Ven. Mai 10th, 2024

Par Carolanne Boileau  

C’est après plusieurs mois de scandale que le conseil d’administration et le président-directeur général de Hockey Canada donnent finalement leurs démissions. Il aura fallu quatre ans et énormément de pression pour que les dirigeants se retirent.  

Pour plusieurs, au-delà des répercussions politiques, ce sont surtout les pressions financières qui auraient poussé le PDG et le conseil d’administration de Hockey Canada à démissionner. C’est notamment la vision du professeur Bernard Motulsky, affilié au département de communication publique et sociale de l’Université du Québec à Montréal, qui croit que le retrait des commanditaires a chamboulé l’organisation. En entrevue avec le journal La Presse, M. Motulsky affirme : « Hockey Canada avait de la pression du côté politique, mais aussi de la pression de la part des commanditaires qui se retiraient les uns après les autres […] Ils ont envoyé le signal que ça ne pouvait plus continuer ». 

Le PDG Scott Smith quittait ses fonctions au moment d’en faire l’annonce le mardi 11 octobre. Du côté du conseil d’administration, les membres conservent leurs postes jusqu’à la prochaine élection du conseil, le 17 décembre prochain. Naturellement, ils ne tenteront pas d’obtenir un autre mandat. On peut lire, dans un communiqué publié par l’organisme, leur plan pour assurer la transition : « un comité de gestion intérimaire sera mis en place et guidera l’organisation jusqu’à ce qu’au plus tard un conseil nouvellement constitué nomme un nouveau chef de la direction pour diriger l’organisation ». 

«Pas de doute»  

La démission en bloc de la direction de Hockey Canada n’est pas une grande surprise, elle était inévitable. Après plusieurs mois de pression de la part des élus à Ottawa, notamment du Bloc Québécois et de la ministre des Sports Pascale St-Onge, la direction de la fédération canadienne se retrouvait dans l’eau chaude. Le premier ministre Justin Trudeau avait lui-même décrété que les personnes en place avaient perdu la confiance des Canadiennes et Canadiens.  

De plus, Radio-Canada rapporte qu’un document publié le lundi 10 octobre est venu mettre de l’huile sur le feu. 24 heures avant la démission de Scott Smith et du conseil d’administration, l’ex-juge de la Cour suprême Thomas Cromwell a publié un rapport préliminaire sur l’affaire Hockey Canada. L’une de ses recommandations principales était évidemment la refonte complète de la direction de la fédération. Pour justifier sa proposition, Cromwell mentionne qu’il n’y a pas de doute, les dirigeants de Hockey Canada ont perdu la confiance de partenaires importants. Au-delà des partenaires et commanditaires, c’est la confiance de la population qui a été brisée au cours des derniers mois.  

Le rapport préliminaire de l’ex-juge de la Cour suprême du Canada a également révélé une information choquante. Il faut rappeler que les représentants de Hockey Canada avaient avoué, lors d’un comité parlementaire en juin dernier, détenir un fonds d’assurance pour couvrir les coûts en cas d’accusation envers leurs joueurs. Il y a moins d’un mois, l’existence d’un deuxième fonds a été dévoilée au grand jour par le Globe and Mail. Ce deuxième fonds, tout comme le premier, servait, entre autres, à indemniser des victimes d’agressions sexuelles. Finalement, le rapport du juge Thomas Cromwell a révélé qu’un troisième fonds était prévu pour couvrir les joueurs. Ce fonds était dissimulé dans les livres comptables.  

Ce ne sont donc pas un, pas deux, mais trois fonds qui étaient prévus au sein des finances de Hockey Canada. La direction avait donc une grande marge de manœuvre pour faire possiblement taire des victimes et indemniser celles-ci avant que leurs histoires éclatent au grand jour. Cette information, extrêmement dérangeante, démontre qu’il existe un problème réel au sein de la fédération canadienne. Avant le scandale actuel, il aurait paru impensable de se dire que nos équipes sportives prévoyaient de l’argent pour couvrir des agressions sexuelles commises par leurs joueurs.  

Changer entièrement la culture  

Malgré tout le temps que cela a pris, la démission de la direction de Hockey Canada est tout de même un pas dans la bonne direction. L’élection d’un nouveau conseil d’administration permettra certainement d’instaurer des changements concrets au sein de l’organisation. C’est surtout l’occasion, avec cette refonte, de s’assurer que des événements comme ceux de 2018 ne se reproduisent plus jamais. Ce scandale aura permis de mettre en lumière le fait qu’une véritable culture toxique est présente au sein de nos fédérations sportives et particulièrement au sein du monde du hockey.  

Comme Bernard Motulsky l’a si bien mentionné au journal La Presse: « ç’a traîné, mais c’est maintenant que les choses sérieuses commencent. Il faut remplacer les hauts placés et changer entièrement la culture de cette organisation ».  

Les prochains conseil d’administration et PDG de Hockey Canada auront énormément de travail à faire pour redorer l’image de la fédération canadienne. Ils devront surtout être en mesure d’apporter des solutions efficaces et regagner la confiance des commanditaires, des partenaires et de la population canadienne. Pour former ce futur CA, certains noms ont déjà été évoqués dans des discussions.  

Danièle Sauvageau, femme importante au sein du hockey féminin à l’échelle du pays, pourrait notamment se faire une place sur le conseil d’administration le 17 décembre prochain. Celle-ci se dit ouverte à la possibilité de rejoindre l’équipe de direction de Hockey Canada. Cette femme d’expérience pourrait certainement amener un vent de changement au sein de cette fédération qui en a grandement besoin. Il faut espérer que d’autres squelettes ne sortiront pas du placard jusqu’à l’élection du prochain CA.   


Crédit image @RDS

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