Mer. Avr 17th, 2024

Par Victor Dionne

Le lundi 20 septembre 2021, les Canadiennes et les Canadiens étaient invités à se présenter aux urnes pour élire le gouvernement fédéral. Participant à l’exercice démocratique le plus populaire de tous, ils ont décidé de continuer avec le gouvernement libéral de Justin Trudeau pour un troisième mandat. En date du 22 septembre (votes postaux encore en décompte), ils combleront au moins 150 sièges à la Chambre des communes, devant le Parti conservateur (117 sièges), le Bloc Québécois (32 sièges), le Parti néodémocrate (24 sièges) et le Parti vert (2 sièges). M. Trudeau sera donc à la tête d’un gouvernement minoritaire, puisqu’il fallait qu’il atteigne 170 sièges pour obtenir la majorité absolue.

Ces résultats rappellent ceux de 2019, où les libéraux avaient fait élire 157 députés, et les conservateurs d’Andrew Scheer, 121. Le vote populaire était aussi plus fort du côté de l’opposition, tout comme cette année. Si l’on considère ces chiffres, certaines questions peuvent venir à l’esprit. Était-ce nécessaire de déclencher des élections de plus de 600 millions en temps de pandémie? Est-ce qu’avoir un vote populaire plus fort pour le parti d’opposition montre encore une fois des problèmes en lien avec notre mode de scrutin? La Professeure Isabelle Lacroix, Vice-doyenne au développement et à l’international et experte en politique canadienne et québécoise a pris un moment pour répondre à nos questions suite aux résultats de la soirée électorale.

Des élections inutiles?

Dès le 15 août, jour où M. Trudeau est allé rendre visite à la gouverneure générale pour lui demander la dissolution du parlement, les critiques concernant le déclenchement de la campagne électorale et les éventuelles élections sont apparues dans les différents médias. Que ce soit Erin O’Toole, chef du Parti conservateur, ou Yves-François Blanchet, chef du Bloc Québécois, l’opposition martelait que le gouvernement libéral agissait « pour des gains politiques » et le traitait d’« irresponsable ». Même lors des débats des chefs diffusés sur les différentes chaînes de télévisions et médias sociaux, la question revenait : « mais M. Trudeau, pourquoi avez-vous déclenché ces élections? »

Pourquoi ces élections? Qu’est-ce que les libéraux avaient à gagner? Ce sont d’excellentes questions. Pre Lacroix répond en mentionnant que le but était « clairement d’aller chercher une majorité, il n’y a pas de doute. On sait comment notre système fonctionne, on sait que c’est plus difficile de gouverner avec un gouvernement minoritaire. Ça rend chaque décision plus difficilement négociable. » M. Trudeau voulait pouvoir diriger avec plus de flexibilité, lui permettant d’avoir un gouvernement plus efficace.

Ce point n’est toutefois pas la seule raison pour le déclenchement des élections. Pre Lacroix mentionne qu’« ils devaient aller se chercher une légitimité pour devoir continuer ce qu’ils ont à faire au niveau de la pandémie, au niveau de la relance économique » puisque le contexte de 2019 était « vraiment à des années-lumière du contexte actuel. »

Elle précise aussi qu’elle « n’adhère pas au discours très cynique qui dit qu’on a dépensé de l’argent pour rien puisqu’on revient au même point. »

Un mode de scrutin qui fait encore des siennes

Une autre donnée est frappante à la suite des résultats du scrutin : le pourcentage du vote populaire est plus élevé du côté de l’opposition officielle que de celui du nouveau gouvernement. En effet, le parti de M. O’Toole a obtenu près de 34 % des voix, soit près de 2 % de plus que les libéraux. Ce phénomène est semblable à 2019. Les conservateurs d’Andrew Scheer avaient aussi gagné le vote populaire de plus de 1 % devant le parti au pouvoir. Cette distorsion entre le nombre de sièges obtenus au parlement et le vote populaire est une des critiques les plus importantes envers le mode de scrutin uninominal à un tour (mode de scrutin canadien).

Plusieurs fois sous les projecteurs médiatiques, la réforme du mode de scrutin n’a jamais abouti. Pre Lacroix reconnaît bien qu’il y a problème avec ce dernier : « Mais est-ce que la distorsion et ses écarts sont révélateurs du principal problème de notre système électoral? Bien sûr, bien sûr il n’y a pas de doute. » Par contre elle adopte une approche plutôt nuancée en fonction du contexte actuel : « Dans des contextes de forte polarisation, je pense que je préfère notre système à un système proportionnel qui donne un accès beaucoup plus facile au parlement à des positions extrêmes. […] ce que ça veut dire c’est que vont se retrouver au parlement des positions très radicales qui rejoignent une petite partie de la population, une minorité, mais à qui on va donner une forte voix. »

Et quels seront les enjeux des prochaines années?

Plusieurs défis et enjeux majeurs seront à relever par le gouvernement libéral de M. Trudeau durant les quatre prochaines années (ou moins). Mais certains vont retenir évidemment l’attention plus que d’autres.

Pre Lacroix en compte trois qui devront être traités avec importance capitale : la pandémie, la relance économique et l’environnement. En ce qui concerne le premier, elle mentionne que son expertise n’est pas en santé publique, mais que selon ce qu’elle comprend, « c’est que ça [la pandémie] ne va pas disparaitre et il va falloir la gérer. » Pour le deuxième, l’experte en politique canadienne s’entend pour dire que le Canada est « dans une situation économique difficile » et qu’il faudra s’en occuper. Puis, pour le troisième, elle considère que l’environnement est un « incontournable », puisque « ça affecte notre développement économique, ça affecte notre développement social » et bien sûr, plusieurs autres sphères en lien avec notre qualité de vie.


Source photo : Uello

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