Mar. Déc 5th, 2023

Par Benjamin Le Bonniec

Événement érotico-cinématographique de l’année 2011, je vous propose à l’occasion de cette Saint-Valentin 2016 de voir ou de revoir ce film conceptuel aux belles promesses sensuelles et à l’érotisme glaçant. Pour son premier film, l’écrivaine et réalisatrice australienne Julia Leight dresse dans cette fable perverse un tableau esthétique et élégant d’un monde fétichiste et féérique où plane un esprit morbide.

Adaptation du roman Les belles endormies (1966) de Yasunari Kawabata, Sleeping Beauty nous conte l’entrée d’une jeune étudiante jouée par l’admirable Emily Browing dans un univers de maison close à la singularité troublante, presque déconcertante. Légèrement perdue dans sa vie, Lucy vit de petits emplois sans réelles perspectives d’avenir et, à la suite d’une annonce des plus mystérieuses, accepte une offre où la classe, la discrétion et la féminité sont requises. Sans le savoir, elle va pénétrer dans un temple où cette héroïne glaciale sera la proie de vieux pervers pendant qu’elle dormira sous somnifères dans un décor luxueux et bourgeois.

Dressant élégamment le tableau fascinant d’un milieu perverti et libidineux, Julia Leight propose une succession de décors à l’esthétisme féérique par une mise en scène méticuleuse représentant avec brio les codes bourgeois allant jusqu’au fétichisme dérangeant. La réalisatrice ne renouvèle pas le genre en termes de plan et d’image. Duveteux et lisse, le film refroidit tant dans le propos que dans la forme. Pourtant, on reste subjugués par le récit de cette jeune femme prête à repousser les limites de sa condition pour accéder à un milieu originellement interdit. Emily Browing porte à elle seule ce film dans une interprétation captivante malgré l’aigreur du personnage de Lucy.

Avec Sleeping Beauty, Julia Leight reste dans le cinéma d’auteur avec ce récit robotique dans cette relecture contemporaine du conte de La Belle au bois dormant. L’auteur de The Hunter nous saisit rapidement, mais la lenteur des épisodes successifs devient peu à peu fade sans pour autant nous faire fuir. Son mérite reste d’avoir dressé plusieurs tableaux d’intérieur bourgeois et luxueux avec un esthétisme minutieux nous rappelant Jane Campion (The Piano, Bright Star) ou Bertrand Bonnello (L’Appollonidesouvenirs de la maison close) et surtout d’avoir sublimé Browing qui bénéficie de tous les atouts pour devenir une égérie par son jeu de séduction et sa féminité sensuelle débordante.

Légèrement déroutant sans en être moins captivant, ce film, nominé à Cannes notamment, mérite le détour pour son érotisme dérangeant, mais esthétiquement réussi. On peut aisément le ranger pas loin des Antechrist ou Nymphomaniac de Lars Von Trier, Campion ayant d’ailleurs suggéré à Emily Browing de visionner le premier cité pour s’inspirer de la performance de Charlotte Gainsbourg.

Note : 3.5/5

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