Mar. Juil 23rd, 2024

Par Pierre-Alexandre Desrosiers

J’ai eu l’occasion de visiter un pays qui n’est pas un pays connu comme une destination touristique de premier plan. À ma grande surprise, la Tunisie se révèle être une destination remplie de surprises et de découvertes intéressantes. J’ai eu le plaisir de découvrir un pays marqué par l’histoire, une diversité et une richesse culturelle incroyable, ayant eu plusieurs siècles pour se développer et pour former aujourd’hui une nation intrigante, mais ô combien accueillante, ouverte d’esprit et reconnaissante. Voici le récit de mon voyage sous plusieurs angles permettant d’en connaître davantage sur un pays dont on connaît très peu.

Histoire

La Tunisie est un pays vieux de plusieurs dizaines de milliers d’années ayant été lieux d’installations d’homo sapiens notamment à Gafsa, ville au centre de la Tunisie. Sa véritable histoire voit le jour au 9e siècle avant Jésus Christ, période à laquelle une princesse provenant de Phénicie est venue s’installer sur les collines de Carthage, jetant ainsi les bases de la Tunisie. Au fil de l’histoire, la principauté phénicienne allait devenir excessivement prospère attirant de nombreux conquérants, notamment les Perses, les Grecs, les Arabes, mais plus important encore les Romains. Sans faire un récit de l’histoire de la conquête romaine, les Romains se sont installés à Carthage et à El Jem où se situe le troisième plus gros colisée romain. Ces derniers ont fait de la Tunisie le centre névralgique de l’Afrique du Nord, mais également le centre stratégique de l’alimentation de l’Empire romain grâce à la fertilité incomparable des terres tunisiennes. C’est de cette manière que le peuple tunisien moderne est issu d’une multitude de groupes ethniques, religieux et sociaux différents ce qui fait de lui un peuple riche et ouvert d’esprit.

Politique

À partir de 2011, un mouvement a secoué le nord de l’Afrique, de Tunis au Caire, secouant même les pays du golfe Persique, faisant trembler ses institutions et soufflant un vent de révolution. Pays où une présidence était en place depuis plusieurs années, la Tunisie a, lors du printemps arabe, montré la porte de sortie au président déchu Ben Ali mettant ainsi terme à deux décennies et plus d’une ère politique. De l’extérieur, l’ensemble du mouvement soutenu par les mouvements de défense des droits de la personne, des droits démocratiques et sociaux et soutenu par l’opinion publique occidentale, les mises à pied de longs régimes ont été reçus de manière très positive.

Mais qu’en est-il de l’opinion des Tunisiens qui vivent jour après jour les impacts de ce changement? J’ai été très surpris d’apprendre que contrairement à ce que je croyais et ce que plusieurs croyaient, la situation sous Ben Ali n’était guère ce que les médias et l’opinion publique avançaient. J’ai eu l’occasion de discuter avec deux guides lors de mon voyage qui m’ont fait mention de leur déception relativement à la situation dégradante depuis le printemps arabe, situation qui a causé une crise économique majeure au pays, une crise de l’emploi, une crise immobilière et autres problèmes comme la grève des éboueurs qui a causé une malpropreté répandue sur le territoire tunisien. La situation politique stagne depuis 2011 laissant le pays dans l’incertitude quant à leur avenir et laissant peu de place à l’espoir de voir la situation s’améliorer.

J’ai cru comprendre au fil de nos discussions que le printemps arabe a eu pour effet de brouiller l’opinion publique tunisienne. Les régimes plus répressifs de la Libye, de l’Égypte ou encore du Yémen ont imprégné la pensée populaire et renforcé l’idée selon laquelle la situation tunisienne était plus catastrophique qu’elle l’était réellement. Avec ce que j’ai vu, j’ai tendance à croire le récit d’Abel et de Selim, mais ce ne sont que les récits de deux hommes au sein d’une population de plus de 11 millions de Tunisiens et Tunisiennes.

Économie

L’économie de la Tunisie repose principalement sur l’exploitation de culture de palmiers dattiers, d’oliviers et de fruits comme les pêches, les pastèques, les mangues et autres. En plus des cultures, l’élevage de chèvres représente la principale pratique en terme d’élevage de troupeaux. De manière parallèle à ces pratiques, le tourisme joue, à ma grande surprise, un rôle extrêmement important en Tunisie, pays hôte de plusieurs sites protégés de l’UNESCO ainsi que de stations balnéaires, et jouit de paysages époustouflants. Bien entendu, mon expérience en Tunisie me permet de parler plus de ce dernier domaine que les deux premiers. On me raconte un pays attirant les foules de touristes de partout dans le monde tant pour sa richesse historique que pour ses côtes méditerranéennes et sa mer d’un bleu azur. Depuis 2011 et selon ce que j’ai vu, l’état du tourisme s’est grandement détérioré et en particulier à Yasmine-Hammamet, lieu de mon hôtel, où les hôtels fermés ou pratiquement vides se multiplient et laissent place à des édifices fantômes et sans vie. Quand j’ai posé la question à Abel, l’expression sur son visage valait mille mots. J’ai vu dans ses yeux la déception et la tristesse de voir son pays qu’il aime tant croupir lentement sous les contrecoups de la révolution de 2011. L’industrie touristique bat de l’aile et peine à se relever, quel dommage pour un pays qui en a tant à offrir.

Expérience personnelle

Je ne peux pas dire avoir vécu une expérience qui m’a laissé indifférent, ce serait mentir. Bien entendu, la population de la Tunisie vit différemment, mais là n’est pas le point : qu’un pays autrefois prospère avec tant à offrir puisse en arriver là, c’est désolant. J’ai été charmé par les paysages, par les gens qui sont tellement fiers et heureux d’être Tunisiens, fiers de leur histoire, de leurs terres, de leur culture. Les paysages m’ont laissé bouche bée, que ce soit le village de Sidi Bou Saïd, village aux airs de Santorini en Grèce, la contemplation d’un désert de sable à perte de vue et l’occasion d’y parcourir quelques kilomètres à dos de chameau, les montagnes de l’ouest sculptées par une mer couvrant jadis le territoire et ses oasis denses de vie végétale, ce sont des vues impressionnantes et d’une beauté incroyable. Bien entendu, la situation politique, économique et sociale est difficile, certes. Mais les gens sont réellement convaincus que de meilleurs jours sont à leurs portes et que les choses vont s’améliorer. Je ne peux qu’espérer revenir d’ici quelques années pour voir la situation s’être placée et améliorée, pour le peuple résilient qui a passé au travers d’épreuves difficiles et pour un pays qui vit dans l’ombre de sa prospérité d’autrefois.


Crédit Photo @ Alexandre Desrosiers

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