Une nouvelle tradition en take-out s’il vous plaît

Par Sébastien Binet

Lorsque j’étais petit, mes parents m’ont donné l’opportunité de faire du sport. Pas celui qu’ils désiraient, celui que moi je voulais pratiquer, moi le jeune enfant insouciant aussi décidé qu’une girouette durant un ouragan. Pour une raison que j’ignore, j’ai choisi un sport très peu populaire, le baseball. J’étais loin de me douter que ce sport allait occuper mes pensées et devenir pour moi une tradition.

Jouer dans une petite ville, c’est bien. Tu connais les entraineurs et souvent tu finis par jouer avec les mêmes joueurs que toutes tes années précédentes. Tu finis par connaître tout le monde, mais par-dessus tout, ça te prend environ sept minutes de vélo te rendre au parc et seulement trois en auto si tu es malchanceux et tombes sur une des deux lumières rouges en chemin. C’est bien de jouer dans ta ville natale, mais je me suis rapidement lassé de l’aspect rural du baseball et je suis passé au niveau supérieur.

Jouer au baseball au niveau compétitif, c’est aussi jouer à minimum 25 minutes d’auto de ton domicile. J’étais chanceux, mes parents me poussaient à le faire. Pas qu’ils appréciaient payer plus cher, voyager plus loin ou simplement endurer le calibre de baseball d’un garçon de 7 ans, mais plutôt parce qu’ils savaient que j’aimais cela. Pour moi, c’est à ce moment que le baseball est devenu une tradition. À cet âge, tu ne t’en rends pas compte, mais du haut de mes 22 ans maintenant, je regarde derrière et je vois que chaque été devenait une routine. Notre routine.

Je réalise à peine encore aujourd’hui à quel point c’était demandant pour mes parents. Si pour moi c’était devenu une routine, ça l’était aussi pour eux et pourtant jamais je ne les ai entendus s’en plaindre (OK peut-être une ou deux fois quand l’envie de bien jouer me passait), mais ils l’ont toujours fait en mettant leurs priorités de côté. L’été devenait une tradition familiale, celle de permettre à moi et mes sœurs de faire le sport qu’on aimait. Pas la plus belle tradition, mais celle de la famille Binet durant plusieurs années.

Avec le temps, j’ai vieilli. Le sport est devenu beaucoup plus sérieux. La compétition m’apportait du plaisir, mais aussi des tristesses et des frustrations. Mes parents ont toujours été fidèles au poste pour vivre ces montagnes russes d’émotions avec moi. Lorsque des difficultés arrivaient, ils me consolaient, me rassuraient. Leurs craintes restaient au vestiaire et ils continuaient à me regarder progresser dans les méandres du baseball québécois. J’y ai fait mon petit bout de chemin. Pas facile comme on dit de ressortir du lot, mais j’ai réussi à ma façon. Pas parce que j’étais meilleur que les autres, mais bien parce que j’avais deux parents extraordinaires pour me pousser à continuer.

À l’aube de la saison des camps d’entrainement qui se pointe le bout du nez, je deviens nostalgique. L’été de mes 22 ans sera officiellement la fin d’une longue tradition puisque c’est à cet âge qu’on peut jouer pour la dernière fois en tant que junior avant de tomber dans le monde des adultes. La dernière saison qui revêtira la même formule que je connais depuis maintenant 18 ans avant de changer pour de bon. La tradition va changer, tout comme celle de mes parents a changé et comme la mienne rechangera probablement lorsque mes enfants viendront au monde. Tout est en continuel changement, mais les différentes traditions que nous instaurerons tous dans nos vies seront des moments qui nous procureront du bonheur. Des moments tant attendus année après année qui nous réjouissent. Le camp d’entrainement ou le premier lancer de la saison laisseront place au dernier coup sûr et à la dernière présence au bâton de ce que j’appellerai plus tard ma carrière de baseballeur.

Cette tradition est loin d’être celle des soirées de Noël au Lac-Saint-Jean, mais c’est ce qui m’a permis d’être la personne que je suis aujourd’hui. Le sport forme le caractère et nous impose de la discipline que nous appliquons ensuite dans les divers aspects de notre vie. Mes parents ont toujours dit qu’il était plus sage de me faire pratiquer du sport que de me voir flâner. Si pour cela il a fallu leur demander 15 étés de leur vie à me suivre pour me voir pratiquer le sport qui m’allumait, je peux affirmer maintenant haut et fort que nos parents nous élèvent et nous aident à devenir les individus que nous sommes maintenant, mais c’est grâce aux traditions que nous avons tant aimées que nous déciderons d’en faire autant pour nos enfants le moment venu.


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