Mar. Juil 23rd, 2024

Par Gabrielle Goyet 

Pour la nouvelle année, plus de la moitié de la population mondiale sera invitée à s’exprimer dans le cadre d’élections. Il s’agit d’un record en matière de scrutins momentanés, alors que 4,1 milliards de personnes pourront voter dans leur pays respectif pour faire élire des représentants politiques. Ces moments charnières promettent d’avoir des impacts retentissants sur les dynamiques globales, alors que l’issue de plusieurs scrutins reste à déterminer. Les résultats de ce « record démocratique » seront lourds de sens, alors qu’un nombre croissant de pays cèdent à l’autocratie au fil des ans. 

En tout, 68 pays connaitront des élections de nature présidentielle, législative, sénatoriale, régionale ou encore municipale. Huit des dix pays les populeux au monde font partie de cette liste impressionnante, soit le Bangladesh, le Pakistan, l’Indonésie, la Russie, l’Inde, le Mexique, le Brésil et les États-Unis. Certains de ces pays sont considérés comme des « démocraties complètes », tandis que d’autres sont déjà des démocraties de façade. Les répercussions de ces scrutins seront multiples, alors que certains pays oscillent entre démocratie et autoritarisme. De surcroit, certains votes s’annoncent particulièrement importants en raison des répercussions qu’engendreraient les différentes issues potentielles. 

« Sleepy Joe » ou « The Donald »? 

L’un des scrutins les plus attendus est vraisemblablement la présidentielle américaine, qui se déroulera le 5 novembre 2024. D’ici là, la course électorale s’amplifiera inévitablement. Une joute à deux semble se consolider, alors que les sondages nationaux offrent une avance à Joe Biden et à Donald Trump. L’affrontement ultime au solde des primaires sera donc probablement entre l’actuel président démocrate et l’ex-président républicain. Plusieurs revirements de situations pourraient cependant se produire, alors que les États du Colorado et du Maine ont déjà annoncé leur décision de retirer le nom de Donald Trump des bulletins de vote aux primaires. 

Le fruit du scrutin aura forcément un impact sur l’équilibre mondial, considérant le rôle imposant que jouent les États-Unis sur la scène internationale. Joe Biden a réussi à faire approuver un nouveau budget comportant 250 millions de dollars en aide militaire pour l’Ukraine, ainsi que des fonds pour supporter humanitairement le peuple palestinien. Bien que critiqué par plusieurs pour sa posture pro-Israël, l’actuel président demeure plus modéré que son principal adversaire. Si élu, Trump a promis de couper le financement octroyé au peuple palestinien ainsi qu’à l’Ukraine. D’une façon ou d’une autre, le résultat de la présidentielle américaine aura nécessairement des impacts sur plusieurs dynamiques internationales. 

Inde et Russie 

L’Inde sera en élection en avril et en mai, ce qui soulève plusieurs questionnements. Ce sont 800 millions de personnes électrices qui seront appelées aux urnes, dans un contexte où la démocratie indienne semble s’éroder depuis quelques années. Le surnom octroyé à « la plus grande démocratie du monde » pourrait ainsi perdre son sens selon le déroulement de l’élection. L’actuel premier ministre, M. Modi, est loin de faire l’unanimité au sein des diversités culturelles de l’Inde. Malgré son support marqué chez la majorité hindoue, plusieurs traits antidémocratiques ont été soulignés chez le politicien. 

Un peu plus au nord, le « pays des tsars » semble s’être transformé en « pays du tsar ». La Russie tiendra officiellement des élections en mars, mais depuis l’emprisonnement d’Alexei Navalny, peu d’opposants se dressent devant Vladimir Poutine. Bien que quelques autres noms puissent apparaitre sur le bulletin de vote, les résultats devraient avoisiner ceux de l’élection de 2018, ayant accordé la victoire à Poutine avec 76,7 % des voix. 

En apposant côte à côte ces deux cas d’école, on peut dessiner une tendance. « Il faut distinguer deux types de pays où il va y avoir des élections », estime Jean Lachapelle, professeur adjoint au Département de science politique de l’Université de Montréal. « Il y a des régimes autoritaires, comme la Russie et le Venezuela, où le résultat est beaucoup moins incertain que dans des pays où on voit des démocraties qui ont connu un déclin au cours des dernières années ». À l’instar de l’Inde, il faut porter un œil plus particulièrement aux démocraties affaiblies, mais toujours vivantes. « Ce sont plutôt les démocraties en déclin qui sont importantes, parce que ce sont des endroits où les électeurs ont le potentiel de renverser la tendance », souligne le Professeur Lachapelle. 

Une polarisation marquée 

Fidèles au discours de Donald Trump en 2016, de plus en plus de politiciens dénoncent l’establishment politique. Le recours à un narratif plus populiste peut s’avérer payant dans les pays plus instables ou aux prises avec de graves crises, comme en a témoigné la récente élection de Javier Milei en Argentine en décembre dernier. Ces discours peuvent s’avérer dangereux, car ils représentent parfois le début d’un affaissement démocratique. « Lorsqu’on a une démocratie qui n’est pas capable de livrer un certain niveau de vie à la population, il peut y avoir un désenchantement. Dans les démocraties plus fragiles, où les institutions n’ont pas été consolidées, le risque est encore plus élevé », mentionne Jean Lachapelle. 

En revanche, si l’on assiste de plus en plus à un recul de la démocratie dans le monde, on assiste également à une montée des régimes dits « hybrides ». Ceux-ci correspondent aux systèmes politiques créés « à la suite d’une transition incomplète d’un régime autoritaire à un régime démocratique, ou vice versa ». On en convient donc que les tendances autoritaires sont en hausse, mais que cela ne veut pas dire que la démocratie ne fait pas de gains à certains endroits.  

L’organisme Freedom House demeure cependant très cynique quant aux bouleversements que pourrait engendrer un débalancement des systèmes politiques à l’échelle mondiale. « Les droits politiques et les libertés civiles ont décliné dans le monde entier au cours de chacune des 16 dernières années, ce qui laisse entrevoir la possibilité que l’autocratie puisse supplanter la démocratie en tant que modèle de gouvernance guidant les normes internationales de comportement », peut-on lire dans un récent rapport.  

En outre, 2024 sera définitivement un moment marquant pour l’avenir de plusieurs régimes politiques, et qui sait, peut-être même pour l’ordre mondial. 


Source: Wikimedia Commons

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Cheffe de pupitre SOCIÉTÉ pour le journal Le Collectif | Site web

Gabrielle est une étudiante à la maitrise en études politiques appliquées, cheminement recherche avec rédaction. Outre pour le côté académique, elle affectionne l’écriture pour l’aspect émancipateur de la chose.

Pour elle, c’est à la fois un défi et un divertissement d’être informée de tout ce qui se passe sur le campus. Autrefois Vice-Présidente aux affaires internes à la Fédération étudiante de l’Université de Sherbrooke (FEUS), elle n’en est pas à sa première fois lorsqu’on parle de couvrir les événements des divers campus de l’UdeS. Si elle adore échanger dans les 5 à 8, elle prend également un grand plaisir à fréquenter les activités culturelles et politiques de notre université. Étant très extravertie, c’est avec joie que Gabrielle se renseigne sur les projets étudiants développés au sein de sa communauté.