Mer. Mar 27th, 2024

Par Cesar C.Costa

Je dédicace ce texte à mon psychiatre François-Xavier Dion, à ma psychothérapeute Marise Roy, au personnel qui travaille à la Cordée et aux résidences universitaires de l’Université de Sherbrooke.

La Cordée (ressource alternative en santé mentale) a besoin de financement pour pouvoir maintenir toutes ses activités.

J’hésite beaucoup à me pencher sur ma santé mentale en ce moment, car cela m’oblige à revivre mes douleurs. Néanmoins, dans les recoins les plus sombres de mon âme, là où la vérité de mes émotions et de mes pensées les plus troublantes frémit, émerge un désir irrésistible d’en parler dans le but de souligner ma relation fructueuse avec la Cordée.

J’aimerais bien, à travers mon témoignage, pouvoir dire que la Cordée est digne de continuer à exister, qu’elle est honorable, qu’elle est indispensable au sein de notre communauté.

Un bref portrait de sa mission

Installée dans une grande maison de deux étages, située au 365, rue Dufferin à Sherbrooke, la Cordée accueille, notamment, les personnes atteintes d’un problème de santé mentale dans les horaires réguliers de travail au cours de la semaine.

Une partie importante de sa mission consiste à offrir à ses membres un support sociopsychologique à travers des activités alternatives à caractère thérapeutique. Cela comprend des cours de peinture, la pratique du chant, des ateliers de théâtre et autres activités qui se renouvèlent constamment selon le besoin des membres et le budget disponible. Plusieurs de ces activités sont conçues et données par les membres eux-mêmes.

Ce que j’aime le plus à la Cordée, c’est d’échanger avec les autres membres sur des sujets légers du quotidien tels que la météo ou ce qu’on a fait d’intéressant dans la journée. On y est très souvent de bonne humeur. On trouve toujours des facettes comiques en nous ou dans notre environnement, en fait, souvent, on rit de tout et de rien.

Et lorsque je traverse des périodes turbulentes, quand j’ai des inquiétudes qui tournent sans cesse dans ma tête ou quand je suis aux prises avec de la tristesse ou des colères insoutenables, quand ma fatigue vient paralyser mes actions, dans ces moments-là, je sais qu’il y aura des intervenants et des bénévoles sur place prêts à m’écouter avec une empathie sincère et personnelle.

En vérité, je n’ai jamais été délaissé dans cet endroit qui m’inspire la confiance, l’entraide et l’amitié profonde.

Amour à première vue

J’ai découvert la Cordée en 2012, environ deux ou trois ans après avoir été diagnostiqué bipolaire à Sherbrooke. C’était mon psychiatre d’alors qui me l’a conseillée.

À la suite de cela, ma travailleuse sociale au CHUS m’a guidé dans la démarche pour devenir membre. Lors de ce grand jour, j’étais si heureux d’avoir enfin la chance d’être en relation avec d’autres personnes ayant une problématique semblable à la mienne. J’entrevoyais enfin une porte pour sortir de mon isolement social, voire de ma solitude de me retrouver aux prises avec un trouble aux multiples facettes, si mystérieux à mes yeux.

Avant de faire partie de la Cordée, je n’avais pas assez d’outils pour gérer mieux les symptômes de ma maladie et de mon anxiété aiguës. J’avais souvent la certitude que je ne serais plus capable de vivre à cause de mes souffrances psychiques, même si je suivais déjà un bon traitement psychiatrique à Sherbrooke.

Sans espoir, je pleurais souvent dans ma chambre, incapable de nommer une douleur terrible au fond de mon cœur. J’avais aussi beaucoup de difficulté à vivre avec une peur disproportionnée de faire face à la vie. Graduellement, j’étais en train de limiter les sorties de chez moi. J’évitais le plus possible de prendre l’autobus et de croiser les ponts de la ville, car tout cela me causait une peur exacerbée, voire la panique.

L’amour, le plus puissant des médicaments

Je me souviens d’un de mes premiers jours à la Cordée en tant que membre. Je me retrouvais assis autour d’une table avec quelques hommes et des femmes dans la quarantaine, peut-être. Ils m’ont reçu avec des sourires accueillants et d’emblée, je me suis senti aimé et accepté.

En apprenant à mieux les connaître au fils du temps, j’ai vu grandir en moi un sentiment d’appartenance et de sécurité si important pour moi, considérant que j’avais immigré du Brésil pour le Québec en 2008.

Enfin, au sein de la Cordée, je me sentais chez moi. Cela venait combler mon sentiment d’être déraciné et pris en otage par un corps sans peau, c’est-à-dire trop sensible pour supporter les adversités de la vie.

Est-ce que je suis rendu?

La Cordée ne m’a jamais promis de guérir aucun de mes maux, mais elle m’a donné envie de continuer à vivre malgré les difficultés et surtout de résister aux tentations de la drogue ou de l’alcool qui m’ont affecté dans le passé.

La Cordée m’a rempli d’un nouvel espoir qui n’est pas toujours là quand j’en ai besoin, mais qui m’inspire à aller explorer les forces insoupçonnées de ma personnalité, de mon être, là où je trouve la persévérance de continuer à marcher dans les ténèbres jusqu’à ce que je reprenne le fil de la vie, la lumière.

J’aimerais bien ajouter que depuis quelque temps, je me sens plus en paix avec tout ce que je porte de troublant en moi. Des fois, je crois que dans mes phases les plus extrêmes, quand j’ai cru être en contact avec Dieu, je vivais l’angoisse que mon identité disparaisse peu à peu. En effet, je pense que ce sont des expériences comme cela qui m’ont appris à remettre en question tout ce qui se présente à moi comme étant réel, comme étant la définition de ce que je suis ou de ce que je pourrai être dans ce monde.

Dorénavant, je suis plutôt enclin à faire confiance à ma voix intérieure et à sa lumière, à aller sonder mes profondeurs, à aller investiguer en moi-même quels sont mes besoins et qui je suis véritablement au milieu du chaos fulgurant de mon identité morcelée, mon cadeau sublime.


Crédit Photo @ La Cordée, http://www.lacordeerasm.org/

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