Ven. Juil 26th, 2024

Par Gabrielle Goyet 

Le mercredi 17 janvier dernier, le premier ministre du Québec, François Legault, acheminait à son homologue canadien une lettre exigeant une baisse des demandeurs d’asile au pays. En réaction, Justin Trudeau et son cabinet ont convenu, le lendemain, que la lettre était « très constructive » pour le fédéral. Contre toute attente, le gouvernement canadien a cependant priorisé des annonces visant les étudiants étrangers, n’ayant pas encore à ce jour annoncé officiellement de résolutions quant au nombre croissant de demandeurs d’asile. 

Le gouvernement du Québec a choisi de faire cette sortie envers le fédéral en raison des chiffres officiels récents : selon Legault, le Québec à lui seul aurait accueilli plus de demandeurs d’asile que tous les autres provinces et territoires réunis en 2022. On estime qu’en 2023, ce sont plus de 65 000 personnes qui ont décidé de s’établir au Québec pour demander l’asile.  

Dans un contexte où les logements se font de plus en plus rares dans la belle province, Legault s’est résigné à écouter les craintes soulevées par l’opposition depuis un certain temps déjà. L’argument soulevé entre autres par le Parti Québécois est celui qu’il faut accueillir avec dignité ces personnes et leur offrir les services nécessaires à leur intégration. Actuellement, Legault admet que les demandeurs d’asile représentent près de 16 % des prestataires de l’aide financière de dernier recours. 

De surcroit, le gouvernement du Québec a dû ouvrir 1 150 classes de francisation et d’intégration pour absorber le choc de ces arrivées massives, ce qui représente « l’équivalent d’une cinquantaine d’écoles primaires », toujours selon le premier ministre. Les dépenses s’additionnent et pourtant, les transferts fédéraux en immigration n’ont pas suivi cette même augmentation. C’est la raison pour laquelle Legault s’est résigné à demander de l’aide au gouvernement de Trudeau, le 17 janvier dernier. Il a également énoncé que la province en était à un « point de rupture » quant à ses capacités d’accueil dans les conditions actuelles.  

Québec a demandé à Ottawa un remboursement d’une valeur de plus de 470 millions de dollars pour les diverses dépenses encourues pour l’accueil des migrants. Le ministre fédéral de la Sécurité publique, des Institutions démocratiques et des Affaires intergouvernementales, Dominic LeBlanc, a déclaré qu’il reconnait « que le Québec a fait énormément pour accueillir les demandeurs d’asile, et on va s’assurer qu’il y ait une comptabilité appropriée ». « Ma collègue, la ministre des Finances, va travailler avec son homologue au Québec. On reconnait qu’il y a des dépenses accrues », a-t-il ajouté. 

Étudiants étrangers 

En réponse, lors d’un point de presse le 22 janvier dernier, le ministre de l’Immigration, Marc Miller, a choisi de miser sur des actions visant davantage les étudiants étrangers que la gestion de la hausse des demandes d’asile. Ce dernier a amorcé son allocution par l’annonce de mesures pour contenir « la hausse rapide du nombre d’étudiants étrangers au Canada ».  

D’une part, le gouvernement fédéral imposera un plafond national du nombre d’étudiants étrangers admis au Canada. À l’heure actuelle, le ministre a annoncé viser une réduction d’environ 35 % des approbations des permis d’études, ce qui entraînera vraisemblablement des répercussions sur le financement des institutions universitaires canadiennes. 

D’autre part, Miller a également annoncé qu’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC) « attribuera une partie du nombre de demandes plafonné à chacune des provinces et chacun des territoires, qui répartiront ensuite le nombre qui leur a été alloué entre leurs établissements d’enseignement désignés ».  

Habituellement, le Québec et l’Ontario reçoivent la forte majorité des personnes étudiantes étrangères, cela pourrait donc engendrer un débalancement dans le financement de leurs institutions. En contrepartie, la ministre québécoise de l’Immigration, Christine Fréchette, a avancé que la mesure n’aura « qu’un effet limité sur la situation du logement, puisque les quotas d’émission de permis d’études annoncés ne toucheront pas le Québec ».  

« L’urgence pour Ottawa, c’est d’agir rapidement sur le dossier des demandeurs d’asile. Il doit mieux répartir l’accueil de ces personnes à travers l’ensemble des provinces du Canada et rembourser le Québec pour les dépenses encourues au cours des dernières années », a défendu le bureau de la ministre Fréchette. 

Les demandeurs d’asile mexicains 

Selon d’autres analystes, la problématique principale serait plutôt issue du Sud. En effet, le gouvernement de Justin Trudeau a retiré l’obligation pour les personnes mexicaines d’avoir un visa pour entrer en sol canadien en décembre 2016. Depuis, le nombre de ressortissants mexicains ayant réclamé asile au Canada a explosé. Parmi les pistes de solutions envisagées, Québec a proposé de réinstaurer le visa obligatoire pour freiner la hausse de demandes d’asile.  

Le gouvernement Trudeau a rétorqué vouloir explorer les options diplomatiques avec ses homologues mexicains avant de s’engager dans une telle voie. Puisque le Mexique est un important partenaire commercial du Canada en vertu de l’Accord Canada–États-Unis–Mexique (ACEUM), il est préférable pour le gouvernement fédéral de ne pas se mettre à dos d’importants alliés.  

« C’est clair que l’on regarde les mesures que l’on peut prendre comme pays pour assurer qu’on fait notre travail. En ce qui a trait aux demandeurs d’asile qui viennent du Mexique, on a vu un flux énorme de gens qui viennent du Mexique et qui réclament le statut d’asile », a admis Marc Miller. « C’est clair qu’un tour de vis s’impose. Est-ce que c’est un quart de tour, un demi-tour ou deux tours? C’est à déterminer. Nous sommes encore en train de réfléchir à l’approche à prendre », a-t-il précisé.  

Rappelons que l’an dernier, le gouvernement Trudeau a pris la décision de fermer le chemin Roxham le 25 mars 2023. Cette décision visait à réduire le flux de migrants cherchant asile à pied par la frontière canado-américaine. Ironiquement, les demandes d’asile ont continué leur augmentation, ayant connu une hausse de 16 % pour l’année 2023 comparativement à 2 022.  


Source: Flickr Jesus Perez Pacheco

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Gabrielle est une étudiante à la maitrise en études politiques appliquées, cheminement recherche avec rédaction. Outre pour le côté académique, elle affectionne l’écriture pour l’aspect émancipateur de la chose.

Pour elle, c’est à la fois un défi et un divertissement d’être informée de tout ce qui se passe sur le campus. Autrefois Vice-Présidente aux affaires internes à la Fédération étudiante de l’Université de Sherbrooke (FEUS), elle n’en est pas à sa première fois lorsqu’on parle de couvrir les événements des divers campus de l’UdeS. Si elle adore échanger dans les 5 à 8, elle prend également un grand plaisir à fréquenter les activités culturelles et politiques de notre université. Étant très extravertie, c’est avec joie que Gabrielle se renseigne sur les projets étudiants développés au sein de sa communauté.