Jeu. Avr 25th, 2024

Par Laurence Poulin

L’été est synonyme de voyage et ce n’est pas nouveau. L’envie d’évasion, de découverte et de nouveaux paysages est recherchée par plusieurs d’entre nous. C’est aussi la saison du temps de recul sur notre vie, ou encore de création, de ces occasions d’évasion. Notre génération, celle dite des milléniaux, est caractérisée par cette vie ponctuellement nomade, à la recherche d’on-ne-sait quoi, mais à la recherche de quelque chose « d’autre » plutôt que du désir d’établissement sédentaire – la maison, le chien et les enfants – comme les générations nous précédant. Afin d’appuyer ce phénomène, le site Bloomberg notait que cette transformation caractérisée par notre génération se remarque maintenant dans les résultats des entreprises cotées en bourse aux États-Unis et en Europe. En effet, les entreprises qui proposent des expériences, des loisirs ou encore des voyages dépassent maintenant celles qui vendent des biens de consommation.

Mais ce on-ne-sait-quoi recherché, passant par cette consommation d’expériences et ce besoin de nouveau, de découverte, de fraicheur dans nos vies, vers quoi nous mène-t-il? Que cherchons-nous? Un chauffeur de taxi se disant astrologue de passion m’a dernièrement entretenue sur mon signe astrologique. Un peu comme une liseuse de carte, il a voulu deviner quel signe j’étais. Par une série de questions, il est arrivé à m’identifier comme Sagittaire, ce que je suis réellement. Le lien? Sa réponse. Elle m’a menée à cette réflexion liée au voyage. Selon lui, les Sagittaire sont à la recherche de découvertes, de nouveautés, d’apprentissage de nouvelles langues. Dit comme ça, on serait pas mal tous des Sagittaire en cette génération. Mais je doute que cela corresponde vraiment aux théories astrologiques qui, il faut le dire, peuvent être facilement remises en doute. Mais si vous pensez que si Saturne arrive en Vénus vous aurez de la chance aujourd’hui, libre à vous. On est dans une société démocratique après tout!

On connait tous également le dicton voulant que « les voyages forment la jeunesse ». Tous celles et ceux allant en session ou en stage à l’étranger en reviennent changés et transformés. Et ces gens un peu perdus dans cette société quelque peu aliénée par l’avenir et le marché du travail, eux aussi partent pour trouver des opportunités ailleurs parfois, et je dirais même souvent pour se trouver tout court. Toutes ces personnes ont la chance de vivre dans une époque où les voyages sont de plus en plus abordables, de plus en plus accessibles, permettant ainsi de vivre des expériences, de se transformer.

D’où vient ce besoin? L’humain cherche toujours à aller plus loin, que ce soit dans la recherche médicale – nous pouvons désormais faire des miracles – ou dans la technologie – écrire instantanément d’un bout à l’autre du monde était, il y a encore quelques années, une utopie presque inimaginable. Notre génération ne fait pas exception à ce besoin d’innovation, mais celui-ci servirait plutôt à combler la crise existentielle postmoderne. En effet, tel qu’estimé par Damian Barr, auteur de A Guide to Surviving Your Quaterlife Crisis, notre génération doit affronter les milliers de diplômés qui, comme vous et moi, se cherchent un emploi dans leur domaine (celui qu’on nous a toujours promis accessible et réalisable), cela passant par le remboursement des dettes d’études, à travers une jonglerie réunissant travail et relations personnelles. Je ne sais pas pour vous, mais des fois je ne rattrape pas les balles.

Et au final, que cherchons-nous vraiment? Peut-être un brin de contact dans ce monde d’iPhone15, de réseaux sociaux qui, paradoxalement, vous coupent de votre souper avec votre ami un peu déprimé à coup de vibrations sur la table du restaurant, ces dernières étant des notifications du dernier voyage en Thaïlande d’une personne que vous connaissez à peine,  mais qui prend franchement de superbes photos, qui, elle, aura peut-être zappé un peu la splendeur de ce spectacle avec ses yeux trop occupés à vous le montrer sur votre écran entre deux filtres Snapchat. En bref, c’est peut-être le fait d’être poussés dans un monde virtuel qui nous désoriente de la réalité, qui nous pousse à nous questionner sur ce qu’on veut vraiment et pourquoi.

La manière de voyager a également grandement évolué depuis les dernières décennies. On ne voyage plus de la même façon et ça influence grandement cette augmentation du nombre de voyageurs. Les Jack Kerouac de ce monde sont de plus en plus nombreux. Les jeunes qui voyagent seuls et sans itinéraire planifié d’avance sont courants sur tous les continents alors que cette façon de voyager n’était pas du tout normale il y a quelques années. L’industrie s’est adaptée et renforce cette manière de faire, elle en profite. On peut maintenant parler de marché du voyage.

Dans ce marché, ce qu’on surnomme parfois les repaires des milléniaux, les hostels ou encore les auberges de jeunesse, connaissent une croissance telle que l’a connu l’industrie hôtelière d’il y a 25 ans, selon Hostelling International USA. Bien plus facile qu’avant, on peut réserver pour très peu couteux et pour très confortable, le tout sur un téléphone intelligent. Dans cette industrie même, l’idée qu’on avait des auberges de jeunesse a beaucoup changé.

Par expérience personnelle, c’est ce besoin de rencontre qui dépasse tout le reste. Le voyage, c’est des paysages magnifiques, mais au-dessus de tout cela, c’est des rencontres mémorables qui m’ont permis de me construire par des souvenirs partagés avec des gens que je ne reverrai peut-être jamais, mais qui auront placé une pièce dans le puzzle que je suis.


Crédit Photo © Laurence Poulin

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