Par Corentin Messina

Une affiche installée sur le toit d’un bâtiment au centre-ville de Sherbrooke, il y a quelques semaines, a suscité des réactions concernant la religion et la place de Jésus dans l’espace public. Cette publicité nous rappelle que nous vivons dans une société pluraliste et laïque.
Quelques heures après la découverte de la publicité, la conseillère municipales Hélène Dauphinais s’est entretenue avec Anne Préfontaine à la radio 107.7. La conseillère a été claire : l’affichage est légal.
Aussi inconfortable que cette réponse puisse être pour certaines personnes, elle a raison. La libre circulation des idées est un droit protégé par la Charte. La Cour d’appel du Québec l’a notamment démontré avec son jugement Congrégation des témoins de Jéhovah de Blainville (North) c. Ville de Blainville.
Saluons par ailleurs cette intervention médiatique qui a pris la peine de se renseigner sur le mouvement responsable de cette publicité et de ne pas avoir polarisé le débat autour de la présence d’une pancarte portant un message religieux.
Il faut garder en tête que le groupe à l’origine de cette l’affiche ne représente pas tous les chrétiens protestants, tout comme il faut garder en tête qu’un droit est un droit pour tous.
Ainsi, malgré qu’il provienne d’un mouvement hétérodoxe, le groupe en question a donc la liberté de diffuser son message.
Que l’on aime ou non cette affiche, elle respecte la Loi sur la laïcité de l’État. Enlever celle-ci trahirait en soit le principe même de la loi. La laïcité existe pour protéger l’État de la religion et la religion de l’État, elle ne vise pas à invisibiliser l’espace public ni les groupes, ni les individus qui font société ensemble.
Vers une diversité religieuse émergente
Alors que les générations précédentes ont rejeté toute expression ou forme religieuse, la jeunesse semble connaître un nouvel éveil spirituel.
Le catholicisme recule, l’islam progresse et le christianisme non catholique, notamment le protestantisme évangélique, connaît un regain. Un phénomène non surprenant considérant l’historique de la région. À l’époque des Cantons de l’Est, avant l’arrivée des catholiques, les premières églises étaient protestantes évangéliques.
Selon un sondage du Verbe médias et de Léger, 66 % des 18-34 ans en quête de sens estiment que la foi chrétienne peut y répondre. Dans le Grand Sherbrooke, 8,3 % de la population s’identifiait en 2021 à une tradition chrétienne autre que le catholicisme, contre 5,9 % en 2011.
Le fait demeure, malgré les réticences de certains, que la religion a fait et fera toujours partie de nos sociétés. Cette affiche représente plus qu’une simple publicité. Elle rappelle que la laïcité n’implique pas l’effacement, dans l’espace public, du fait spirituel ou religieux, mais plutôt la coexistence de tous.
Elle témoigne que nous sommes une société pluraliste où le droit nous protège et nous permet de vivre ensemble dans le respect, malgré nos désaccords fondamentaux sur ce qu’est la « bonne vie », sans que la majorité essaie de taire les autres.
Secte ou non, ces groupes ont le droit d’exprimer leur message, tout comme d’autres le font avec des publicités qui peuvent également choquer ou indigner.
Être une démocratie saine, c’est accepter d’être choqué sans recourir à la coercition. C’est dialoguer en sachant que nous ne convaincrons probablement pas l’autre, tout en le considérant comme un citoyen égal, digne et ayant les mêmes droits que nous.
Source : Inconnue