Mar. Mar 19th, 2024

Par Estelle Lamotte

Première artiste de scène et première femme noire à entrer au Panthéon français, Joséphine Baker couvre une multitude de dénominations : activiste, chanteuse, danseuse, mais avant tout résistante. 

La cérémonie de panthéonisation du 30 novembre dernier, fortement soutenue par le philosophe Régis Debray, nous rappelle « l’insaisissable beauté de notre destin collectif », selon les dires du Président français, Emmanuel Macron. Retour sur une femme accomplie qui trouve résonnance universelle.

Joséphine Baker, une icône féminine de la liberté

C’est au son du requiem républicain de Pascal Dusapin, In nomine lucis, que Joséphine Baker est entrée au Panthéon. Le cercueil, qui n’est en réalité qu’un cénotaphe, remonte rue Soufflot, devant 8000 spectateurs. L’interprète de la chanson J’ai deux amours  s’est éteinte en 1975 à Paris. Porteuse d’une certaine idée de l’humanité, cette dernière s’est lancée, face à l’ascension du nazisme, dans le contre-espionnage. Détentrice de la médaille de la Résistance française avec rosette le 5 octobre 1946, elle reçoit le soutien de nombreuses personnalités de la France.

C’est ensuite aux côtés de Martin Luther King, lors de ce fameux discours du 28 août 1963, date à laquelle ce dernier prononçait I Have a dream, que Joséphine Baker prit la parole. « Je ne dis pas qu’ils me battaient avec un bâton, ce que j’ai vu qu’on vous faisait, mais ils m’ont battue avec leurs stylos, avec leurs articles. Et cela, mes amis, je vous prie de croire que c’est bien pire », déclare-t-elle lors de son discours.

Celle qui a choisi la France

Née à l’aurore du XXe siècle, Joséphine Baker a vu le jour à Saint-Louis, dans un Missouri encore grandement marqué par le ségrégationnisme. Son enfance, marquée par la pauvreté et par les discriminations raciales, n’a en rien rendu ses rêves plus étroits.

En période de guerre, son courage lui a donné éclat. Engagée aux côtés des services secrets gaullistes dès 1940, compagnonne des sœurs Nardal et de René Maran, elle fait vivre à Paris la « culture noire » et ne cessera de détricoter les stéréotypes coloniaux dans ses représentations. « Celle qui a fait de la liberté à la fois son glaive et son bouclier n’aura eu de cesse d’être la voix des sans voix », d’après Elisabeth Moreno, ministre déléguée à l’Égalité hommes-femmes.

Jouer des stéréotypes

Derrière ses talents de danseuse, l’actrice trouve efficace de détourner une certaine préconception par le biais de la pitrerie volontiers associée, à l’époque, à des artistes venant d’ailleurs. C’est alors qu’elle s’amuse de cette image grotesque pour détourner, par exemple, la banane — symbole par excellence du racisme — en objet de dérision qu’elle agite au nez des spectateurs.

Ce faisant, elle s’inscrit dans le sillage de l’artiste acrobate Miss Lala, peinte par Edgar Degas, et du clown Chocolat, qui, avant elle, ont connu une postérité en usant à la fois des stéréotypes et de la dérision. Son héritage reste indéniable.


Crédit photo @ Domaine public

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