La présidente péruvienne Dina Boluarte destituée par le Parlement 

Par Grégoire Bouley

Une manifestation anti Dina Boluarte en mars 2025 montre une manifestante avec une pancarte « Asesina » (Meurtrière).

Dans la nuit de jeudi à vendredi dernier, le Pérou a vécu un nouveau séisme politique avec la destitution de sa présidente, Dina Boluarte. Par un vote massif de 122 voix favorables sur un total de 130, le Parlement a mis fin à son mandat, invoquant son « incapacité morale et permanente ». 

Cette décision représente un tournant important pour le pays, qui a connu une instabilité politique chronique ces dernières années. 

Une destitution sans appel 

Ayant pris les rênes du pays en décembre 2022, Dina Boluarte a fait son entrée dans l’histoire en devenant la première présidente du Pérou, succédant ainsi à Pedro Castillo après sa destitution et son arrestation. Son mandat a été marqué par une vive opposition populaire et par de nombreuses polémiques. Après avoir survécu à sept tentatives de destitution, elle a finalement cédé face à la pression croissante du Parlement. 

Les principaux groupes politiques qui l’avaient jusque-là soutenue, notamment l’Alianza para el Progreso (Alliance pour le Progrès) et Renovación Popular (Rénovation populaire), formations issues de la droite et de l’extrême droite, ont cette fois choisi de voter en faveur de la motion. Leur revirement a scellé le sort de la présidente. 

Une succession constitutionnelle 

Selon la Constitution péruvienne, en l’absence de vice-président en fonction, la présidence de la République revient au président du Parlement. C’est ainsi que José Jeri, élu à ce poste en juillet dernier et membre du parti de centre-droit Somos Perú (Nous sommes le Pérou), a été désigné pour assurer l’intérim. 

« Aujourd’hui, j’assume avec humilité la présidence de la République, par succession constitutionnelle, afin de mettre en place et diriger un gouvernement de transition », a déclaré le nouveau chef de l’État. Son mandat doit courir jusqu’au 26 juillet 2026, date initialement prévue pour la fin du quinquennat présidentiel. 

Dès ses premières paroles, il a voulu marquer une rupture en plaçant la sécurité au cœur de son action : « L’ennemi principal […] ce sont les bandes et organisations criminelles. Ce sont aujourd’hui nos ennemis, et en tant que tels, nous devons leur déclarer la guerre. » 

Un mandat marqué par les scandales 

L’ex-présidente sort affaiblie non seulement politiquement, mais aussi judiciairement. Sa destitution l’expose désormais à plusieurs procédures judiciaires, puisqu’elle perd son immunité présidentielle. Dina Boluarte pourrait ainsi être poursuivie dans des affaires de corruption et de fausses déclarations, notamment le fameux « Rolexgate », où elle est accusée d’avoir dissimulé la possession de montres et bijoux de luxe non déclarés, en violation de la loi. 

Son mandat a par ailleurs été assombri par la répression sanglante des manifestations de 2022 et 2023, qui avaient fait plus d’une cinquantaine de morts. Cet épisode tragique a durablement terni son image et accentué son impopularité, alors que le pays traversait une grave crise sociale et économique. 

Une instabilité chronique au Pérou 

Ce récent évènement politique confirme malheureusement l’instabilité politique chronique du Pérou. En deux décennies, il a connu la destitution, la poursuite judiciaire ou la démission de nombreux présidents. La classe politique, rongée par la corruption et les divisions partisanes, ne parvient pas à regagner la confiance de la population. 

L’arrivée au pouvoir de José Jeri s’inscrit dans la continuité de crises à répétition. Ses principaux objectifs sont de restaurer la stabilité politique et de répondre aux préoccupations des Péruviens en matière de sécurité. Cependant, sa légitimité reste fragile, car il n’a pas été élu directement par le peuple. 

Le départ de Dina Boluarte au Pérou met en évidence la fragilité des institutions et la difficulté pour le pays de résoudre ses divisions. Il reste à voir si ce nouvel intermédiaire réussira à rétablir un climat apaisé ou si le pays basculera dans un nouveau tourbillon politique. 


Source : Getty Images

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