Lun. Mar 25th, 2024

Par Carolanne Boileau

Au Québec, le système d’éducation est desservi par un secteur public et un secteur privé. Selon les statistiques du ministère de l’Éducation du Québec, les élèves qui fréquentent un établissement d’enseignement privé représentent 20,5 % des élèves au niveau primaire et secondaire. C’est environ 121800 élèves sur un total approximatif de 593700. En plus des frais d’inscription chargés aux parents, les établissements d’enseignement privé reçoivent des subventions publiques pour offrir les services éducatifs.

Depuis plusieurs années, la question du financement public des écoles privées cause de nombreux débats au sein de la société québécoise. Lorsque l’on aborde cet enjeu, il existe principalement deux positions. La première, partagée par les trois quarts de la population québécoise selon un sondage effectué en 2018, est que l’on devrait retirer complètement les subventions offertes aux écoles privées. La deuxième concerne plutôt les personnes en faveur du financement public.

Cependant, cela représente un faux dilemme puisqu’il existe d’autres pistes de solutions pour contrer les problèmes engendrés par un système d’éducation à trois vitesses. Une autre avenue, proposée par le mouvement École ensemble, mérite d’être étudiée. Le mouvement propose d’instaurer un réseau commun d’écoles privées et publiques entièrement subventionné par l’État.

Un réseau d’écoles commun

Selon un rapport du Conseil supérieur de l’éducation (CSE) publié en 2016, dans sa forme actuelle, le système d’éducation québécois est le plus inéquitable au Canada. En effet, la combinaison d’écoles privées, de programmes particuliers sélectifs au sein des écoles publiques et le programme régulier offert aux plus grands nombres causent une ségrégation sociale au sein du système scolaire québécois. Cette sélection, qui se fait au sein des écoles privées et des programmes particuliers, fait en sorte que les élèves en difficulté se retrouvent concentrés dans les classes ordinaires. Un fardeau qui est difficilement soutenable pour les écoles offrant des programmes réguliers.

Pour remédier à la situation, le mouvement École ensemble, fondé en 2017 par des parents d’élèves, propose une solution intéressante. En 2022, l’organisme a déposé un plan permettant de réformer en profondeur le système d’éducation pour le rendre plus équitable. La solution ? Créer un réseau commun d’écoles privées et publiques accessible à tous, puisqu’il n’y aurait plus de frais d’inscription ni de sélection en fonction des performances des élèves. Le financement de ces écoles serait entièrement assumé par Québec et toutes les écoles offriraient un libre-choix de parcours particuliers aux élèves. Stéphane Vigneault, coordonnateur du mouvement École ensemble, défend cette proposition en mentionnant : « Tout cet enjeu de compétition, de stratégie parentale pour choisir la “ bonne école ”, éviter la “ mauvaise école ”, on simplifie tout ça, on simplifie la vie des parents, les enfants vont à leur école, elle est gratuite, elle est diversifiée » lors d’une entrevue avec Radio-Canada.

Offrir un réseau commun d’écoles privées et publiques permet donc aux élèves d’avoir une plus grande égalité des chances. Présentement, le système tel qu’on le connait fait en sorte que les élèves accèdent à une qualité d’éducation différente en fonction des moyens financiers de leurs parents. Une situation qui est totalement inacceptable. En subventionnant en totalité les écoles privées, le gouvernement du Québec s’assure qu’un enfant issu d’une famille bénéficiant d’un revenu plus modeste ne se voit pas refuser l’entrée à l’école de son choix. Comme mentionné par Stéphane Vigneault à Radio-Canada, les écoles privées conventionnées conserveraient leur statut juridique et leur autonomie de gestion. Elles ne pourraient tout simplement plus faire d’admissions sélectives et leur accès serait sans frais pour les élèves souhaitant y étudier.

Une réussite en Finlande

Inspiré de la Finlande, ce système a démontré des résultats très positifs depuis son intégration dans les années 1970. Se plaçant comme exemple de réussite en la matière, la Finlande a démontré qu’un réseau commun d’éducation avait des répercussions positives sur les résultats académiques des élèves. Au moment de la réforme, l’excellence académique n’était pas une priorité, mais s’est finalement avérée être une retombée positive. Lors de la première enquête PISA menée en 2001, les résultats « ont confirmé que la Finlande — contrairement à des pays très similaires comme la Norvège — produisait de l’excellence scolaire grâce à l’accent mis sur l’équité dans sa politique ».

Ces résultats démontrent donc qu’un réseau commun d’éducation permet aux élèves d’obtenir de meilleurs résultats scolaires et de se dépasser. L’effet positif sur le taux de réussite figurait également parmi les arguments de l’organisme École ensemble. Selon Claude Lessard, ancien président du CSE et actuellement président du mouvement, les recherches ont démontré que « plus les classes sont diversifiées, plus les taux de réussite augmentent » rapporte Le Journal de Québec. Cela démontre donc que, contrairement à la croyance populaire selon laquelle des élèves en difficulté peuvent nuire aux élèves plus forts académiquement, c’est plutôt l’inverse qui se produit. Le fait d’avoir des classes plus diversifiées, et donc équitables stimule la réussite académique.

La nécessité d’un système plus équitable

Les nombreux débats sur les subventions publiques aux écoles privées ont permis d’étudier le sujet et d’offrir différentes pistes de solution. La position du mouvement École ensemble démontre qu’il est parfois pertinent de sortir des sentiers battus pour trouver des solutions aux enjeux de société tels que celui-ci. Les études ont démontré que le financement actuel des écoles privées est problématique et que le système d’éducation à trois vitesses fait du système d’éducation québécois le plus inégalitaire au Canada.

Pour remédier à la situation, il est fondamental de réformer le système d’éducation en créant un réseau commun d’écoles privées et publiques. Les répercussions positives d’un tel système sont nombreuses et en harmonie avec les valeurs du Québec : l’équité et l’égalité des chances. Il est donc primordial que ces valeurs se reflètent au sein de nos écoles puisque ce sont elles qui forgent les citoyens de demain. Permettre à un enfant d’accéder à l’école de son choix, peu importe sa situation financière ou académique, est le plus beau cadeau que l’on puisse se faire en tant que société moderne.


Crédit image @Pixabay

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