pérennité du M.E.S.S.A.G.E. « En début d’année c’est un bon moment, mais c’est une question quotidienne. Les derniers événements ont aussi mis l’accent sur les initiations, et là maintenant sur les violences sexuelles en résidence, mais c’est plus que ça. C’est pour ça qu’on parle de violences, au pluriel, à caractère sexuel, ou de la culture du viol, pour englober tout le continuum. De la farce plate à l’acte criminel. Il faut se préoccuper de tout cela au quotidien et si l’on veut faire cesser, il faut faire un pas de plus. C’est pourquoi on veut travailler à l’UdeS sur la thématique des témoins. » Si dans une classe, par exemple, ou n’importe où ailleurs, on est témoin de quelque chose, il ne faut pas s’arrêter à la pression des pairs.

« Il y a eu le rapport de Geneviève Paquette de l’étude ESSIMU (que Le Collectif a abordé dans la section Campus de l’édition du 4 octobre 2016) et à partir de ces résultats, ça va aussi nous aider à cibler des actions, à être pertinent et efficace. On va toujours travailler aussi avec les experts du domaine, dont le CALACS ou encore le SHASE. Mon orientation n’est pas de multiplier sur le Campus des ressources qui existent déjà, mais d’optimiser et de travailler avec eux. On est à Sherbrooke et donc c’est facile de travailler tous en collaboration et eux ne demandent pas mieux ».

Il y a des gens qui nous demandaient, avec ce qui s’est passé à l’Université Laval, allez-vous mettre des agents de sécurité devant les résidences? Pour nous, ce n’est pas la solution. Les résidences, c’est un milieu de vie, tout comme l’ensemble du Campus.

Pour les mesures d’urgence en cas d’agressions sexuelles, il y a plusieurs protocoles. « Nos agents savent intervenir. Il faut aussi dire que dans le cadre du M.E.S.S.A.G.E., il y a environ 500 étudiants qui ont reçu une formation du CALACS, mais aussi les professionnels des Services à la vie étudiante et l’équipe de la sécurité. Ils savent comment intervenir et connaissent les protocoles ».

« Je peux te dire que malheureusement, quand tu m’as dit : ‘‘Est-ce que c’est déjà arrivé dans les résidences de l’UdeS?’’, oui, c’est déjà arrivé. Donc les protocoles sont testés et ils marchent bien. Il faut savoir qu’à Sherbrooke, comme dans d’autres villes, pour les victimes d’agressions sexuelles, peu importe où ça se passe en Estrie, c’est protocolisé. Alors il y a une salle d’urgence ouverte en tout temps au CHUS de Fleurimont, le CALACS et les services de police. À la salle d’urgence, il y a des gens de garde juste pour recevoir les victimes d’agressions sexuelles, en tout temps. »

« Si j’ai un message, c’est à la personne à qui ça arrive. Il ne faut surtout pas se sentir coupable, peu importe les circonstances dans lesquelles c’est arrivé. De le dire à une personne de confiance ou à nos personnes responsables à l’Université, dont la sécurité, au secrétariat de Faculté, peu importe, mais le dire. Et là, on va accompagner cette personne-là vers les bonnes ressources en fonction de ses besoins, sachant que les besoins vont changer. Et il faut vraiment se respecter là-dedans et ce n’est pas grave de se dire : ‘‘Oh, là je suis en train de changer d’idée, je ne sais pas ce que je veux’’, c’est entièrement normal. »

À son sens, on n’en parlera jamais assez. « Quand on nous demandait combien de cas d’agressions on rapporte, je refusais toujours d’en parler. Ce n’est pas qu’on a de gros chiffres, mais pour moi, même si on en a qu’un, c’est un de trop. Et on sait que les victimes craignent de dénoncer. On a les chiffres de celles qui ont dénoncé, mais combien de fois on ne sait pas. C’est encore plus ça qui est important ».


Crédit photo © L’Express

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