Par Elizabeth Gagné

L’année 2025 a déjà été éprouvante pour les musées en Estrie. Après l’annonce du gouvernement mettant fin au financement des premiers dimanches du mois, des milliers de foyers qui bénéficiaient de cette mesure ne pourront plus fréquenter ces établissements culturels et éducatifs gratuitement.
En plus des nombreuses coupes budgétaires qui ont affecté notamment les sorties scolaires culturelles et les cohortes en francisation, plusieurs programmes d’aide aux projets ont également dû fermer. Malheureusement, l’année 2026 ne s’annonce pas plus joyeuse pour les musées de la région.
Dans une lettre ouverte adressée aux médias, envoyée le 10 décembre, les musées ont voulu partager leur inquiétude à la suite de l’annonce du ministre de la Culture et des Communications concernant leur réponse de financement 2025 ainsi que les projections pour les années 2026 et 2027.
« Les inquiétudes exprimées depuis le début de l’année se confirment : malgré certains ajustements, les montants annoncés demeurent bien en deçà des besoins réels. Le milieu muséal, déjà fragilisé par un sous-financement public chronique, accuse un profond désarroi. »
Une aide temporaire qui n’a pas réglé le problème
Les nombreuses coupures de la dernière année ont fragilisé les musées du Québec, qui devaient déjà jongler avec l’augmentation élevée du coût de la vie, laquelle a affecté « le transport, les matériaux, la production d’expositions, la rétention des ressources humaines ainsi que les coûts fixes croissants liés aux bâtiments », peut-on lire dans la lettre. Pour faire face aux défis de cette année, le gouvernement avait exceptionnellement aidé temporairement le réseau muséal, ce qui a permis d’éponger partiellement ces dépenses additionnelles. Cette mesure a pourtant pris fin, malgré le fait que les coûts restent élevés. Désormais, les musées doivent absorber seuls l’ensemble de ces hausses, accentuant encore l’écart entre les besoins réels et le financement octroyé.
« La moyenne des augmentations de l’aide financière dans la région vacille autour de 10 %, mais pour certains musées, la variation est de l’ordre de 2 % et donc ne couvre aucunement l’inflation, sans compter les nouveaux musées agréés en 2024 qui ne recevront aucun financement. Dans tous les cas, même pour ceux ayant reçu un pourcentage plus élevé, la somme reçue ne répond pas aux besoins réels et essentiels liés à la mission. »
L’importance d’avoir des musées en santé
La diffusion de la culture est importante pour le bien-être de la société. Elle permet d’enrichir notre compréhension de celle-ci, de stimuler la créativité et l’innovation, de renforcer nos liens sociaux, de transmettre nos valeurs et bien plus encore. Les musées régionaux participent donc à cet écosystème culturel et patrimonial. Leur rôle est primordial pour la préservation, la diffusion et la transmission de cette culture. « C’est un outil essentiel à l’éducation et à la démocratisation des savoirs. »
« Les musées régionaux enracinent la culture dans la vie quotidienne, au cœur des communautés. Ils sont des lieux de partage, de création, de mémoire, d’épanouissement, de bien-être, de liens sociaux et d’accueil pour les jeunes, les familles, les nouveaux arrivants et le grand public. Ils font vivre notre histoire autant qu’ils stimulent l’avenir. Ils contribuent à renforcer la culture nationale et à la démarquer de celle omnipotente de notre voisin du Sud. »
La diversité de l’offre des musées en Estrie témoigne de sa valeur intrinsèque pour notre communauté. Plus qu’une offre culturelle, les musées contribuent également à l’économie locale. « En 2019, on évaluait leurs retombées économiques à plus de 54,3 M$ dans la région touristique des Cantons-de-l’Est. Preuve que l’investissement culturel est aussi un investissement économique et humain. »
Plus de concret demandé
Les réseaux muséaux ne cessent de se réinventer, d’innover et de s’adapter. Ils sont soucieux de leur environnement et des enjeux contemporains, essayant ainsi d’offrir toujours une offre pertinente répondant aux besoins de la communauté. Malgré le fait que les musées estriens ne cessent de faire plus avec moins, il y aura toujours une limite à ce qu’ils peuvent accomplir.
Dans la lettre ouverte, les musées de la région ont également fait part de l’espoir ressenti lorsque le gouvernement avait annoncé, lors du dépôt budgétaire, que l’année 2026 serait l’année des musées. En revanche, cette lueur d’espoir s’est vite éteinte.
« Nous y avions vu une ouverture et un espoir. Mais 2025 n’en fut pas une et les investissements annoncés ne confirment pas cette volonté. Et nos institutions n’ont plus la capacité d’attendre. »
Les musées de la région demandent des mesures concrètes, des engagements tangibles et un avenir muséal qui reposerait sur un soutien réel, durable et à la hauteur de leur contribution. Ils demandent donc au gouvernement du Québec et au ministère de la Culture et des Communications un financement rehaussé et stable, permettant une planification pluriannuelle et durable ; la reconnaissance du rôle stratégique des musées régionaux dans l’écosystème culturel, social, scientifique et économique québécois, et une accélération des investissements promis, afin d’éviter l’effondrement d’institutions essentielles.
Source : Musée d’histoire de Sherbrooke

Elizabeth Gagné
Étudiante à la maîtrise en histoire, Elizabeth a toujours été passionnée par les arts et la culture. Travaillant de pair avec ses collègues depuis 2022 à promouvoir le programme des Passeurs culturels à la faculté d’éducation, elle travaille également depuis un an au Centre culturel de l’Université de Sherbrooke. Intriguée par tout ce qui nous rend profondément humains, elle souhaite élargir et approfondir le sens de la culture en proposant des articles parfois hors normes.
