Ven. Mar 29th, 2024

Par Josiane Demers 

En janvier dernier, aux Internationaux de Tennis d’Australie, Jelena Dokic, ancienne quatrième raquette mondiale, a été victime de commentaires grossophobes sur les réseaux sociaux à la suite d’une entrevue qu’elle avait accordée sur le court central. Cet entretien qui a été diffusé à la télévision semble avoir causé un tollé sur la toile, alors qu’encore beaucoup de gens considèrent qu’il est encore approprié de passer des commentaires désobligeants sur le physique des femmes, en particulier des athlètes.  

Les gens de mauvaise foi souligneront sans doute qu’en étant une « personnalité publique », une femme devrait accepter que cela fasse partie des choses à tolérer. Toutefois, il y a une énorme différence entre recevoir des commentaires désobligeants sur ses performances sportives et sur son physique. Le plus triste, c’est que pratiquement toutes les femmes sur la planète ont des complexes à différents degrés parce que depuis la plus tendre enfance, elles se font répéter qu’elles sont, entre autres, soit trop grosses ou soit trop minces.  

Dokic dénonce 

Heureusement, depuis quelques années, certaines sociétés semblent avoir entamé des conversations sur les problématiques de grossophobie et de body shaming. Cela donne lieu à des dénonciations. Les femmes ont de moins en moins peur de s’exprimer et de répondre à ces bêtises.  

À la suite de l’entrevue, Jelena Dokic a dénoncé ses détracteurs en plus de citer quelques commentaires en exemple. Partout sur les réseaux sociaux on retrouvait des termes tel que « grassouillette » ou « grosse ». Comme mentionné sur le site Purepeople, des gens allaient même jusqu’à se plaindre que sa présence sur leur écran les empêchait de profiter du Tennis : « Je trouve ça totalement injuste qu’une baleine comme Jelena Dokic m’empêche de profiter de la joie de regarder du tennis », a lancé un internaute. Un commentaire qui revenait beaucoup était : « qu’est-ce qui lui est arrivé ». Comme si avoir grossi est un signe que quelque chose de perturbant s’est produit dans la vie de quelqu’un ou que la personne se laisse aller. Il s’agit là de fausses croyances que beaucoup tentent de démystifier, mais parfois, les préjugés sont plus forts que la raison.  

Rappelons que cette athlète a percé le top 10 mondial et s’est hissée au quatrième rang mondial en 2002. Elle s’est rendue en demi-finale du tournoi de Wimbledon. Elle est maintenant consultante dans les médias. Elle a probablement accompli plus dans sa vie de femme de 39 ans que plusieurs de ses détracteurs.  

Jelena en a eu assez de ces commentaires haineux et s’est exprimée sur les réseaux sociaux afin de dénoncer ce à quoi elle était confrontée. « Ce que je fais et ce qui s’est passé n’ont vraiment pas d’importance, la taille ne devrait pas avoir d’importance. Ce qui compte, c’est l’abus en ligne, l’intimidation et l’humiliation des gros. C’est ce qui compte, parce que ceux d’entre vous qui le font sont juste de mauvaises personnes, méchantes et ignorantes », a-t-elle déclaré sur Instagram.  

Plus ça change, plus c’est pareil? 

L’histoire semble se répéter parce qu’en 2017, Serena William avait également dénoncé ses détracteurs qui la jugeaient grosse. Ici on ne parle pas seulement d’une des plus grandes athlètes féminines au monde, mais bien une des plus grandes athlètes au monde, point ! 

Pourtant, ses performances spectaculaires et sa détermination sur le court n’ont jamais dissuadé les gens de commenter son apparence physique. Dans une entrevue accordée à Self, un média américain, elle a souligné la difficulté de se concentrer sur son jeu complètement, alors que tous ces commentaires haineux à son endroit circulaient. Non seulement devait-elle composer avec le public, mais les propos venaient aussi d’autres joueuses comme Maria Sharapova. Un tweet sur le fil de J. K. Rowling, autrice de la franchise Harry Potter, est même allé jusqu’à dire qu’elle était « bâtie comme un homme » et que « les autres joueuses pourraient devenir aussi musclées et carrées qu’elle, mais qu’elles choisissaient de ne pas le faire pour rester féminines ». 

Une tendance dangereuse 

La grossophobie et le body shaming sont problématiques en général. Cependant, cette tendance devient encore plus dommageable et dangereuse lorsqu’il s’agit d’athlètes. Malheureusement, dans plusieurs sports, en particulier la gymnastique, la nage synchronisée et le patinage artistique, la pression ne vient pas seulement des spectateurs, mais aussi des organisations sportives et des entraineurs et entraineuses. Ce sont des disciplines où le physique est particulièrement mis de l’avant.  

Dans un documentaire intitulé Pression, paru sur le Club Illico, six anciens Olympiens et Olympiennes en patinage artistique ont souligné les ravages que le culte du corps a eus sur eux et elles. On parle ici de problèmes d’anorexie, de boulimie et d’anxiété sévère. Le Journal de Montréal a exposé le fait que Patinage artistique Canada et Patinage artistique Québec ont refusé de participer au documentaire. Cela démontre bien les problématiques présentes dans plusieurs fédérations sportives. À cause de cette fermeture d’esprit et de ces attitudes réfractaires aux changements, des athlètes développent des troubles sérieux mettant en danger leur santé physique et mentale.  

Évidemment, ce ne sont pas que les femmes qui sont victimes de grossophobie. Néanmoins, la tendance aux commentaires disgracieux à l’égard du physique des athlètes est souvent dirigée vers les femmes. Jelena Dokic est un exemple à suivre, car il est important de dénoncer ces comportements malsains afin de tenter de changer les choses. Espérons maintenant que les fédérations sportives accéléreront leur pas dans la bonne direction parce qu’en attendant, des athlètes souffrent.  


Crédit image @Pixabay

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