Manifestations sociales par la jeunesse malgache 

Par Grégoire Bouley

Un manifestant brandit une pancarte « Gen Z » avec le symbole tiré de One Piece, le 27 septembre dernier. 

Depuis le 25 septembre, Madagascar est secoué par un mouvement de contestation d’une ampleur inédite. La jeunesse malgache, surnommée la « Gen Z », est descendue massivement dans les rues pour dénoncer la corruption, les coupures incessantes d’eau et d’électricité, ainsi que la pauvreté persistante qui frappe durement la population.  

Ce soulèvement a été réprimé dans la violence par les forces de sécurité. Selon le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme, au moins 22 personnes auraient perdu la vie, parmi lesquelles des manifestants, mais également des passants. Le gouvernement malgache conteste toutefois ce bilan. 

La colère de la « Gen Z » 

Inspiré par les mobilisations similaires au Népal et au Maroc, le mouvement baptisé « Gen Z » s’est installé au cœur de la capitale malgache, Antananarivo. Majoritairement porté par des jeunes, les manifestations ont débuté par l’expression d’un ras-le-bol face aux conditions de vie jugées insoutenables : pauvreté endémique, accès limité à l’eau potable, coupures régulières d’électricité et infrastructures défaillantes. Très vite, les slogans brandis dans les rues ont traduit l’ampleur du désespoir : « Nous voulons vivre, pas survivre ». À ces revendications sociales s’est ajoutée une exigence politique claire : la lutte contre la corruption et le départ du président Andry Rajoelina, accusé de ne pas répondre aux attentes de la population. 

Un gouvernement limogé 

Face à la pression croissante de la rue, le président Rajoelina a annoncé le limogeage de l’ensemble du gouvernement. Dans une allocution télévisée, il a invoqué l’article 54 de la Constitution : « J’ai décidé de mettre fin aux fonctions du Premier ministre et du gouvernement ». Le chef de l’État a appelé les personnes « incorruptibles » à soumettre leur candidature, promettant la formation d’une nouvelle équipe resserrée et plus efficace. 

Rajoelina a tenté d’apaiser les tensions en exprimant publiquement ses excuses : « Je comprends la colère, la tristesse et les difficultés causées par les coupures de courant et les problèmes d’approvisionnement en eau. Vos revendications ont été entendues, et je m’excuse si certains membres du gouvernement n’ont pas accompli le travail attendu par la population. » Le président a également affirmé vouloir créer un espace de dialogue avec la jeunesse. 

Une contestation qui s’amplifie 

Cependant, les manifestations se poursuivent, toujours plus nombreuses et déterminées, illustrant le profond malaise d’un pays parmi les plus pauvres au monde. Les jeunes mobilisés ne se contentent plus de promesses ; ils réclament des changements concrets et immédiats dans la gouvernance du pays. 

La répression, marquée par des affrontements violents et des tirs à balles réelles selon plusieurs témoins, a choqué l’opinion publique. Les soutiens internationaux se multiplient, notamment dans les pays qui ont récemment connu des mouvements similaires. Sur les réseaux sociaux, le symbole choisi par les contestataires circule partout : un drapeau pirate inspiré de la série animée japonaise One Piece, devenu l’emblème d’une jeunesse en quête de liberté et de justice. 

Une crise politique majeure 

Les événements de Madagascar révèlent une fracture entre une génération qui aspire à un avenir meilleur et un pouvoir accusé d’être stagnant et corrompu. Si le président tente de reprendre la main en renouvelant son gouvernement et en promettant le dialogue, la méfiance reste entière. Pour beaucoup, ces annonces apparaissent comme trop tardives face à la gravité de la crise. 


Source : Getty Images

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